Se tenir droit, pour les humains comme pour les plantes, ce n’est pas forcément évident. En effet, des mécanismes essentiels pour les organismes sont obligatoires pour contrer l’effet de la gravité. Les scientifiques ont longtemps pensé que les arbres se tenaient à la verticale grâce aux fonctions internes qui régissent dans le bois de l’arbre. Mais une équipe de chercheurs a découvert l’année dernière que l’écorce était en fait également impliquée dans ce processus de motricité.
Comment les arbres tiennent debout ?
Pour que les arbres puissent assurer leur croissance, et pousser, ils ont besoin d’un système dit “squelettique”, assuré par la rigidité et la résistance du tronc, mais ils ont également besoin d’un système moteur, qui permet de contrôler leur posture grâce à des forces et ainsi lutter contre la gravité. Les scientifiques ont ainsi déjà démontré le fonctionnement du système squelettique des arbres, mais la fonction motrice, à savoir en tant que muscle de l’arbre, a souvent été ignorée dans les études, considérée comme étant une des fonctions du bois puisque c’est le seul tissu de l’arbre qui a des fonctions mécaniques actives.
Des chercheurs du laboratoire Ecofog (CNRS/AgroParisTech/Cirad/Inra/Université de Guyane/Université des Antilles) et du laboratoire LMGC (CNRS/Université de Montpellier) se sont donc intéressés au rôle de l’écorce, dans cette étude datant de 2018.
Mais pour comprendre son implication, il faut d’abord s’intéresser au rôle du bois. Bruno Clair, un chercheur de l’étude explique : « L’arbre continue de fabriquer du nouveau bois tout autour du tronc, sous l’écorce, mais en modulant son épaisseur et sa tension : du côté opposé au déséquilibre, l’épaisseur du bois formé sera plus importante et surtout il sera plus en tension. » Ainsi, pendant la croissance d’un arbre, du bois se forme en continu, par couches superposées autour du tronc. Mais si une branche, plus lourde, venait à pousser d’un côté par exemple, l’arbre serait alors déséquilibré. Pour compenser ce poids, l’arbre doit alors continuer à s’accroître, au risque de tomber.
Une expérience concluante et inspirante
L’équipe de Bruno a cultivé des arbres tropicaux inclinés à 45 degrés, à l’aide d’un tuteur. Lorsque le tuteur est supprimé, au bout de quelques mois, la tige se redressait. Dans la tige de ces jeunes arbres, des forces ont ainsi agi et ont entraîné la courbure. Mais dans certaines espèces d’arbres, lorsqu’on enlevait l’écorce, ce redressement ne se déroulait pas ! Ceci montre donc que les forces du redressement sont bien situées au niveau de l’écorce.
En fait, c’est plus précisément la structure interne de l’écorce qui permet ce redressement. En effet, comme l’explique Bruno dans Libération : “Nous avons compris le mécanisme en nous intéressant à l’organisation particulière des fibres dans l’écorce de ces espèces. Ces fibres sont organisées en treillis, comme les treillis pour faire grimper les plantes de jardin. Quand l’arbre croît, que sa tige ou son tronc s’épaissit, son périmètre s’accroît et cela met en tension les fibres. Quand l’arbre a besoin de se redresser, il fabrique plus de bois sur la face supérieure de la tige inclinée, cela génère une traction sur la face supérieure qui tire comme un hauban et redresse l’arbre.”
Ainsi, ce sont les fibres organisées en treillis, avec leur structure en losange située au niveau de l’écorce qui vont s’étirer latéralement, puisque à cause du déséquilibre, une grande quantité de bois est créée, ce qui va engendrer des forces de tractions verticales, pour la bonne posture du tronc. C’est ainsi d’abord cette asymétrie qui va permettre à la tige de se courber vers le haut, et sur cinq des neuf espèces étudiées, la génération de ces forces permet à l’arbre de lutter efficacement contre la gravité.
La nature a ainsi mis en place un mécanisme efficace pour résoudre un problème d’ingénierie. Cette organisation idéale des tissus des arbres permet ainsi à ceux-ci de pousser verticalement, et peut servir pour des usages biomémiques, comme l’explique le chercheur, et être ainsi une source d’inspiration.
Par Frida Hussain, le
Source: Pour la science
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