Une étude bouleverse notre vision du baiser. Ce comportement, souvent vu comme typiquement humain, remonterait à plus de 20 millions d’années. Et il aurait été partagé avec les Néandertaliens.

Des ancêtres primates à l’Homo sapiens : une histoire d’intimité millénaire
Le baiser, ce geste aussi naturel que mystérieux, ne serait pas une simple invention culturelle. C’est ce que suggère une nouvelle étude publiée dans Evolution and Human Behavior par des chercheurs d’Oxford et du Florida Institute of Technology. En croisant biologie évolutive et éthologie, ils remontent à un comportement bien plus ancien que prévu.
Selon eux, ce contact bouche-à-bouche aurait émergé chez un ancêtre commun des grands singes, il y a entre 21,5 et 16,9 millions d’années. Cette pratique aurait traversé les âges et les espèces, jusqu’à être partagée par les Néandertaliens. Une hypothèse qui bouleverse notre lecture des liens sociaux entre espèces humaines.
Une approche scientifique rigoureuse, bien au-delà du romantisme
Pour appuyer leur thèse, les chercheurs ont combiné analyses phylogénétiques, modélisations statistiques et observations comportementales. YouTube, par exemple, a fourni des preuves de baisers sociaux chez des bonobos ou orangs-outans. Ces comportements apparaissent dans des contextes de jeu, de réconciliation ou de renforcement des liens sociaux.
En adoptant une définition stricte du baiser, contact bouche-à-bouche non agressif sans transfert de nourriture, l’étude le considère comme un trait évolutif hérité. Et donc, potentiellement présent chez nos ancêtres disparus. Un comportement qui, comme d’autres, ne laisse pas de traces fossiles mais façonne profondément les structures sociales.
Les Néandertaliens aussi s’embrassaient, et voici pourquoi
Mais qu’en est-il de nos cousins disparus ? En croisant données génétiques, microbiologiques et comportementales, les auteurs concluent qu’il est très probable que les Néandertaliens embrassaient aussi. Et pas juste pour la reproduction.
En effet, on retrouve dans les tartres dentaires fossilisés des micro-organismes buccaux communs aux Néandertaliens et à l’Homo sapiens. Or, ces bactéries se transmettent principalement par contact salivaire donc, par baiser. Pour la Dr Matilda Brindle, « la conclusion la plus parcimonieuse reste : ils s’embrassaient probablement ».
Une redéfinition du baiser pour dépasser notre vision humaine
Définir ce qu’est un baiser, au-delà de la culture humaine, était essentiel. Les chercheurs ont donc exclu les gestes alimentaires ou les baisers agressifs comme les « kiss-fights » observés chez certains poissons. Ils se sont concentrés sur le contexte émotionnel : apaisement après un conflit, rapprochement social, etc.
Cette nouvelle définition ouvre la voie à une exploration du baiser chez d’autres mammifères sociaux. Et surtout, elle offre une grille de lecture plus universelle pour étudier des comportements trop souvent ignorés car jugés trop humains. Le baiser devient alors un indicateur de lien social, observable, analysable, et profondément enraciné dans notre évolution.
Par Eric Rafidiarimanana, le