La découverte d’une phase de la matière, longtemps restée hypothétique et insaisissable dans les limites de la théorie, a été concrétisée grâce à des recherches récentes. Cette phase, connue sous le nom de verre de Bragg, représente un état matériel où les atomes s’alignent dans un ordre presque parfait. Cette découverte, menée par Krishnanand Mallayya de l’université Cornell et rapportée dans Nature Physics, met en lumière une méthode innovante pour examiner les structures atomiques des matériaux peu communs.
La quête du verre de Bragg
La matière, dans son essence, peut exister sous diverses formes, reflétant l’arrangement de ses composants atomiques et moléculaires. Traditionnellement, ces formes sont classées en deux catégories principales : ordonnées et désordonnées. Les solides cristallins, avec leurs motifs géométriques tridimensionnels précis, incarnent la perfection de l’ordre, tandis que les liquides et certains solides amorphes, comme le verre, illustrent le désordre atomique. Entre ces deux extrêmes, les scientifiques ont théorisé l’existence d’une phase hybride, le verre de Bragg, un territoire jusqu’alors inexploré et mystérieux.
Le verre de Bragg, avec son arrangement quasi cristallin des atomes, défie les catégorisations traditionnelles, suggérant un ordre sous-jacent dans ce qui semble être un chaos. La recherche dirigée par Mallayya visait à dévoiler cette phase énigmatique en se concentrant sur les ondes de densité de charge (CDW), une caractéristique des matériaux bidimensionnels qui modifie périodiquement la densité des électrons. La distribution des électrons s’apparente à une « vague ».
Le CDW se comporte différemment dans chacune des trois phases. Le CDW est en corrélation avec la structure du matériau et se poursuit indéfiniment pour une phase ordonnée à longue portée. Dans le cas d’un état désordonné, il s’arrête à une distance finie. Dans le cas du verre de Bragg, la corrélation s’interrompt, mais elle le fait plus progressivement et sur une plus longue distance que dans l’état désordonné, et elle ne semble disparaître qu’à des distances infinies.
Méthodologie innovante et résultats
Selon le physicien Eun-Ah Kim de l’université Cornell, « la difficulté consiste à identifier ces différences à partir de données expérimentales qui représentent également des problèmes réels tels que le bruit et la résolution restreinte de la configuration expérimentale ». L’identification du verre de Bragg n’était pas une mince affaire. Les experts du SLAC et de Stanford avaient examiné en détail l’alliage de palladium, d’erbium et de tellure (PdxErTe3) des années auparavant et avaient conclu qu’il répondrait à leurs besoins.
L’étude de la structure atomique de cet alliage à l’aide de rayons X au laboratoire national d’Argonne a été cruciale pour mesurer la manière dont la lumière se diffracte à travers le matériau, une étape déterminante pour révéler l’existence du verre de Bragg. L’analyse des vastes données de diffraction des rayons X a été rendue possible grâce à un outil d’analyse de données innovant basé sur l’apprentissage automatique, le X-ray Temperature Clustering (X-TEC).
Cette méthode a permis d’examiner des milliers de pics de CDW, une prouesse jamais réalisée auparavant. Mallayya et ses collègues affirment avoir finalement identifié la phase de verre de Bragg et confirmé expérimentalement. Il s’agit là d’une avancée notable dans notre compréhension de cette étape énigmatique.
Implications et perspectives de la recherche
La confirmation de l’existence du verre de Bragg ouvre un nouveau chapitre dans l’étude de la physique des matériaux. Cette découverte bouleverse notre compréhension des états de la matière, en introduisant une phase qui transcende les limites traditionnelles entre l’ordre et le désordre. Elle met en lumière la complexité et la diversité des arrangements atomiques.
Leurs méthodes devraient être utiles pour les études futures, en plus de valider les modèles actuels ; l’outil X-TEC a été en mesure d’extraire des caractéristiques des données rapidement et avec précision, ce qui laisse présager de nombreuses nouvelles découvertes.
L’utilisation de l’apprentissage automatique et des connaissances en science des données dans cette recherche permet de répondre à des questions difficiles et de repérer des signatures subtiles grâce à une analyse complète des données. Les techniques et les outils développés dans cette étude promettent d’être inestimables pour les futures explorations, non seulement dans la physique de la matière condensée mais aussi dans d’autres domaines scientifiques.
Par Eric Rafidiarimanana, le
Source: Science Alert
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