L’image de la Vierge à l’Enfant n’a cessé de fasciner les artistes depuis plus de 2 millénaires. Initialement imagerie religieuse, elle n’a depuis cessé d’évoluer pour devenir un véritable motif d’art. Déclinée sous de multiples formes, selon les courants artistiques, elle offre un véritable panorama de l’évolution des sociétés, pas seulement occidentales.
Histoire de Marie et de l’Enfant Jésus
L’histoire de Marie et de son fils, Jésus, est retrouvée dans les textes religieux. Il est toutefois difficile de retracer toute leur histoire complète, celle-ci ayant fait l’objet de transformations multiples afin de la faire correspondre aux idées religieuses. Ce qu’en disent toutefois les textes, c’est que Marie, originaire de Nazareth, en Palestine, aurait reçu la visite de l’Ange Gabriel, qui lui aurait annoncé que Dieu l’avait choisie pour porter, mettre au monde et élever son fils unique, Jésus. Toutefois, Marie était, selon les textes, vierge. Ils sont aujourd’hui, elle et son enfant, les figures les plus vénérées du christianisme.
Dès l’époque romaine, quelques rares images de la Vierge à l’Enfant commencent à apparaitre. Mais c’est vraiment sous l’ère byzantine que cette image s’est développée sous plusieurs formes. Depuis, on peut distinguer plusieurs grandes époques et formes de cette représentation : le Moyen Âge, la Renaissance et l’art contemporain. La figure de la Vierge à l’Enfant est également présente dans l’art islamique.
Une image présente dès l’Antiquité
La première image que nous ayons d’une représentation de la Vierge à l’Enfant nous vient des catacombes de Priscille, à Rome, où on peut voir l’Enfant Jésus téter le sein de sa mère.
Ces catacombes, datant d’entre le 2e et le 4e siècles, offrent un premier aperçu de la vision que l’on pouvait avoir de la Vierge à l’Enfant à l’époque, c’est-à-dire la vision d’une mère allaitante.
La Vierge à l’Enfant apparait ensuite sous la forme d’icônes byzantines. Ce sont les premiers types de peinture que l’on trouve sur la représentation de la Vierge à l’Enfant. Ces icônes préfigurent les images saintes que l’on aura de l’orthodoxie chrétienne. On voit que Marie et Jésus ont un visage sombre, et ils sont souvent représentés assis sur un trône.
Une nette évolution entre le Moyen Âge et la Renaissance
Au Moyen Âge, les artistes s’inspirent largement des icônes byzantines pour représenter l’Enfant Jésus et sa mère. Dans cette peinture, attribuée à Mariotto di Nardo vers 1395, on voit l’influence de cette période byzantine dans les mines plutôt sombres des 2 protagonistes principaux, qui sont au centre du tableau.
La Renaissance, quant à elle, se divise en 2 grandes parties : la Première Renaissance, qui s’étend de 1420 à 1500, et qui, en art, cherche à s’inspirer des anciens. C’est aussi là que Jésus commence à apparaitre avec un visage de bébé, car jusque-là, on considérait qu’on ne pouvait pas représenter le Messie avec un simple visage enfantin, donc les artistes tentaient de représenter un enfant avec un visage d’adulte. La Renaissance va changer cela. Cette époque est foisonnante artistiquement puisqu’à cette même époque, Botticelli peint ses chefs-d’oeuvre comme La Naissance de Vénus ou Primavera.
La Haute Renaissance, quant à elle, se déroule durant le 16e siècle et a pour figures artistiques majeures Raphaël, Michel-Ange, Léonard de Vinci… Elle fait référence à Rome, aux papes, à Florence, Venise… Les portraits de la Vierge et de l’Enfant y sont réalistes, comme dans ce tableau de Léonard de Vinci, vers 1503.
La Renaissance nordique, située dans les pays du Nord de l’Europe (Pays-Bas, Allemagne, Belgique, nord de la France), s’inspire largement de la Renaissance italienne. Dans ce tableau de Jan van Eyck vers 1438, on peut y voir l’influence italienne dans le désir du réalisme.
Une figure de plus en plus réaliste et moderne
Dans ce tableau de 1899 de William-Adolphe Bouguereau, on voit la volonté des peintres de l’époque de remettre au goût du jour des imageries anciennes, en les représentant avec des figures du 19e siècle. Ainsi dans ce tableau, les 2 protagonistes ont-ils la peau très blanche, Jésus est représenté blond aux yeux bleus, alors qu’ils étaient en réalité palestiniens, donc loin de cette image idéalisée des Européens de l’époque.
Petit à petit, l’image même de la Vierge à l’Enfant va s’atténuer au profit de la mère avec l’enfant. Comme dans ce tableau de la fin du XIXe siècle, où on croirait voir une « simple » représentation d’une mère et de son enfant, mais « le regard adorateur de la mère sur l’enfant et le contrapposto – typique de l’art de la Renaissance italienne où une partie du corps s’appuie sur l’autre, ici l’enfant sur la mère – font penser aux Vierges à l’Enfant de la Renaissance italienne », selon le Metropolitan Museum of Art.
Une figure présente également dans d’autres civilisations
La figure de la Vierge à l’Enfant se trouve également dans des civilisations autres que chrétiennes, ici dans l’Empire moghol, au coeur du monde indo-islamique. Leur présence peut s’expliquer par celle des missionnaires jésuites. De plus, le Coran explique lui-même que Marie est « avant toutes les femmes de la création », en faisant une figure religieuse importante sinon sacrée, ainsi que Jésus, qui est considéré comme l’avant-dernier prophète et messager d’Allah.