
Si la musique adoucit les mœurs, elle a également sauvé des milliers de cétacés d’une mort certaine au milieu des années 1980. Retour sur l’audacieuse, mais couronnée de succès, « Opération Béluga ».
Une situation critique
En 1985, une importante population de bélugas évoluant à proximité de la péninsule Tchouktche, à l’extrémité nord-est de la Russie et du continent asiatique, se retrouve séparée de la mer ouverte par une étendue de glace large de quatre kilomètres. Si les locaux redoublent d’efforts pour entretenir les rares trous qui permettent à ces cétacés de s’oxygéner et les nourrisent également avec du poisson congelé, les conditions empirent avec l’arrivée de l’hiver.
Comprenant que les animaux ne pourront pas effectuer la traversée sans aide, ils contactent les autorités soviétiques, qui affrêtent le fleuron de leurs brise-glaces, doté de l’un des moteurs les plus puissants équipant alors ce type de navire.
À l’arrivée du Moskva, les conditions sont bien pires que prévu, ce qui pousse dans un premier temps son capitaine à annuler la mission de sauvetage. La détermination de son équipage le fait finalement changer d’avis, et le brise-glace entame son labeur, taillant lentement un corridor dans la glace arctique.
Quelques jours plus tard, l’embarcation atteint finalement le groupe de mammifères marins, mais épuisés et effrayés par le vacarme des hélicoptères (depuis lesquels est largué du poisson) et du navire, ceux-ci ne semblent pas enclins à le suivre.

Haut-parleur géant
Afin de les inciter à quitter leur prison de glace, le Moskva va être temporairement transformé en un haut-parleur géant. Si plusieurs genres musicaux sont diffusés, il apparaît rapidement que les bélugas sont particulièrement réceptifs aux airs classiques.
Intrigués, ils vont commencer à suivre le navire, qui les guide lentement vers la mer. « Notre tactique est la suivante : nous reculons, avançons, et attendons avant de répéter l’opération », expliquait à l’époque le capitaine Kovalenko. « Les bélugas commencent à saisir nos intentions et suivent le brise-glace. »
Avec un coût total estimé à environ 200 000 dollars (170 000 euros), l’insolite Opération Béluga permettra de sauver près de 2 000 cétacés.
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