En Bolivie, le trafic de dents de jaguar est plus que jamais d’actualité. En cause, la demande sur le marché chinois pour des remèdes de médecine traditionnelle et pour la fabrication de bijoux.
LE JAGUAR SUR LISTE ROUGE
Placé sur la liste rouge de l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN), le jaguar court un réel danger en Bolivie. Les autorités locales ont commencé à être informées de l’existence d’un trafic des canines du félin en 2014 dans le département de Beni dans le Nord-Est rapporte Rodrigo Herrera, chargé des questions de biodiversité au sein du ministère de l’Environnement.
Le flux d’immigration chinoise dans ce pays d’Amérique latine, dû à l’attribution massive de chantiers publics à des grands groupes chinois par le gouvernement d’Evo Morales, serait en cause pour les experts.
L’institut national des statistiques bolivien estime qu’en 2011, 2 624 chinois vivaient dans le pays contre 12 816 en 2016, un chiffre qui a fait grimper la demande et donc la chasse au jaguar. Certains chinois attribuent aux dents de jaguar des vertus aphrodisiaques et elles constituent également des bijoux pour montrer son statut social.
Selon Herrera, une canine de jaguar qui mesure entre 8 et 10 cm peut se monnayer entre 60 et 80 euros sur le marché bolivien mais peut atteindre jusqu’à 4 000 euros en Chine. Les crânes des jaguars sont également prisés et peuvent atteindre jusqu’à 8 000 euros, des sommes qui sont très bénéfiques aux trafiquants pauvres, souvent des paysans. Dans un pays où 38,6 % de la population vivait sous le seuil de pauvreté en 2015, un tel trafic est une aubaine.
UNE MENACE SUPPLÉMENTAIRE POUR LE JAGUAR
La police bolivienne a intercepté jusqu’à présent 400 canines dans des courriers en direction de la Chine mais le chiffre des dents ayant déjà quitté le pays devrait être bien plus élevé selon Fabiola Suarez, spécialiste du département de biodiversité du ministère de l’Environnement. La justice a ordonné 15 procédures légales pour le moment, dont 11 à l’encontre de citoyens chinois, et le 19 mars, un trafiquant qui vendait des canines et des crânes de jaguar sur les réseaux sociaux a été interpellé et arrêté par la police. La situation est telle que l’ambassade chinoise a appelé les ressortissants chinois en Bolivie à respecter les lois bolivienne et chinoises concernant le trafic illégal d’espèces sauvages.
Ce nouveau trafic crée une menace de plus pour le jaguar qui souffre déjà de la déforestation de son habitat naturel et de la chasse par les éleveurs locaux qui les tuent pour protéger leur bétail.
Si le cas du jaguar est alarmant, il n’est malheureusement pas le seul à souffrir de la croyance des hommes en la médecine traditionnelle, les branchies de raies manta, les embryons des macaques ou encore les griffes des paresseux entrent également dans la fabrication de prétendus médicaments sur les marchés asiatiques et africains.
Par Léa Philippe, le
Source: Sciences et Avenir
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