En Bavière, un chantier électrique met au jour 22 sépultures vieilles de 4 000 ans. Objets rares, positions funéraires étranges, traces d’habitats… Le passé refait surface et nous raconte une histoire que personne n’attendait.

Une nécropole insoupçonnée mise au jour par un chantier moderne
Ce n’était pas censé être plus qu’un chantier parmi d’autres. Dans la campagne bavaroise, à deux pas du Danube, des ouvriers creusent pour installer un câble électrique de 270 kilomètres.
Mais dans la terre retournée apparaissent des formes sombres, presque des silhouettes. Il ne s’agit pas de simples pierres. En réalité, ce sont des os. Et autour, des objets étonnants surgissent.
Très vite, les archéologues arrivent sur place. Rapidement, ils comprennent qu’ils viennent de tomber sur un site rare : 22 squelettes, parfaitement conservés, certains allongés sur le côté, bras et jambes repliés, dans une posture fœtale. Cette position funéraire, bien que connue, demeure intrigante.
On la retrouve souvent entre la fin du Néolithique et les débuts de l’âge du bronze, il y a plus de 4 000 ans. Le lieu ? Une nécropole. Une vraie. C’est l’une des plus grandes jamais découvertes en Bavière pour cette période.
Le mobilier funéraire révèle une société organisée et hiérarchisée
Ce qui frappe d’abord, c’est la richesse du mobilier funéraire. Dans certaines tombes, on retrouve des flèches, des poignards en cuivre, des bracelets de pierre, mais aussi des poteries en forme de cloche, typiques de la culture campaniforme.
Tous ces objets racontent une chose : ces gens vivaient dans une société organisée, structurée, avec ses rôles et ses statuts. Par ailleurs, certains défunts semblent avoir bénéficié de soins particuliers, comme s’ils occupaient une place à part dans la communauté.
Plus étonnant encore, deux tombes doubles ont été mises au jour. Dans chacune d’elles, deux corps allongés côte à côte, dans une posture identique. S’agissait-il de frères ? D’époux ? De prêtres ? De guerriers ?
Les hypothèses sont nombreuses. Pourtant, ce qui est certain, c’est que ces sépultures révèlent des liens sociaux profonds, et peut-être même des rituels ou des dynamiques familiales qu’on ne soupçonnait pas. À ce sujet, des analyses ADN sont en cours. Et on attend leurs résultats avec impatience.
Un puits vieux de 5 000 ans et des vestiges d’habitat racontent l’histoire du lieu
Autour de ces tombes, les archéologues découvrent bien plus. Les sépultures ne sont que la partie émergée de l’iceberg. À proximité, ils identifient les traces d’un habitat : trous de poteaux, fosses de stockage, four en argile. Ainsi, tout porte à croire que le site a été occupé bien avant l’inhumation des morts.
En parallèle, un puits attire particulièrement l’attention. Il s’agit d’un puits de près de 5 000 ans, construit à partir d’un tronc d’arbre évidé et de branches tressées.
À l’intérieur, conservés par la tourbe, une feuille de chêne et un gland reposent en silence. Ces fragments de paysage offrent un aperçu du climat d’alors. En somme, le puits semble avoir gardé en mémoire les gestes et les saisons d’un monde disparu.
Selon les spécialistes, ce puits pourrait appartenir à la culture d’Altheim, une culture plus ancienne que celle des campaniformes. Ce détail change tout. Dès lors, il ne s’agit pas seulement d’un cimetiière, mais d’un carrefour de civilisations, un point de contact entre plusieurs époques, plusieurs peuples, plusieurs techniques.
Une fenêtre sur les réseaux, les rituels et la mémoire des vivants d’hier
Ce qui se joue ici, ce n’est pas juste une découverte de plus dans l’histoire de l’archéologie européenne. C’est une plongée directe dans la complexité humaine d’il y a 4 000 ans. Ces tombes, ces objets, ces gestes d’ensevelissement, ces traces de vie quotidienne… Ils montrent que ces peuples étaient loin d’être primitifs ou isolés.
Certes, ils avaient des réseaux d’échange, certaines pièces en cuivre viennent de loin. En outre, ils avaient des codes symboliques, la position des corps, le choix des objets. Et surtout, ils avaient une mémoire collective, une façon de transmettre, de construire, d’enterrer, de ritualiser.
Aujourd’hui, le chantier avance, les câbles seront posés. Toutefois, quelque part, sous nos pieds, la mémoire des anciens continue de parler.
Grâce à eux, c’est toute une part de notre histoire commune qui refait surface.
Par Eric Rafidiarimanana, le
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