Un examen minutieux des canaux de l’oreille interne de centaines d’animaux modernes et fossiles a permis de déterminer que l’endothermie était apparue abruptement chez les mammifères à la fin du Trias.
Une évolution abrupte
Jusqu’à présent, l’analyse des squelettes de différents mammifères et de leur environnement suggérait que la transition endothermique s’était étalée sur une période d’environ 120 millions d’années. Dans le cadre de travaux publiés dans la revue Nature, Ricardo Araújo de l’université de Lisbonne et ses collègues ont décidé d’examiner la structure de l’oreille interne de nombreuses espèces animales modernes et disparues afin d’établir une chronologie plus précise des évènements.
L’équipe s’est concentrée sur les canaux semi-circulaires remplis de liquide, aidant les animaux à maintenir leur équilibre et à s’orienter. La température influençant le comportement des fluides, la forme de l’oreille interne des créatures à sang chaud devait théoriquement se révéler différente de celle de leurs ancêtres à sang froid.
L’analyse par microtomographie à rayons X de telles structures chez des centaines de vertébrés modernes (mammifères, reptiles, oiseaux, amphibiens et poissons), ainsi qu’une soixantaine d’espèces éteintes a révélé que les canaux de l’oreille interne des mammifères à sang chaud étaient plus circulaires, et proportionnellement plus petits et fins par rapport à leur taille, comparés à ceux des reptiles, amphibiens et poissons à sang froid.
Forts de ces connaissances, les chercheurs ont examiné les canaux de l’oreille interne des spécimens anciens, couvrant plusieurs centaines de millions d’années, et déterminé que la transition endothermique des mammifères avait débuté il y a 233 millions d’années et duré environ un million d’années. « Il s’agissait d’une évolution très brutale, et non progressive, comme on l’a longtemps cru », souligne Romain David, du Muséum d’histoire naturelle de Londres.
Le sang chaud aurait permis aux mammifères de s’aventurer dans des régions plus froides
Cette période correspond à l’apparition dans les archives fossiles des mammaliamorphes, ancêtres des mammifères et premières créatures connues à posséder des poils et des moustaches. Selon les auteurs de la nouvelle étude, le sang chaud aurait permis à ces créatures de s’aventurer dans des régions plus froides, et également de rester actives sur de longues périodes.
Une telle caractéristique impliquant une dépense énergétique accrue afin de maintenir une certaine température corporelle, cela expliquerait potentiellement pourquoi de nombreuses espèces, vivant généralement dans des environnements où la nourriture est rare et les températures extérieures élevées, sont restées à sang froid.
Descendants à sang chaud des reptiles, les oiseaux ont évolué vers l’endothermie séparément des mammifères, impliquant des différences au niveau de la structure de l’oreille interne. Selon les chercheurs, leurs canaux ne présentent pas nécessairement les mêmes taux de variation, en raison de la composition chimique différente des fluides qu’ils renferment.
Par Yann Contegat, le
Source: New Scientist
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