Si les continents ont contribué à façonner la vie terrestre, les mécanismes responsables de leur émergence demeurent relativement obscurs. De récentes expériences en laboratoire ont remis en question une hypothèse majeure.
La cristallisation du grenat
On estime que les continents se trouvent le plus souvent au-dessus du niveau de la mer en raison des concentrations plus faibles en fer et de l’oxydation plus importante de la croûte continentale par rapport à la croûte océanique. Ce qui rend la première citée moins dense et lui permet de « flotter » sur le manteau terrestre. Cependant, les raisons d’une telle différence de composition restent assez mal comprises.
Des recherches publiées il y a cinq ans avaient proposé la cristallisation du grenat observée au niveau des volcans de l’arc continental (où la croûte océanique s’enfonce sous la croûte continentale) comme mécanisme crucial. Selon leurs auteurs, un tel processus éliminait d’un seul coup le fer non oxydé du magma de la croûte continentale, se révélant par conséquent plus pauvre en cet élément et plus riche en minéraux oxydés.
Si cett explication avait été jugée convaincante, certains scientifiques y voyaient des limites potentielles qu’il convenait de tester. « Des pressions élevées sont nécessaires pour que le magma soit stable, et on trouve ce magma pauvre en fer dans des endroits où la croûte n’est pas très épaisse et la pression par extension faible », souligne Elizabeth Cottrell.
Dans le cadre de travaux publiés dans la revue Science, la géologue américaine et ses collègues ont créé du grenat en laboratoire, en plaçant des roches fondues dans des cylindres spéciaux capables de simuler des pressions et températures correspondantes. L’examen des concentrations de fer non oxydé des pierres obtenues a montré que celles-ci étaient bien trop faibles pour expliquer la composition de la croûte continentale.
Une explication « extrêmement improbable »
« Ces résultats font du modèle de cristallisation des grenats une explication extrêmement improbable de l’oxydation et de l’appauvrissement en fer des magmas des volcans d’arc continentaux », souligne Cottrell. « Il est plus probable que les conditions dans le manteau terrestre situé sous la croûte continentale soient à l’origine de ces phénomènes. »
Pour l’équipe, la prochaine étape consistera notamment à déterminer si l’oxydation du soufre pourrait entraîner celle du fer, et donc expliquer les différences de composition entre les croûtes continentale et océanique.