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Vous n’y avez peut-être pas pensé, mais faire des bébés sur Mars n’est pas aussi simple que sur Terre

Avez-vous déjà pensé à ce que cela donnerait de faire des bébés sur Mars ? Ce qui était encore de la pure science-fiction il y a quelques années devient désormais une véritable interrogation scientifique. Les recherches dévoilent d’ailleurs qu’un tel projet serait aussi compliqué que la colonisation de Mars en elle-même. SooCurious vous explique pourquoi avoir un bébé sur Mars sera bien plus compliqué que sur Terre.

 

Nous ne sommes pas encore allés sur Mars que certains pensent déjà à y faire des bébés ! C’est en tout cas ce que dénote la déclaration enthousiaste de Maggie Lieu, l’une des 100 personnes sélectionnées pour Mars One, un projet privé prévoyant d’envoyer des gens pour un aller simple vers Mars dans un futur proche (projet considéré d’ailleurs comme ayant peu de chance d’aboutir avec un calendrier pareil et une configuration aussi minimaliste). La jeune astrophysicienne anglaise a en effet déclaré au journal britannique The Independent qu’il serait « très excitant » de « donner naissance au premier Martien ! ».

 

Mars et ses deux petites lunes, Déimos et Phobos, depuis l’espace (vue d’artiste) via Shutterstock

 

Une telle déclaration sensationnaliste a de quoi surprendre quand on sait déjà à quel point la vie sur Mars sera difficile pour d’éventuels colons adultes. Mars n’a pas de champ magnétique et son atmosphère est cent fois moins épaisse que la nôtre (en plus d’être irrespirable), ce qui signifie que les radiations atteignent la surface de la planète rouge sans contraintes, et que pour éviter d’attraper un cancer en moins de trois mois les colons devront creuser leurs bases profondément sous la surface de la planète.

Pourtant, leur survie ne sera pas encore assurée dans cet environnement confiné, car ils devront être capables de produire leur propre nourriture et leur propre oxygène (sans compter le fait que l’extraction de l’eau martienne ne sera pas particulièrement simple), et les technologies permettant de le faire efficacement ne sont pas encore pleinement au point. Enfin la gravité martienne étant environ 3 fois inférieure à celle de la Terre, les muscles des colons vont inévitablement s’atrophier et leurs os perdre en calcium, ce qui les rendra particulièrement fragiles pour un éventuel voyage de retour.

Alors, en admettant qu’un enfant soit conçu sur Mars, que lui arriverait-il ? « Des recherches ont été menées sur les effets de la micro-gravité sur le développement du foetus, et les nouvelles ne sont pas réjouissantes », assène Sheryl Bishop, psychologue appartenant à la branche médicale de l’université du Texas. Sachant les effets d’une gravité réduite sur des humains adultes, il est hautement improbable qu’une grossesse puisse être menée sans risque, sans même parler du développement de l’enfant une fois celui-ci venu au monde.

 

La surface de Mars est un environnement hostile (vue d’artiste) via Shutterstock

 

Cependant, au-delà des inconnues au niveau biologique et physiologique, de nombreuses implications éthiques, juridiques, sociales et psychologiques sont à prendre en compte. Du simple point de vue éthique, face au manque de données concluantes en la matière, concevoir un enfant serait « irresponsable » pour Bishop. Malgré ce constat, la spécialiste admet que, à terme, les colons martiens pourraient être amenés à procréer dans le cadre d’une installation définitive (le voyage de six mois minimum entre la Terre et Mars étant l’un des principaux arguments en ce sens).

Alors, comment devrait-on s’y prendre pour qu’une colonie puisse avoir des enfants sur Mars ? Sheryl Bishop est sans appel : selon elle, tous les astronautes devront être préalablement stérilisés, afin d’être sûr une bonne fois pour toutes de ne pas se retrouver dans le cas d’une grossesse non désirée. Bien sûr, afin de préserver les droits reproductifs de ces gens, une banque génétique comprenant leurs ovules et leurs spermatozoïdes sera préalablement créée. Ce qui devrait permettre à terme d’ailleurs d’autoriser des fécondations in-vitro et des inséminations artificielles une fois la colonie établie et les risques d’une grossesse connus.

