Nos mains envoient à notre cerveau une quantité d’informations sur notre environnement. Elles transmettent la douleur, la température, la pression, ainsi que la texture et la solidité des objets. Autant de capacités qu’on a tendance à oublier tant elles paraissent aller de soi. Pourtant, cette aptitude manque cruellement aux personnes amputées. C’est de là toute l’importance de l’innovation du doigt bionique, capable de redonner le sens du toucher. SooCurious vous en dit plus.
En collaboration avec Dennis Aabo Sørensenrensen, un quinquagénaire privé de sa main gauche, l’équipe de l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) travaille depuis des années sur le développement d’une main bionique. Bien décidé à retrouver la sensation de toucher, Dennis s’est porté volontaire pour servir de cobaye lors de leurs expériences.
Il a déjà expérimenté une prothèse en 2014, qui était reliée aux nerfs périphériques de son moignon par des électrodes. Cette prothèse lui a permis de ressentir le contact avec des objets, d’identifier leurs formes, leur consistance, et de maîtriser la force de sa prise. Le système est le suivant : les capteurs recueillent les informations, et les convertissent en signaux grâce à une interface neuronale. Une interface neuronale est un dispositif qui connecte le cerveau à un système électronique. Dans ce cas précis, l’interface connecte des capteurs placés sur la prothèse à des électrodes reliées aux nerfs de l’avant-bras.
En 2016, les chercheurs ont davantage développé le projet. Ils ont mis au point un doigt bionique qui permet de distinguer les différentes textures avec une précision inouïe. Les chercheurs l’ont fait essayer à Dennis, et les résultats ont été plus que concluants : il a réussi à distinguer les surfaces lisses et rugueuses avec une précision évaluée à 96 %.
Ce doigt artificiel est connecté à une interface neuronale, qui fait donc le lien entre le cerveau et un ordinateur. Cette interface est elle-même reliée aux nerfs périphériques du moignon, grâce à des électrodes. A chaque mouvement, les minuscules capteurs électromécaniques du doigt envoient un signal électrique que les ordinateurs convertissent en impulsion électrique, et qui sont donc interprétés par le système nerveux.
« Quand les chercheurs ont stimulé mes nerfs, j’ai pu sentir les vibrations et le sens du toucher dans mon index fantôme », déclare Dennis Aabo Sørensenrensen dans la vidéo explicative de la recherche. « La sensation du toucher est très proche de ce que vous sentez avec un doigt normal. Vous pouvez sentir la rugosité des plaques et l’alternance des creux et des bosses. »
Les chercheurs ont aussi testé ce système sur des personnes valides qui avaient leurs deux mains, grâce à un système d’électrodes. Des aiguilles microneurographiques ont été implantées sur le nerf médian du bras (celui de la flexion du pouce, de l’index et du majeur) à travers la peau. 77 % du temps, les sujets étaient capables de distinguer la rugosité d’une texture, expliquent les chercheurs dans le communiqué publié sur eLife.
Les scientifiques ont comparé le cerveau des personnes non amputées qui utilisaient leurs doigts à celui de celles qui utilisaient un doigt bionique au moment où elles essayaient de sentir une texture. Des similitudes ont été trouvées au niveau des zones du cerveau qui ont été activées.
Dans la vidéo que l’équipe a également partagée, le docteur Calogero Oddo explique : « Il est possible de procurer le même genre de sensation chez des sujets valides. C’est extrêmement important car nous savons que ce que nous testons sur des sujets valides peut être utilisé plus tard, en cas de succès, sur des personnes amputées. Cela signifie que nous pouvons accélérer le transfert de différentes approches. »
Le fait que des valides aient pu ressentir ces sensations grâce à des électrodes signifie que le système nerveux peut être stimulé en utilisant uniquement la surface de la peau. Autrement dit, la chirurgie n’est pas obligatoire.
Cette avancée permettra d’accélérer les recherches sur les prothèses, ainsi que sur la robotique et le développement. Pour autant, si les capteurs de cette prothèse sont énormément plus précis qu’avant, l’interface neuronale développée n’est pas assez petite pour être incorporée dans un membre artificiel.
A mesure que notre société évolue, la science et la technologie devancent les lois naturelles, et permettent parfois aux malades et invalides de retrouver goût à la vie. Néanmoins, pour ce qui concerne le doigt bionique, la prothèse ne pourra pas être utilisable avant plusieurs années. Dans la catégorie membre bionique, vous pouvez découvrir ce bras bionique capable de reproduire chacun de vos gestes une fois connecté à votre smartphone.
Par Pauline Collette, le
Source: Futura Sciences
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