Beaucoup en Europe ont vu le nom de Daredevil pour la première fois avec la catastrophique erreur cinématographique de 2003. Mais vous auriez tort de croire que le comics est du même acabit. Avec une histoire plus réaliste que la plupart des super-héros et une atmosphère bien particulière, Daredevil est l’un des héros de comics les plus emblématiques à arpenter les rues de New York. Focus sur l’univers d’un héros pas comme les autres.
L’histoire du comics
Durant la grande décennie des années 60 pour Marvel, Stan Lee conçoit avec Bill Everett le personnage de Daredevil tout en collaborant avec Jack Kirby (Captain America). Le personnage apparaît donc pour la première fois en avril 1964 dans le numéro 1 de Daredevil. Après quelques numéros, c’est John Romita, Sr. qui prend en charge le projet, mais lorsque celui-ci se voit confier The Amazing Spider-Man, Stan Lee nomme l’artiste Gene Colan responsable de Daredevil. Avec ce nouveau chef de projet dès 1966, le comics trouve définitivement son identité et ce qui en fait un comics à part, que ce soit pour le héros ou le style.
Pour l’écriture, Colan a enregistré les discussions qu’il avait avec Lee et se basait sur ça pour faire le comics. Stan Lee se souvient : « Je disais à Gene qui serait le méchant, ce qu’était le problème et comment il devrait être résolu. Pour le reste, je lui laissais carte blanche. C’était très intéressant de travailler ainsi, car en voyant le résultat final, je voyais des choses intéressantes auxquelles je n’aurais pas pensé. » Le numéro 47 de Daredevil, où le héros défend un vétéran du Vietnam d’un complot, est l’histoire dont Stan Lee est le plus fier de toute sa carrière. Quelques numéros après, c’est Roy Thomas (Conan le Barbare, X-Men), qui prend la suite de Lee à l’écriture.
Dans les années 70, Gerry Conway, alors seulement âgé de 18 ans, prend la relève et transforme le comics pour lui donner une dimension de pulp. Il fait déménager Daredevil à San Francisco et lui donne Black Widow en coéquipière. Les changements ne s’arrêtent pas là puisque quelques années après, Colan part de la série et Tony Isabella fait revenir Daredevil à Hell’s Kitchen. L’apparition de Roger McKenzie à l’écriture donne un twist de thriller au comics et alors que les ventes commencent à chuter, Frank Miller rejoint l’équipe. S’ensuit une grande réécriture de l’histoire et des origines du personnage principal. Miller s’en va du projet puis revient dans les années 90 accompagné de John Romita, Jr. Plusieurs écrivains et coloristes se succèdent jusqu’aux dernières années où Marvel tente de réinventer le personnage et raviver l’intérêt du public.
Les personnages
Après tous ces changements et ces réécritures, vous vous doutez bien que Daredevil, comme la grande majorité des personnages de comics, possède plusieurs histoires suivant l’époque à laquelle on pense. Celle qui est le plus retenue et qui est développée dans les films et la série est généralement commencée dès l’enfance de Daredevil, ou plutôt de Matt Murdock. Élevé par son père, sa vie change brutalement dans son enfance lorsqu’il devient aveugle en sauvant la vie d’un piéton dans les rues de New York. Matt est en effet aveuglé par une substance radioactive qui tombe du véhicule. Il perd la vue alors que tous ses autres sens se développent mystérieusement.
Son père Jack Murdock est un boxeur qui tente de rapporter assez d’argent pour faire vivre son fils convenablement. Il prend la mauvaise décision de se rapprocher d’un criminel qui truque les matchs et donne son accord pour perdre lors de la prochaine rencontre. Mais lorsqu’il réalise que son fils le regarde, il ne peut s’y résoudre et gagne le combat. Menacé, il s’enfuit rapidement de l’arène. Cela ne suffit malheureusement pas et Jack se fait assassiner par le criminel. Très conflictuel, Jack essaye de faire comprendre à son fils l’importance de l’éducation et de la sagesse. Il souhaite un avenir meilleur pour Matt et ne veut pas le voir finir comme lui. Malgré ses défauts, Matt a un amour profond pour son père et sa mort lui donne de nouvelles convictions.
