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45 % de hausse pour le rouble : pourquoi cette victoire monétaire devient un cauchemar pour le Kremlin

Une devise forte en temps de guerre, est-ce vraiment une bonne nouvelle ? En Russie, la flambée du rouble en 2025 a des allures de victoire… empoisonnée. Derrière les apparences d’une réussite économique se cachent des tensions budgétaires, des contradictions politiques et des risques majeurs pour l’avenir.

Liasses de roubles russes posées sur un bureau devant un écran affichant un graphique financier en forte hausse.
La flambée du rouble se reflète sur les marchés financiers, entre gains apparents et fragilités économiques sous-jacentes – DailyGeekShow.com / Image Illustration

Une remontée spectaculaire du rouble causée par une politique monétaire volontairement asphyxiante

Depuis janvier, le rouble a bondi de 45 % face au dollar, une performance impressionnante à première vue. Mais cette flambée est le fruit d’une politique monétaire très stricte orchestrée par la Banque centrale russe : taux d’intérêt élevés, contrôles des capitaux, interventions ciblées sur le marché des changes. En clair, on limite les sorties d’argent tout en incitant les épargnants à garder leurs roubles bien au chaud.

Mais attention, ce n’est pas une dynamique naturelle. La hausse du rouble repose sur une forme de tension artificielle : les importations sont freinées, l’accès au dollar est restreint, et le yuan a remplacé le billet vert comme devise de référence dans les échanges. Bref, ce n’est pas la confiance des marchés qui tire le rouble vers le haut, mais un pilotage autoritaire des flux financiers.

Un taux de change trop fort qui plombe les recettes de l’État et fragilise les exportateurs

Et c’est là que le bât blesse pour le Kremlin. Car si un rouble solide permet de freiner l’inflation en rendant les produits importés moins chers, il pèse aussi lourdement sur les recettes de l’État. Pourquoi ? Parce que la Russie vend son pétrole et son gaz en devises étrangères. Et quand le dollar vaut moins de roubles, ces ventes rapportent… moins en monnaie locale.

Le budget 2025 avait prévu un taux de change autour de 94 roubles pour un dollar. Problème : on tourne plutôt autour de 78. Conséquence ? Une perte potentielle de 2,4 % des recettes publiques selon VTB. Et ce n’est pas tout : les exportateurs russes, déjà soumis à des sanctions, voient leur compétitivité fondre avec un rouble surévalué. Une situation qui pourrait freiner encore davantage l’activité économique.

Des marchés devenus opaques et des lignes de fracture au sommet de l’État russe

Depuis les sanctions de 2024, le marché du rouble est devenu largement opaque. Le dollar ne s’échange plus librement à la Bourse de Moscou, et seuls certains acteurs triés sur le volet communiquent leurs taux à la Banque centrale. Cette structure étriquée empêche toute lecture claire des vraies dynamiques de l’offre et de la demande.

Et pendant ce temps, les décideurs se contredisent. La Banque centrale insiste sur la nécessité d’un rouble fort pour stabiliser les prix. Mais le gouvernement, lui, rêve d’un rouble affaibli pour renflouer les caisses. Et dans le silence de Vladimir Poutine, les débats internes font rage, loin des projecteurs.

Une dépréciation probable en 2026 face aux baisses de taux et aux risques géopolitiques

Plusieurs signaux laissent penser que le rouble pourrait entamer un repli dans les mois à venir. D’abord, la Banque centrale envisage de baisser ses taux directeurs. Une décision qui rendrait les placements en roubles moins attractifs et pousserait les investisseurs à regarder ailleurs.

Ensuite, un événement clé approche : le délai de 50 jours accordé par Washington à la Russie pour avancer vers la paix en Ukraine arrive à échéance. En cas de nouvelles sanctions, notamment sur les acheteurs de pétrole russe, la devise pourrait subir une pression extrême.

Enfin, l’histoire joue contre Moscou. En 2015, un abaissement similaire des taux avait entraîné une dépréciation progressive mais durable du rouble. Le même scénario pourrait se répéter, et cette fois, dans un contexte bien plus tendu.

Par Gabrielle Andriamanjatoson, le

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