Une équipe internationale de scientifiques a récemment procédé à l’analyse génétique d’échantillons de sédiments datant de l’ère glaciaire, révélant un écosystème arctique perdu étonnamment complexe.
Monde arctique perdu
La durée maximale de conservation de l’ADN est depuis longtemps débattue. On pense généralement qu’il se dégrade en l’espace de quelques milliers d’années, mais dans des conditions idéales (très froides et sèches), la limite supérieure théorique a été fixée à environ 1 million d’années, ce que la découverte d’un échantillon d’ADN de mammouth l’année dernière a permis de confirmer.
Dans le cadre de travaux publiés dans la revue Nature, des chercheurs ont étudié un échantillon de sédiments prélevé au Groenland renfermant de l’ADN environnemental vieux d’environ 2 millions d’années, ce qui constitue un record. Comprenant du matériel génétique provenant de nombreux animaux, plantes et organismes microbiens et fongiques, celui-ci leur a offert un aperçu unique d’un riche écosystème préhistorique.
Mesurant près de 100 m d’épaisseur, le dépôt de sédiments s’était accumulé pendant 20 000 ans à l’intérieur de l’embouchure d’un fjord arctique, avant d’être recouvert par le permafrost, ayant assuré la conservation d’une quarantaine d’échantillons d’ADN distincts et exploitables jusqu’à nos jours. Leur comparaison à ceux d’organismes modernes a permis la mise en évidence de signatures génétiques de rennes, lièvres, lemmings, rongeurs et oies préhistoriques, ainsi que d’animaux marins comme les limules.
De façon plus surprenante, du matériel génétique provenant de mastodontes, parents des mammouths que l’on pensait jusqu’à présent avoir vécu exclusivement en Amérique du Nord et centrale, a également pu être identifié. L’examen de fragments d’ADN végétal a de son côté indiqué que ces imposantes créatures arpentaient des environnements herbeux luxuriants, riches en bouleaux, peupliers, thuyas et arbustes.
Des implications majeures
Selon l’équipe, de tels travaux suggèrent que de l’ADN extrêmement ancien pourrait être préservé dans d’autres régions du monde, et potentiellement éclairer l’histoire lointaine de notre planète.
« Un nouveau chapitre couvrant un million d’années supplémentaires d’histoire a enfin été ouvert et, pour la première fois, nous avons pu étudier directement l’ADN d’un lointain écosystème préhistorique », résume Eske Willerslev, co-auteur principal de l’étude. « L’ADN peut se dégrader rapidement, mais nous avons montré que, dans des conditions optimales, celui-ci peut persister et nous permettre de remonter plus loin dans le temps que quiconque aurait osé l’imaginer. »
Par Yann Contegat, le
Source: New Atlas
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