Grâce à son entrainement de plusieurs années et ses sens ultra développés, Matt réussit à se venger du criminel. Plutôt que de choisir un chemin entre celui de son père et l’opposé, il a choisi les deux : il est un avocat de talent la journée comme l’aurait voulu son père, mais il est aussi un combattant enragé la nuit sous son costume de justicier. Daredevil ne porte pas son nom pour rien. Au fond de lui, une rage inépuisable le pousse chaque soir à sortir dans les rues et se battre pour la sécurité de la ville. Ou du moins, c’est ce qu’il se dit, mais bien souvent, il se bat pour le plaisir. Il fera la rencontre de plusieurs super-héros qui deviendront ses amis, notamment Spider-Man dès 1966.
Au niveau des personnages secondaires, le plus important est sans aucun doute son sidekick Franklin Nelson, dit Foggy. Il était son colocataire à l’université et est devenu avocat en même temps que Matt. Ils fondent une société de services légaux et même si leur amitié est profonde, Foggy se sent toujours en position d’infériorité par rapport à Matt qui reçoit les affections de leur secrétaire, Karen Page. Connaissant très bien Matt, Foggy sent aussi que son ami lui cache des choses et il n’est jamais sûr de ce que cela peut bien être. Contrairement à son ami, Matt n’est pas intéressé par Karen et tombe amoureux d’Elektra, une meurtrière au style de vie très différent de son amant Daredevil. Même si ce dernier a un sens de la morale non manichéen, elle tend plus du côté obscur…
Hell’s Kitchen
Il est clair que Daredevil, malgré ses prouesses en arts martiaux et ses sens développés, ne peut pas rivaliser avec des pouvoirs de super-héros du genre de Wolverine ou Hulk. C’est pour ça que Stan Lee a fait en sorte que le héros ne s’occupe majoritairement que d’un quartier de New York et non de la ville entière comme peut le faire Spider-Man. Le quartier en question, c’est Hell’s Kitchen. Ne vous y trompez pas, malgré le nom surprenant, c’est un vrai quartier. Cette dénomination remonte à 1881 à une époque où le quartier était particulièrement sale et peu accueillant. De nos jours, c’est devenu l’un des quartiers les mieux entretenus de New York !
En lisant le comics, on a parfois l’impression que les personnages parlent de Hell’s Kitchen comme si New York n’existait pas autour du quartier. Dans une métropole telle que New York, les habitants pensent en effet à leurs quartiers comme des zones à part. Que ce soit Hell’s Kitchen, Red Hook, Williamsburg ou Astoria, chaque quartier a sa propre culture. Bien sûr, cela illustre aussi l’échelle du combat de Daredevil. Superman peut sauver la Terre et c’est très bien, mais tous les super-héros n’ont pas besoin de cela pour être héroïques. Daredevil veut nettoyer son environnement direct du crime qui le sclérose et est conscient qu’il ne pourrait de toute façon pas faire plus.
Cette dimension réaliste colle parfaitement à l’univers sombre du personnage, qui malgré sa nature très humaine, n’en reste pas moins un guerrier extraordinaire. Ses sens sont si développés que peu de gens savent qu’il est aveugle ! Déjà enfant, il interprète le monde grâce aux sons et se repère grâce à l’équivalent d’un sonar. Il ressent chaque vibration, chaque perturbation dans l’atmosphère, entend absolument tous les moindres bruits environnants, récoltant une tonne d’informations qui valent plus que la vue pour le commun des mortels. Entraîné durement par son maître Stick, il est devenu expert dans de nombreux arts martiaux et combine cela avec son style brutal de boxe américaine.
Daredevil est donc un personnage très conflictuel qui est loin de voir le monde en noir et blanc malgré son sens aigu de la justice. Aveugle, mais bien plus conscient du monde que les gens ordinaires, il prend parti de ses sens surdéveloppés pour combattre ses adversaires et rétablir l’ordre dans son quartier. Le seul danger pour lui : savoir quand s’arrêter de frapper et calmer le démon qui sommeille au fond de lui. Connaissez-vous Daredevil par les comics ou par la série ?
Par Florent, le