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Une carapace fossilisée datée de 130 millions d’années bouleverse les théories sur les tortues marines préhistoriques

Restée invisible pendant plus de 60 ans dans les tiroirs d’un musée suisse, une carapace fossilisée dévoile aujourd’hui une espèce totalement inconnue de tortue marine. Cette découverte bouleverse notre compréhension de leur évolution.

Fossile de tortue de 130 millions d’années découvert lors de fouilles archéologiques.
Illustration d’une carapace fossilisée, témoin précieux de l’évolution des tortues depuis le Crétacé.

Une tortue marine inconnue redécouverte dans les collections du musée de Bâle

Tout commence dans les années 1950, en Colombie, lorsque le géologue suisse Otto Renz collecte un fossile intrigant. Il s’agit d’une carapace de tortue bien conservée, accompagnée de quelques os.

Ce spécimen est ensuite envoyé au musée d’histoire naturelle de Bâle, où il est mal classé parmi les invertébrés. Il y reste oublié pendant près de 70 ans.

En 2025, le paléontologue Edwin-Alberto Cadena et son équipe redécouvrent ce fossile lors d’une réévaluation des collections. À leur grande surprise, il ne correspond à aucune espèce connue. Grâce à une analyse minutieuse, ils identifient alors une nouvelle espèce, baptisée Craspedochelys renzi, en hommage à Otto Renz.

Ce fossile vieux de 130 millions d’années provient de la formation marine de Moina, datant du Crétacé inférieur. Il représente la preuve la plus récente de l’existence des thalassochélydiens, un groupe ancien de tortues marines.

Une découverte qui élargit notre vision de l’évolution des tortues marines

Reconstitution artistique de la tortue fossile Craspedochelys renzi dans un écosystème marin peu profond du Crétacé.
Reconstitution artistique de Craspedochelys renzi et de l’écosystème marin peu profond qu’elle habitait ; les nageoires antérieures en forme de palettes sont basées sur le thalassochélydien le plus complet connu à ce jour, Thalassemys bruntrutana. Crédit image : Juan Giraldo.

Craspedochelys renzi ne fait pas qu’enrichir les archives paléontologiques. Elle remet aussi en question certaines théories. Jusqu’à présent, les thalassochélydiens étaient supposés limités à l’Europe jurassique.

Pourtant, cette découverte étend leur durée de présence jusqu’au Hauterivien. Elle élargit aussi leur aire géographique jusqu’en Amérique du Sud.

Avec une carapace de 25,5 cm sur 23,1 cm, Craspedochelys renzi possède des traits typiques des plesiochelyidés. Elle présente une structure robuste, un pont osseux solide et aucune fontanelle dorsale à l’âge adulte. Ces caractéristiques indiquent une adaptation poussée au milieu marin.

De plus, les chercheurs supposent que ses membres antérieurs ressemblaient à des nageoires, à l’image de ceux de Thalassemys bruntrutana, une espèce européenne déjà bien connue.

Réexaminer les collections anciennes permet encore des découvertes majeures

Cette redécouverte illustre l’intérêt grandissant pour les collections historiques souvent négligées. Le fossile était là, pourtant mal classé. Sans un examen approfondi, il serait resté anonyme.

En dévoilant Craspedochelys renzi, les chercheurs ne se contentent pas d’ajouter une nouvelle espèce. Ils remodèlent aussi les pistes de l’évolution des tortues marines anciennes.

Cette découverte soulève ainsi une interrogation essentielle : combien d’autres espèces dorment encore dans les réserves des musées, sans que personne ne les remarque ?

Un fossile oublié qui pourrait réécrire l’arbre évolutif des tortues marines

Carapace articulée fossilisée de la tortue marine Craspedochelys renzi avec certains os post-crâniens, vue avec schéma explicatif.
Craspedochelys renzi représentée par une carapace articulée accompagnée de quelques os post-crâniens. Crédit image : Cadena et al., doi: 10.1186/s13358-025-00394-1.

La découverte de Craspedochelys renzi offre une pièce rare à un puzzle scientifique encore incomplet. Les relations évolutives entre les familles de thalassochélydiens, comme les Eurysternidae, Plesiochelyidae et Thalassemydidae, restent floues. Ce spécimen, plus jeune et trouvé hors d’Europe, permet d’élargir la réflexion.

En étudiant cette lignée tardive, les chercheurs espèrent reconstituer plus précisément l’histoire évolutive des tortues marines du Crétacé. Cette percée scientifique rappelle que les découvertes majeures ne viennent pas uniquement des fouilles sur le terrain. En effet, parfois, elles surgissent d’un simple tiroir de musée, oublié depuis des décennies.

Par Eric Rafidiarimanana, le

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