Plus de deux ans après la fin de la mission Cassini, Saturne et ses lunes dévoilent encore leurs secrets. Avec les données compilées lors de plus de 120 survols de la planète et de Titan, le laboratoire JPL — Jet Propulsion Laboratory — de la NASA peut pour la première fois offrir une carte complète et détaillée de la surface du plus grand satellite de la planète à l’anneau.
Pour la première fois, une carte de Titan montrant sa diversité unique
La carte a été présentée dans la revue Nature’s Astronomy le 18 novembre. Titan, d’un diamètre de 5151 km (celui de la Terre fait 12 742 kilomètres), a selon les chercheurs, une des surfaces « les plus diverses d’un point de vue géologique du Système solaire ».
Rosaly Lopes, scientifique au JPL ayant contribué à produire la carte ci-dessus, explique que « Titan a une atmosphère comme la Terre. Il y a du vent, il y a de la pluie, il y a des montagnes. C’est un monde vraiment très intéressant, et un des meilleurs lieux pour chercher la vie dans le Système solaire. »
Il est difficile de voir à travers l’atmosphère de Titan, ce qui fait de cette cartographie une étape si importante. Le communiqué de la NASA explique que l’équipe a utilisé les données radar acquises par Cassini pour pénétrer l’atmosphère opaque de Titan, due à sa teneur en azote et en méthane. Les chercheurs ont pu aussi exploiter des données visibles et infrarouges, que les instruments ont pu capter à travers le voile de méthane.
“La plus grande découverte de Cassini est que Titan est si diverse, commente Ralph Lorenz, un scientifique du Johns Hopkins University Applied Physics Laboratory à Laurel, dans le Maryland. C’est presque comme un monde complètement différent, et cette cartographie systématique rassemble toute cette diversité. »
Un nouveau monde à explorer ?
Les plaines couvrent deux tiers de la surface de Titan, des dunes (semblables à des dunes de sable) en représentent 17 %. 14 % de la surface représente des hummocks (une surface plane bosselée), et 1,5 % est fait de « labyrinthes », c’est-à-dire des vallées taillées par les pluies et l’érosion. La rareté des impacts de cratères indique que cette lune est relativement jeune.
Les lacs représentent 1,5 % de la surface lunaire — ils ne sont pas composés d’eau mais de méthane, qui peut rester liquide dans les températures extrêmement basses de cette lune, autour de -180° à sa surface. Les précipitations sont tout autant caractéristiques :
« La mission Cassini a révélé que Titan était un monde géologiquement actif, où des hydrocarbures comme le méthane et l’éthane tiennent le rôle que l’eau a sur Terre, explique David Williams, chercheur et professeur associé de la School of Earth and Space Exploration de l’Arizona State University. Ces hydrocarbures pleuvent sur la surface, s’écoulent dans des torrents et des rivières, s’accumulent dans des lacs et des mers, et s’évaporent dans l’atmosphère. C’est un monde assez stupéfiant ! »
L’étude du satellite ne fait que commencer
L’étude de Titan permettra notamment une compréhension plus approfondie de notre planète, de laquelle le satellite n’est pas si différent. Lopes explique : « En dépit des différences de matières, de températures et de champs gravitationnels entre la Terre et Titan, de nombreuses caractéristiques sont similaires entre les deux mondes et peuvent être interprétés comme étant les produits d’un même processus géologique. La carte montre que les différents terrains géologiques ont une claire répartition selon la latitude, globalement, et que certains terrains couvrent bien plus de surface que d’autres. »
Les chercheurs, à ce jour, s’intéressent particulièrement à la relation entre les pôles d’une planète ou d’une lune de cette échelle, sa composition géologique et son activité climatique. De même, une autre priorité est la recherche de la vie en ce monde : c’est pour cette raison que Cassini ne fut pas écrasée sur Titan afin d’éviter toute contamination éventuelle, mais a été orientée pour être brûlée dans l’atmosphère de Saturne. La NASA prévoit d’y envoyer un drone à l’horizon 2034, pour la mission Dragonfly : en attendant, ce nouveau relevé complet devrait rester une référence pour l’étude scientifique de ce milieu.
Pour en savoir plus sur la sonde Cassini, en activité entre 2004 et 2017, la NASA explique ici la mission en détail et en images, depuis le décollage de la Terre en 1997 jusqu’à la désintégration dans l’atmosphère de Saturne.
Par Victor Chevet, le
Source: Nature.com
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