Et si la ruée vers l’intelligence artificielle cachait une bombe à retardement économique ? Deux des figures les plus influentes du numérique, Sam Altman (OpenAI) et Jeff Bezos (Amazon), s’accordent désormais sur un point : le marché de l’IA est en surchauffe.

Une ruée vers l’IA à couper le souffle qui inquiète jusqu’à ses propres créateurs
En 2024, les investissements liés à l’intelligence artificielle ont atteint 109 milliards de dollars selon l’université Stanford. Un record historique. Et en 2025, la machine ne montre aucun signe de ralentissement. Les grandes entreprises comme Amazon, Meta, Microsoft et Google prévoient même 320 milliards de dollars de dépenses sur les infrastructures d’IA.
Ainsi, cette frénésie d’investissement semble inarrêtable, portée par l’idée que l’IA va transformer chaque recoin de l’économie mondiale.
Cependant, cette croissance inquiète les pionniers eux-mêmes. Jeff Bezos parle d’une « bulle industrielle » : les investisseurs se ruent sur tout ce qui touche à l’IA, sans distinguer les projets solides des plus fragiles. De son côté, Sam Altman, le patron d’OpenAI, va plus loin. « Quelqu’un va perdre une somme colossale. On ne sait pas qui, mais beaucoup vont gagner des sommes colossales. » Autrement dit, une partie de poker géante où chacun mise gros, souvent à l’aveugle.
OpenAI, une influence boursière inédite pour une entreprise qui n’est même pas cotée
Ce qui étonne le plus, c’est le poids boursier d’OpenAI, pourtant non cotée en Bourse. Lors d’une simple conférence, l’entreprise a cité quelques sociétés. Leurs actions ont immédiatement bondi. Figma a grimpé de 7,4 %, HubSpot de 2,6 %, et AMD, partenaire d’OpenAI sur les puces IA, a explosé de 24 % en quelques heures. Une telle influence d’une entreprise privée sur les marchés financiers est inédite et, surtout, révélatrice de l’état du secteur.
D’ailleurs, Altman lui-même parle d’une « chose étrange ». Jamais une société non cotée n’avait autant d’impact sans y être présente. En conséquence, cela montre à quel point la perception de l’IA dépasse sa réalité économique. Un signe typique d’un marché en surchauffe où la spéculation remplace peu à peu l’analyse rationnelle.
Des signaux économiques qui rappellent douloureusement la bulle Internet des années 2000
Aujourd’hui, de nombreux experts comparent la situation actuelle à la bulle Internet des années 2000. En effet, le ratio coût/bénéfices des entreprises liées à l’IA serait même plus élevé qu’à l’époque. Les valorisations atteignent des sommets déraisonnables, nourries par la peur de « rater le train de l’IA ».
Cette frénésie rappelle étrangement celle des années 2000, quand on investissait dans n’importe quelle start-up en ligne, sans modèle économique clair.
Pourtant, derrière cette euphorie, la rentabilité reste fragile. Beaucoup de jeunes pousses vivent sur des modèles économiques incertains, tandis que les coûts énergétiques et matériels explosent.
Ainsi, sans revenus solides, certaines pourraient s’effondrer dès la première correction du marché. Bezos redoute d’ailleurs une sélection naturelle brutale entre les « bons acteurs » et les autres. Autrement dit, certains géants d’aujourd’hui pourraient bien ne pas survivre.
Comment canaliser la révolution de l’IA pour éviter qu’elle ne s’effondre sur elle-même
Face à ces excès, Altman et Bezos appellent à une croissance plus lucide. Ils prônent des investissements dans l’infrastructure utile, des serveurs moins énergivores et des modèles d’apprentissage plus efficaces. L’idée : construire une IA durable, pas seulement performante. Repenser la manière de développer cette technologie devient alors essentiel pour éviter les dérives à venir.
De plus, ils demandent plus de transparence et de régulation. L’objectif : empêcher quelques géants de concentrer tout le pouvoir économique et technologique. Enfin, ils invitent à miser sur les usages réels : éducation, santé, environnement, industrie. Les projets utiles survivront mieux que ceux qui surfent sur la mode. Au final, la bulle éclatera peut-être, mais ceux qui auront bâti sur du solide tiendront debout lorsque la poussière retombera.
Par Eric Rafidiarimanana, le
Catégories: Technologie, Robots & IA