Le gouvernement japonais vient de donner le feu vert pour une expérience controversée à une équipe de chercheurs. Ils peuvent développer un embryon de rongeur possédant un pancréas humain. Le pays peut créer des chimères destinées à aider des patients humains en attente de greffe.
LA FICTION EN PASSE DE DEVENIR RÉALITÉ ?
Connaissez-vous les Kemonomimi et les Kemono ? Icônes de la culture otaku, ces deux termes japonais désignent deux personnages hybrides très répandus dans les œuvres de fiction. Le premier est un personnage humain possédant des caractéristiques physiques animales comme des oreilles, des moustaches ou une queue. Tandis que le second est un animal humanisé (il peut se tenir debout, parler…).
Si les deux étaient surtout présents dans les mangas, animes ou jeux vidéo, le gouvernement japonais pourrait bien les changer en réalité. Il a en tout cas donné son accord pour lancer une expérience visant à créer des embryons d’animaux possédant des cellules humaines.
COMMENT VA SE PASSER CETTE EXPÉRIENCE ?
Dans un premier temps, une équipe de chercheurs dirigée par Hiromitsu Nakauchi va concevoir des embryons incomplets de rongeurs. En effet, ces embryons ne seront pas capables de développer de pancréas. Cette mission sera confiée à des cellules humaines implantées dans l’embryon du rongeur. Puis ce dernier sera transplanté dans un rongeur adulte (rat ou souris) afin de donner naissance à une chimère.
Cependant, cette hybridation des embryons n’est pas inédite. Des expérimentations de ce genre mêlant cellules humaines et animales avaient déjà été tentées en 2017 et 2018. La première fois, les chercheurs avaient réussi à créer un embryon mi-humain mi-cochon.
Puis d’autres chercheurs avaient croisé des embryons de moutons avec des cellules humaines. Mais à cause d’une absence d’autorisation, le développement de ces embryons avait été stoppé au bout de 28 jours. La nouvelle expérimentation se fera d’ailleurs étape par étape, d’une culture à court terme à une éventuelle naissance.
POURQUOI CRÉER DES CHIMÈRES MI-HUMAINES MI-ANIMALES ?
Le but final de cette expérience est de créer un embryon qui doit arriver à terme. Les chimères deviendraient donc bien réelles mais le but n’est pas de créer des humains hybrides pour le plaisir. Ces êtres serviraient en réalité de réserves d’organes humains transplantables en cas de maladie. A l’heure où obtenir une greffe de certains organes peut parfois prendre des années, cette alternative permettrait de traiter plus rapidement certains patients.
Néanmoins, cette expérience pose quelques problèmes d’un point de vue éthique. Quelques interrogations restent en suspens. Entre autres, les chercheurs ignorent encore ce qu’il se passerait si des cellules humaines pénétraient dans le cerveau d’un animal. D’autres se demandent s’il est juste de prélever les organes d’un animal vivant pour sauver un être humain. Enfin, on ignore encore si ces organes seraient parfaitement acceptés par le corps humain ou si cela augmente les risques de rejet.
Face à ces questions, l’éthicienne Carolyn Neuhaus rappelle aux spécialistes qu’il est important de prendre du recul et de discuter de ces aspects lors de l’expérimentation. Quant à la question de l’utilisation des organes par l’Homme, « Je ne pense pas qu’elles seraient pires moralement par rapport à la façon dont nous élevons les porcs pour la viande, mais mon intuition est que la façon d’élever les porcs pour prélever des organes exigerait un changement dans la façon dont les porcs sont élevés ».
Par Justine Manchuelle, le
Source: Gizmodo
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