Le « Point Nemo » symbolise le point de l’océan le plus éloigné de toute terre émergée. C’est dans cette zone située à des milliers de kilomètres des côtes néo-zélandaises que les objets spatiaux viennent finir leur vie, ce qui lui vaut le surnom de « cimetière des engins spatiaux ».

LE « PÔLE MARITIME D’INACCESSIBILITÉ »

Dans cette zone située au beau milieu de l’Océan Pacifique Sud, les restes des stations spatiales, véhicules de ravitaillement, cargos et autres lanceurs de fusée jonchent le fond de l’océan, à près de quatre kilomètres de profondeur.

Ce « cimetière des engins spatiaux » est distant de plusieurs milliers de kilomètres (à exactement 2 688 km du continent Antarctique) de la terre la plus proche et le trafic maritime y est quasi-inexistant, ce qui fait de lui l’endroit idéal pour accueillir ce type de débris.

Le pôle maritime d’inaccessibilité (marqueur rouge) est situé à des milliers de kilomètres de l’Australie (à gauche) et de la Nouvelle-Zélande (au centre)

Le Point Nemo doit son nom au capitaine Nemo, incontournable commandant du Nautilus dans le roman Vingt mille lieues sous les mers de Jules Verne. Il se trouve très exactement à 48 ° 25,6′ de latitude sud et 123 ° 23,6′ de longitude ouest.

L’écrivain H.P Lovecraft situe également la cité engloutie de R’lyeh, demeure du Grand Ancien Cthulhu, à proximité du Point Nemo, dans la zone qui délimite le cimetière des engins spatiaux.

La navette spatiale Atlantis amarrée à la station Mir lors de la mission mission STS-71

Ce cimetière marin s’étendant sur 1 500 kilomètres carrés est la dernière demeure de près de 260 satellites, parmi lesquels on retrouve l’incontournable station spatiale Mir, venue s’abîmer en mer au mois de mars 2001. Il accueille également environ 140 véhicules de ravitaillement russes, ainsi que plusieurs cargos japonais et européens et un lanceur de fusée SpaceX.

Bien évidemment, ceux-ci ne reposent pas en un seul morceau au fond de l’océan. La chaleur générée par la rentrée à haute vitesse dans l’atmosphère de ces objets et engins spatiaux s’avère en effet assez intense pour désintégrer en grande partie le métal qui les compose.

C’est d’ailleurs pour cette raison que les véhicules spatiaux habités, comme une navette spatiale ou une capsule Soyouz, disposent d’un blindage thermique, qui permet de protéger l’appareil et ses occupants lors de leur retour sur Terre.

Comme tous les véhicules spatiaux habités, le vaisseau Soyouz TMA-7 dispose d’un blindage thermique

À l’inverse, les engins spatiaux autonomes comme les véhicules de ravitaillement Progress ou ATV ne sont pas conçus pour résister à de telles conditions, et la rentrée dans l’atmosphère leur est fatale.

Le 29 septembre 2009, le vaisseau cargo Jules Verne, développé par l’Agence spatiale européenne pour ravitailler l’ISS, s’est désintégré à environ 75 kilomètres au dessus du cimetière des engins spatiaux.

Il a fallu moins de 12 minutes avant que les débris de l’ATV Jules Verne ne viennent éclabousser le Pacifique. Une scène impressionnante capturée par deux avions, un DC-8 et un jet Gulfstream affrétés spécialement par la NASA pour l’occasion, que vous pouvez revoir ci-dessous.

Mir est sans conteste la plus illustre occupante de ce cimetière marin unique en son genre. La station spatiale russe, qui pesait 143 tonnes lors de sa rentrée dans l’atmosphère, s’est presque entièrement désintégrée 85 kilomètres au dessus du Pacifique. En fin de compte, on estime que seules 20 à 25 tonnes de ses débris ont effectivement atteint l’océan.

Ces vestiges spatiaux sont dispersés sur une très grande surface, car comme l’explique Holger Krag, chef du Bureau des Débris Spatiaux de l’Agence Spatiale Européenne : « même dans le cas de rentrées dans l’atmosphère contrôlées, il est impossible de déterminer un point de chute précis ».

LORS D’UNE RENTRÉE ATMOSPHÉRIQUE CONTRÔLÉE, IL EST IMPOSSIBLE DE DÉTERMINER UN POINT DE CHUTE PRÉCIS POUR LES DÉBRIS

Krag ajoute : « la nature de ce processus de désintégration nous oblige à dégager une surface assez grande afin de nous assurer que l’ensemble des débris tombent dans la zone désignée ».

Le vaisseau cargo Jules Verne se désintègre lors de sa rentrée dans l’atmosphère le 29 septembre 2009

Quelques jours avant la désorbitation d’un engin spatial, l’agence spatiale qui en a la charge avise les autorités aéronautiques et maritimes du Chili et de la Nouvelle-Zélande, qui supervisent le trafic dans cette partie éloignée du Pacifique. L’agence spatiale leur fournit de nombreuses données, comme le temps de rentrée prévu et la zone dans laquelle les débris risquent de tomber, afin que les deux nations puissent agir en conséquence.

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