Et si notre rapport aux mathématiques était faussé dès le départ ? Alors que la Fête de la science bat son plein, cette question résonne comme une invitation à revoir notre manière d’enseigner cette discipline souvent redoutée.

Les maths, un langage universel qu’on nous a appris comme une langue morte
Combien d’entre nous ont dit : « Je ne comprends rien aux maths » ? Pourtant, les mathématiques ne sont pas une affaire de génie, mais de pédagogie. Viviane Pons, maîtresse de conférences en informatique à l’université Paris-Saclay, le rappelle : les maths sont une façon d’approcher le monde, pas une suite d’exercices incompréhensibles. Le vrai souci, c’est qu’on les apprend trop souvent comme des recettes à appliquer, pas comme une manière de penser, d’explorer, de douter.
En réalité, comprendre une équation, c’est comme apprendre une langue étrangère : il faut du temps, de l’erreur et de la curiosité. De plus, on oublie que derrière chaque chiffre se cache une idée, un raisonnement, parfois même une émotion. C’est ce lien vivant que l’école peine encore à transmettre, en privilégiant la bonne réponse au détriment de la compréhension.
Comment les stéréotypes de genre faussent notre rapport aux mathématiques dès l’enfance
Pour aller plus loin, il faut aussi parler de la question du genre. « Pourquoi dit-on que les garçons réussissent mieux en maths que les filles ? », demande Lamine, élève de CM2. La réponse est simple : c’est une question de perception, pas de capacité. Viviane Pons rappelle que, longtemps, les filles n’avaient pas le droit d’étudier les mathématiques. Cette exclusion a laissé des traces durables dans les mentalités et les représentations. Dès le CP, les études montrent que les enfants intègrent des biais : les garçons se sentent plus légitimes, les filles doutent d’elles-mêmes.
Pourtant, tout le monde peut raisonner. Autrement dit, c’est la culture qui influence la confiance, pas le cerveau. Si l’on veut que les enfants s’épanouissent dans les sciences, il faut leur donner des modèles et leur montrer que les maths appartiennent à tout le monde, sans exception. Plus tôt on casse ces stéréotypes, plus on libère la curiosité et la confiance. Ainsi, les filles comme les garçons peuvent enfin se projeter dans le plaisir d’apprendre et de comprendre.
Pourquoi la peur de se tromper bloque plus que le manque de logique
Au-delà du genre, un autre frein majeur reste la peur de se tromper. En maths, on confond souvent erreur et échec. Pourtant, les chercheurs passent leur temps à tester, à se poser des questions, à recommencer. Le cerveau apprend en se trompant : si un problème résiste, ce n’est pas un signe de bêtise, mais d’apprentissage. C’est même la preuve que le cerveau travaille.
En conséquence, il est essentiel de réhabiliter l’erreur comme outil de progression. Comme dirait Jamy dans C’est pas sorcier, la difficulté montre qu’on touche à quelque chose d’intéressant. Le vrai défi, c’est de changer notre rapport à l’erreur, de la voir non pas comme un obstacle, mais comme une étape essentielle du raisonnement. Derrière chaque solution juste, il y a des dizaines d’essais infructueux, et c’est ce chemin qui construit l’intelligence.
Redonner le goût des maths grâce à la curiosité, la confiance et le plaisir de comprendre
Enfin, pour réconcilier les enfants (et les adultes) avec les maths, il faut changer de regard. Les maths sont partout : dans la musique, les jeux vidéo, la cuisine, le sport. Elles aident à comprendre le monde. Viviane Pons encourage les élèves à se faire confiance et à accepter leur propre manière de réfléchir. Ce changement d’attitude peut transformer une matière redoutée en un terrain de jeu intellectuel.
De plus, chacun a sa façon d’apprendre : certains voient les chiffres, d’autres les formes, d’autres encore les histoires. Il n’y a pas une seule manière d’être bon en maths. Si un enfant dit : « Je ne comprends rien aux maths », répondez-lui : « C’est normal. Personne ne comprend du premier coup. Continue, tu es déjà en train d’y arriver. » En somme, les mathématiques ne demandent pas du génie, mais de la curiosité, de la patience et du plaisir.
Par Eric Rafidiarimanana, le
Catégories: Sciences, Sciences physiques