Le Midwest était autrefois un des endroits les plus peuplés du monde, non loin du Mexique. En 1250, on estime que la colonie de Cahokia (dans le Missouri) avait une population plus grande que celle de Londres ! En revanche, en moins de 100 ans, la grande partie de cette zone s’est retrouvée totalement désertée. Et aujourd’hui, de nouveaux éléments, pour le moins insolites, sont en passe de nous donner des éléments de réponses. Explications.
Pourquoi analyser les sédiments ?
Les chercheurs vont analyser des sédiments contenant… des molécules de matière fécale qui pourraient nous aider à résoudre un des plus grands mystères de la région. C’est l’année dernière, qu’une équipe de climatologues et d’archéologues a commencé à analyser les fonds du lac Horseshoe, dans l’Illinois (où vivait la Cahokia). Il faut savoir que les couches de sédiments contiennent des molécules fécales, et ces dernières nous donnent un excellent indice sur les changements climatiques des temps passés.
Parmi ces changements, on peut notamment connaître les périodes de sécheresses ou d’inondations, très souvent à l’origine de déplacements de populations. En effet, dans cette région, ces changements climatiques, relativement soudains ont provoqué un phénomène de mouvement, car les personnes se sont réfugiées sur les hauteurs locales. Les conclusions de ces chercheurs ont notamment été publiées dans la revue Proceedings of the National Academy of Sciences.
Comment y parvenir ?
Il faut comprendre qu’ici, deux disciplines (science du climat et l’archéologie) doivent faire preuve de coopération pour mener ce genre de résultat. Si chacune a obtenu ses informations de son côté, les mettre en commun et avancer des théories qui respectent chacune des idées proposées est plus difficile à mettre en place. Et c’est justement ce que ces scientifiques ont réussi à faire, en trouvant des corrélations concrètes entre l’Homme et les changements environnementaux.
“Des études antérieures sur Cahokia ont permis de déterminer le déclin de la population en se basant sur des vestiges archéologiques tels que des trous de cheminée et du bois brûlé, mais les données climatiques reposaient sur des cernes et des carottes de lac sans rapport avec les vestiges archéologiques », explique Lora Stevens, paléoclimatologue à la California State University.
De plus, tous les enregistrements de données que nous avons en notre possession proviennent du même lac. Si nous ne pouvons pas généraliser à tout un continent ce phénomène, on peut en revanche connaître la relation exacte qui existe entre ce déclin de population et les facteurs environnementaux.
La matière fécale à notre secours ?
Analyser la matière fécale est une stratégie performante pour déterminer le nombre de personnes qui vivaient dans une région, à un moment précis. En fait, plus il y avait de gens, plus des excréments se retrouvaient tout autour du lac, et par conséquent finiraient dans le lac.
Aujourd’hui, nous avons les technologies pour analyser tous ces éléments, sans en abîmer les fossiles. Et par cette méthode, les scientifiques ont réussi à déterminer une forte baisse dans les précipitations estivales.
Le plus intéressant, c’est que cela correspond parfaitement aux données – ou plutôt estimations – démographiques que nous avons en possession, qui indiquent toutes que la population a largement commencé à diminué à ce moment-là.
Comment lier aléas climatiques et populations ?
Il faut savoir que la population de Cahokia était fortement tributaire du maïs. Ainsi, toutes les modifications climatiques, que ce soit des fortes pluies ou des périodes prolongées de sécheresse, ont eu des conséquences catastrophiques sur des dizaines de milliers de personnes. Des zones à proximité, qui disposaient de bien plus de ressources et d’un climat plus adéquat ont pu attirer toute cette population. Aujourd’hui – et déjà il y a quelques centaines d’années – c’est bien plus difficile de trouver des zones vierges et luxuriantes, même si les problèmes climatiques impactaient tout autant les individus.
À présent, les chercheurs souhaitent généraliser la collaboration entre l’archéologie et les climatologues pour étudier d’autres zones américaines en profondeur. Mais on pourrait tout à fait s’attendre à ce que l’étude se généralise mondialement, puisque le changement climatique et ses conséquences sur les populations est un sujet montant dans notre actualité.
Par Benjamin Cabiron, le
Source: Popsci
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