
En étudiant la composition chimique des grains de café extraits des excréments de petits mammifères asiatiques, des chercheurs ont mis en évidence des différences ouvrant la voie à la production du célèbre « kopi luwak » sans le concours de ces animaux.
Café fécal
Essentiellement produit en Indonésie, aux Philippines et au Vietnam, le kopi luwak se monnaie plus de 1 000 euros le kilo. Un montant exorbitant étroitement lié à la façon peu ragoûtante dont il est produit : les fruits du caféier ont préalablement transité par le tube digestif de civettes palmistes asiatiques (Paradoxurus hermaphroditus), qui digèrent uniquement leur pulpe.
Ces dernières années, la révélation des conditions déplorables dans lesquelles la plupart de ces animaux sont maintenus a poussé de nombreuses associations de défense des animaux à tirer la sonnette d’alarme.
Afin de percer ses secrets, Palatty Allesh Sinu, de l’université centrale du Kerala, et ses collègues se sont rendus dans cinq exploitations indiennes où les civettes vivent en liberté et ont récolté des dizaines d’échantillons.
La comparaison chimique des grains extraits des excréments des civettes à ceux prélevés directement sur les caféiers robusta des plantations a révélé une teneur totale en graisses nettement plus élevée pour les premiers, quand leurs niveaux de caféine, de protéines et d’acidité s’avéraient sensiblement plus faibles. L’équipe a également constaté que plusieurs organiques volatils systématiquement trouvés dans les grains de café ordinaires étaient présents en quantités infimes, ou absents.

Vers un kopi luwak « sans civettes »
Selon Sinu, des concentrations plus importantes de matières grasses expliquent en grande partie le profil aromatique unique du kopi luwak, aux notes boisées et chocolatées, tandis que son amertume et son acidité réduites seraient le résultat de la fermentation superficielle des grains, favorisant la dégradation de certaines protéines clés.
Jugeant le maintien en cage des civettes cruel, le chercheur estime que l’approfondissement de ces recherches pourrait aboutir à la mise au point d’une technique de fermentation artificielle permettant d’obtenir un café présentant les mêmes atouts que le kopi luwak traditionnel.
« Le microbiote intestinal contribue à la digestion des fruits et la fermentation des grains », écrivent les auteurs de la nouvelle étude, publiée dans la revue Scientific Reports. « Une fois les enzymes impliquées identifiées, nous pourrons potentiellement produire ce café sans utiliser ces animaux. »
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