
À la fin des années 1970, le physicien Anatoli Bougorski a eu le crâne traversé de part en part par un faisceau de protons se déplaçant à une vitesse proche de celle de la lumière. De récentes modélisations ont permis de préciser sa trajectoire.
Une reconstitution minutieuse
Ce terrible incident s’est produit le 13 juillet 1978 au synchrotron U-70, plus grand accélérateur de particules de l’URSS (1,5 kilomètre de long). Alors âgé de 36 ans, Bougorski avait glissé sa tête à l’intérieur du dispositif afin d’examiner un détecteur défectueux. Les rapports officiels ont par la suite révélé une panne de plusieurs mécanismes de sécurité ce jour-là, ayant entraîné sa mise en marche accidentelle.
Selon les auteurs de la nouvelle étude, publiée dans la revue OrtogOnline, en l’absence d’informations médicales détaillées, reconstituer le trajet exact du faisceau hautement énergétique n’a pas été une mince affaire. En examinant la photographie granuleuse originale, sur laquelle figurait l’angle probable selon lequel il avait pénétré l’arrière de la boîte crânienne du malheureux physicien, l’équipe a constaté que le visage boursouflé de Bourgoski n’était pas parfaitement de profil.
La prise en compte de ce léger décalage a révélé que le faisceau avait traversé son lobe temporal (étroitement lié à l’audition, au langage, à la mémoire et à la vision), expliquant en grande partie ses fréquentes crises d’épilepsie après l’accident.
Avant de sortir au niveau de sa narine, la salve de protons a également touché le labyrinthe osseux de son oreille gauche, expliquant sa surdité unilatérale. La paralysie de la moitié de son visage a de son côté été attribuée à l’endommagement du nerf infraorbitaire, ou de l’os temporal.

Miraculé
De façon assez miraculeuse, le faisceau a essentiellement évité les sections les plus critiques du cerveau, avec des dommages n’ayant pas altéré de manière significative la perception ou les facultés cognitives de Bougorski. Un peu plus d’un an plus tard, l’homme a repris le travail, et a même validé un doctorat dans les années 1980. Il a pris sa retraite en 2019, à l’âge vénérable de 77 ans.
On estime qu’il a reçu entre 2 000 et 3 000 grays au cours de l’incident, soit des doses de rayonnement jusqu’à 600 fois supérieures à celles considérées comme mortelles pour un humain.
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Par Yann Contegat, le
Source: IFL Science
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