Biologiste marine et environnementaliste, Rachel Carson est une pionnière du domaine de l’écologie. Elle a démontré avant tout le monde l’impact néfaste des pesticides sur l’environnement, et parviendra même à faire interdire le DDT aux États-Unis. Avec son livre Printemps silencieux, publié en 1962, elle parviendra à aller à l’encontre de l’idée selon laquelle « la pollution est une conséquence nécessaire du progrès ».
Une jeunesse au plus près de la nature
Rachel Carson nait le 27 mai 1907 à Springdale, en Pennsylvanie, près de Pittsburgh, le long du fleuve Allegheny. Elle s’y prend de passion pour la nature et les étangs. Elle est influencée par sa mère qui lui enseigne la « nature study », mouvement originaire des États-Unis qui s’est déployé vers la fin du 19e et le début du 20e siècle. Ce mouvement souhaitait réconcilier la science avec les expériences spirituelles vécues par chacun en lien avec la nature. C’est de cette enfance très liée au monde naturel et aquatique qu’elle trouvera sa vocation : devenir biologiste marine.
Durant son enfance, elle découvre son autre passion qui est l’écriture : elle publie en effet sa première histoire à 10 ans (elle aimait particulièrement écrire à propos des animaux). Elle étudie l’anglais puis décide de se tourner vers la biologie, à la prestigieuse université Johns-Hopkins, où elle suit un master de zoologie. En parallèle de ses études, elle travaille à la recherche au laboratoire de biologie marine de Cape Cod, et elle écrit dans la revue littéraire et le journal de l’université.
Au service de l’administration américaine
Dans les années 1930, elle écrit, notamment, pour l’US Bureau of Fisheries (département américain des Pêches), qui deviendra en 1940 l’US Fish and Wildlife Service, chargé de la préservation de la faune, ainsi que diverses publications. En 1941, elle rédige son premier livre, Under the Sea, compilation d’articles rédigés au cours des années précédentes. Romance Under the Waters (Poésie sous les eaux) est une suite de textes qu’elle a écrits pour des émissions de radio éducatives, qui sera un succès.
Le combat contre le DDT
Dès 1945, elle mène un combat contre le DDT, puissant pesticide utilisé depuis les années 1930, et contribua à son interdiction. Créé en Suisse, ce produit était, à ses débuts, considéré comme un « produit miracle » contre les insectes destructeurs de plantations, ainsi que ceux vecteurs de maladies telles que le paludisme, le typhus… En 1943, en Italie, une épidémie de typhus explose, l’armée américaine décide de l’éradiquer à l’aide du DDT.
Le DDT a donc pu permettre de sauver des vies sur ce plan, mais au prix d’une destruction de l’environnement, et d’autres types de morts. Utilisé massivement durant les années suivantes, il fait pourtant l’objet, dès 1944, de doutes concernant son efficacité réelle, ou tout du moins sa dangerosité à long terme. Une étude menée par Herbert Calvery, pharmacologue à la Food and Drug Administration, a constaté sur des animaux de laboratoire que le DDT pouvait provoquer, à de faibles doses sur le long terme, des convulsions et des troubles hépatiques pouvant conduire à la mort.
« Printemps silencieux », électrochoc et manifeste écologiste
En 1962, elle publie Printemps silencieux, où elle rapporte que l’utilisation non contrôlée des pesticides peut entrainer la mort des animaux, mais également des humains. Elle mettra en avant le fait que les pesticides affinent la coquille des oeufs d’oiseaux, et empêchent leur bonne reproduction. Ce livre a été le vecteur du mouvement écologiste dans le monde occidental. H. Patricia Hynes, professeure à la Boston University School of Public Health, dira que « Printemps silencieux a changé l’équilibre mondial du pouvoir. Personne depuis n’a été capable de définir la pollution comme la conséquence nécessaire du progrès. »
Ce livre devient une référence parmi les mouvements écologistes naissants, et même le président Kennedy, après avoir lu le livre, exigera de son administration un meilleur contrôle des pesticides. En 1963, elle témoigne devant le Sénat pour demander la limitation de l’usage des pesticides.
En 1964, elle meurt des suites d’un cancer du sein. Bien que son nom soit quelque peu tombé dans l’oubli, son apport à l’écologie ne peut être négligé. Le DDT a été interdit aux États-Unis dans les années 1970, la France et de nombreux autres pays d’Europe et dans le monde suivent. L’interdiction du DDT fait aujourd’hui l’objet de controverses, notamment dans la résurgence de la malaria, ce qui a conduit l’ONU, en 2004, à juger « acceptable » l’utilisation du DDT pour combattre la malaria, transmise par les moustiques.
Rob Little, directeur du WWF (Fonds mondial pour la nature) pour l’Afrique du Sud, ajoute même que « le recours au DDT ne nous plaît pas, mais nous comprenons qu’en l’absence de solution de rechange, il doit être utilisé en quantités très limitées ».
Quoi qu’il en soit, l’héritage de Rachel Carson pour l’écologie ne peut être remis en cause, de même que son influence dans les mouvements naissants de protection de la nature. De son vivant, elle obtint de multiples récompenses, comme le prestigieux National Book Award dans la catégorie documentaire, pour Cette mer qui nous entoure, compilation de ses recherches des années 1940. Le livre reste 32 semaines dans le classement des best-sellers du New York Times. En 1980, à titre posthume, elle reçoit la médaille présidentielle de la Liberté, la plus haute distinction civile américaine.
Pour aller plus loin, découvrez une primatologue de renom, Dian Fossey, qui a consacré sa vie entière à la protection des gorilles.