Un des grands films du cru 2017. 120 battements par minute, primé au festival de Cannes (Grand prix du Jury), sort en salle ce mercredi. Le film retrace la naissance et les débuts de l’association Act Up Paris dans les années 1990. À ne pas manquer.
Un véritable combat
Paris, début des années 1990. Depuis déjà près de 10 ans, l’épidémie du sida fait rage. Dans l’indifférence de la société et des pouvoirs publics, la maladie décime les communautés gay et trans, mais aussi toxicomanes, prostituées, prisonniers… Créée sur le modèle de sa grande soeur américaine, Act Up Paris (fondée en 1989) se donne pour mission de lutter, seule contre tous, contre ce fléau.
Au programme : prévention dans les lycées, slogans chocs, actions pour attirer l’attention des médias ou pour s’attaquer à des laboratoires pharmaceutiques malhonnêtes. Tous les moyens sont bons. Et l’association se fait rapidement connaître pour son militantisme spectaculaire. « À cette époque, pour faire avancer un dossier, on agitait la menace de prévenir Act up. Et ça marchait », explique un ancien responsable de l’organisation.
Années 1990
Le film se penche sur cette période, à la fois dramatique et empreinte d’une certaine beauté, où la proximité de la mort galvanisait les troupes. « Mais je vais crever, moi. Qu’est-ce que tu y peux à ça ? », lance ainsi le président de l’association, Cleews Vellay à un Philippe Douste-Blazy médusé sur un plateau télé. Nous sommes en 1994. Un sens aigüe de la provocation qui provoquera des dissensions inévitables au sein du groupe. Car le film n’est pas qu’une ode manichéenne à ces militants. Il n’occulte rien des tensions qui traversent ce que son fondateur Didier Lestrade appelle la « communauté sida ».
Il fallait bien la patte d’un réalisateur comme Robin Campillo pour faire renaître l’atmosphère de cette époque charnière avec un tel brio. Déjà récompensé pour Entre les murs (palme d’or 2004 dont il a écrit le scénario et réalisé le montage), il signe ici son troisième long-métrage après Les revenants (film à l’origine de la série de Canal +), et le très remarqué Eastern Boy (césar 2015 du meilleur film). On notera notamment le choix d’une bande son qui fait la part belle à la musique house, dont l’essor dans les années 1990 est indissociable de la communauté gay. C’est donc avec plaisir que les connaisseurs apprécieront la musique signée Arnaud Rebotini.
Un film audacieux récompensé par le succès
Porté par un jeu d’acteur particulièrement juste, avec par exemple Adèle Haenel dans le rôle d’une militante que rien n’arrête, le film sait mêler l’intime au politique. La narration a pour fil rouge l’amour naissant entre Nathan (Arnaud Vaudois), nouveau venu au sein de l’organisation, et Sean (Nahuel Perez Biscayart), un ancien du mouvement faisant face aux premiers signes de la maladie. Une romance qui fait écho au drame du sida et s’intègre dans un groupe survolté.
Au rythme trépidant de la première partie du film, avec ses combats contre la police, sa fureur de vivre et ses scènes d’action, succède le drame inévitable de la mort. Et l’hommage des survivants. Un film bouleversant qui a marqué le public cannois, comme le raconte Isabelle Regnier dans les colonnes du Monde : » Des rivières de larmes ont inondé, samedi 20 mai au matin, le Grand Théâtre Lumière à Cannes « .
Par Tristan Castel, le
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