 

L’environnement martien sera très déstabilisant pour les astronautes via Shutterstock

 

D’ailleurs la colonie devra disposer de tout le matériel médical dédié à l’éventuel suivi d’une grossesse. Une solution idéale consisterait d’ailleurs à utiliser un utérus artificiel qui pourrait non seulement isoler l’embryon d’un environnement potentiellement radioactif, mais également reproduire en son sein une gravité similaire à celle que connaissent les enfants portés sur Terre. Cependant cette solution est bien loin d’être au point puisqu’il n’existe pas d’utérus artificiel fonctionnel même pour des animaux à l’heure actuelle, alors de là à en produire un pour humain qui soit capable de simuler la gravité terrestre…

 

Un foetus en développement via Shutterstock

 

Toutes ces considérations se passent à un niveau individuel, mais pour Sheryl Bishop la déclaration de Maggie Lieu est d’autant plus irresponsable et arrogante que l’arrivée d’un enfant dans le cadre d’une mission martienne ne peut pas être motivée seulement par un désir égoïste, car la décision devra être collective. En effet, il s’agira d’un groupe réduit qui sera envoyé sur la planète rouge, et les membres de ce groupe seront peut-être déjà suffisamment occupés à assurer leur propre survie pour avoir la responsabilité d’assurer celle d’un enfant.

D’ailleurs, si la raison d’avoir un ou des enfants sur Mars est d’assurer la pérennité d’une population permanente, alors il serait judicieux de sélectionner attentivement les parents selon leurs génomes. Le but sera à la fois de favoriser la diversité génétique et la résistance des enfants et « votre âme soeur ne sera peut-être pas la personne idéale pour cela », ironise Sheryl Bishop.

 

Les habitations martiennes seront des sous-terrains via Shutterstock

 

En admettant que toutes ces difficultés soient surmontées, à quoi ressemblerait la vie de ces enfants martiens ? Ils vivraient dans un environnement extrêmement confiné, dans des conditions qui modifieraient leur croissance de manière imprévisible et irréversible. D’ailleurs si ces enfants devaient retourner sur Terre, il est évident que le fait qu’ils se retrouvent subitement exposés à une gravité trois fois plus élevée que celle à laquelle ils étaient jusque-là habitués serait, au mieux, particulièrement inconfortable, sans compter le choc psychologique de se retrouver pour la première fois dans un environnement ouvert.

Enfin, d’un point de vue légal et juridique, quel serait le statut de ces enfants ? Frans von der Dunk, un professeur de droit spatial à l’université du Nebraska à Lincoln, pense que même si l’on parle d’une colonie martienne, si cette dernière n’a pas déclaré son indépendance, alors les astronautes garderont leur nationalité d’origine. Ce qui signifie que les enfants naissant sur Mars garderaient la nationalité de leurs parents ou des personnes qui les élèvent. Dans le cas inverse, si la colonie s’est constituée en un État indépendant, alors ces enfants seraient de véritables citoyens martiens.

 

Il se pourrait que les enfants nés sur Mars ne puissent jamais venir sur Terre via Shutterstock

 

Toutes ces considérations sont passionnantes mais prouvent encore une fois que malgré l’enthousiasme que soulève une colonisation martienne, de nombreuses difficultés subsistent. À la rédaction, on pense bien évidemment que le fait d’avoir un enfant doit être une décision mûrement réfléchie, surtout dans le cadre d’une mission spatiale ! Cependant, on aime bien l’idée que les premiers véritables Martiens soient finalement des êtres humains. Et vous, seriez-vous prêt à élever un enfant sur Mars ?

Par Romain Berthommier, le

Source: Forbes

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