
Récemment, un essai clinique à long terme a révélé qu’un médicament oublié réduit de moitié le risque de développer la maladie d’Alzheimer à un stade précoce chez les personnes présentant une prédisposition génétique à cette maladie. À l’heure actuelle, la probabilité d’apparition des symptômes est proche de 100 % chez les patients âgés de 30 à 65 ans. Explications.
Le gantenerumab
Cet essai clinique, dont les résultats ont été publiés dans la revue The Lancet Neurology, a été mené par la faculté de médecine de l’université de Washington (WashU Medicine). 73 personnes présentant les variants génétiques héréditaires révélateurs, déjà inscrites à une recherche expérimentale sur un traitement, ont reçu soit du gantenerumab, soit un autre médicament, soit un placebo. Le gantenerumab, un médicament développé par Roche, était l’espoir de l’entreprise il y a quelques années. Toutefois, ce médicament n’a pas atteint ses objectifs lors de son essai pivot de phase III. Ciblant l’accumulation de plaques amyloïdes, il n’a pas répondu aux attentes et a alimenté la théorie selon laquelle la responsabilité de ces plaques dans l’apparition de la maladie d’Alzheimer pourrait être surestimée.
La maladie se développe généralement entre 40 et 50 ans, mais peut se manifester dès l’âge de 30 ans. Dans l’étude, portant sur un sous-groupe de 22 personnes sans troubles cognitifs et ayant reçu du gantenerumab pendant huit ans en moyenne, le traitement expérimental a réduit leur risque de développer une forme précoce de la maladie d’Alzheimer de près de 100 % à 50 %.
« Tous les participants à cette étude étaient voués à développer la maladie d’Alzheimer, et certains n’en sont pas encore atteints », a déclaré le Dr Randall J. Bateman, auteur principal de l’étude et professeur de neurologie à la faculté de médecine de l’université de Washington. « Nous ne savons pas encore combien de temps ils resteront asymptomatiques – peut-être quelques années, voire des décennies. »
Le professeur ajoutant : « Afin de leur donner les meilleures chances de conserver des fonctions cognitives normales, nous avons poursuivi le traitement avec un autre anticorps anti-amyloïde dans l’espoir qu’ils ne développent jamais de symptômes. Ce que nous savons, c’est qu’il est possible de retarder l’apparition des symptômes de la maladie d’Alzheimer et de prolonger la vie en bonne santé. Et le médicament n’ayant pas fonctionné lors du premier essai de courte durée, cela suggère qu’un traitement à long terme bien avant l’apparition des symptômes pourrait être la clé du succès du gantenerumab. C’est dans ce groupe, qui a pris le médicament de manière continue pendant au moins huit ans, que le taux de réussite a été de 50 %. »
Des effets secondaires
Toutefois, le gantenerumab comporte un risque d’effet secondaire appelé anomalies d’imagerie liées à l’amyloïde (ARIA). Dans la plupart des cas, elles passent inaperçues pour le patient et se résorbent spontanément. Cependant, chez certains patients, cet effet est plus grave et, bien que rare, peut être mortel.
Dans cette étude, des doses plus élevées de gantenerumab sur une période plus longue ont entraîné des taux plus élevés d’ARIA (30 %). Bien qu’aucun décès n’ait eu lieu, deux participants ont dû interrompre leur traitement.
Des essais de prévention
Alors que l’essai se poursuit, les participants à l’étude prolongée reçoivent désormais du lécanemab, suite à l’arrêt du gantenerumab à la fin de l’année 2022. Il s’agit d’un autre traitement anti-amyloïde, approuvé par la Food and Drug Administration (FDA) en 2023. Il permet de ralentir la progression de la maladie chez les personnes présentant déjà des signes de déclin cognitif. Et cette phase de l’essai ne se limite pas à la maladie d’Alzheimer à début précoce, mais à toutes ses formes.
Néanmoins, pour que l’essai se poursuive et se termine, WashU Medicine attend le retour d’une demande de subvention des National Institutes of Health (NIH). « Si les essais de prévention de la maladie d’Alzheimer à début tardif donnent des résultats similaires à ceux des essais DIAN-TU, des mesures de prévention pourraient bientôt être disponibles pour la population générale », a précisé le Dr Randall J. Bateman. « Je suis très optimiste aujourd’hui, car il pourrait s’agir des premières preuves cliniques de ce qui deviendra des mesures de prévention pour les personnes à risque de maladie d’Alzheimer. Un jour prochain, nous pourrions retarder l’apparition de la maladie d’Alzheimer pour des millions de personnes. »
Maria C. Carrillo, directrice scientifique et responsable des affaires médicales de l’Alzheimer’s Association, concluant : « Bien que le gantenerumab n’existe plus, les médicaments anti-amyloïdes adjacents peuvent encore prouver leur valeur en tant que médicaments préventifs. Ces résultats préliminaires prometteurs suggèrent clairement le rôle potentiel de la réduction de la bêta-amyloïde dans la prévention de la maladie d’Alzheimer. L’Alzheimer’s Association attend avec impatience la réplication, l’extension et l’expansion de cette recherche véritablement inédite et révolutionnaire, et nous avons investi massivement pour garantir que ces questions scientifiques importantes puissent être étudiées. Des découvertes comme celle-ci illustrent de manière convaincante l’importance de poursuivre, de développer et d’accélérer la recherche sur la maladie d’Alzheimer et toutes les maladies qui en sont à l’origine. »
Par ailleurs, la maladie d’Alzheimer s’explique par cette cause unique, selon une étude.