Durant un mois, Jaggi Vasudev, alias Sadhguru, a effectué un périple de plus de 9 000 km à travers l’Inde afin de sensibiliser ses habitants à l’extrême nécessité d’assainir le Gange, ce fleuve sacré considéré comme le plus pollué au monde, et ses affluents. Une initiative qui s’est avérée payante.
Ces dernières années, l’eau est devenue un enjeu majeur en Inde. Fortement impactés par la pollution, la déforestation, la surexploitation et le changement climatique, ses cours d’eau majeurs tendent à s’assécher et les conséquences pourraient être dramatiques pour les millions d’habitants qui en dépendent.
Le volume des fleuves et cours d’eau indiens était d’environ 5 100 mètres cubes en 1951. Soixante ans plus tard, il n’était plus que de 1 500 mètres cubes et devrait, selon les estimations, frôler les 800 mètres cubes d’ici 2025. Un recul terrible qui impacte non seulement les humains, mais également la faune et la flore du pays.
Secteur vital pour l’économie indienne, l’agriculture en fait évidemment les frais. Affichant un niveau de pollution effarant, le Gange et l’Indus, largement utilisés par les Indiens pour l’irrigation des cultures, font partie des fleuves les plus menacés de la planète, et leur situation dramatique pourrait condamner dans un futur proche de nombreux agriculteurs si rien n’est fait.
LE GANGE ET L’INDUS FIGURENT PARMI LES FLEUVES LES PLUS MENACÉS DE LA PLANÈTE
Selon certaines croyances hindous largement répandues, le Gange serait capable de s’auto-assainir, et de nombreux Indiens restent persuadés que l’eau polluée remonte purifiée à la surface du fleuve sacré. Ainsi, il n’est pas rare de voir des Indiens se baigner dans une eau huileuse chargée de polluants chimiques où flottent toutes sortes de déchets.
Face à cette situation dramatique, le yogi Jaggi Vasudev, plus connu sous le nom de Sadhguru, s’est lancé dans un voyage de plus de 9 000 kilomètres afin de sensibiliser les habitants de son pays à l’extrême nécessité de tout faire pour préserver les cours d’eau indiens.
Fin 2017, Jaggi Vasudev a lancé une campagne nationale afin de revitaliser les fleuves les plus menacés du pays. Cette initiative, baptisée Rally for Rivers et qui a duré un mois, a vu Sadhguru traverser 16 États et tenir pas moins de 146 conférences.
Une initiative qui a porté ses fruits, puisque l’homme a réussi à obtenir le soutien de nombreux gouvernements locaux et nationaux, et à attirer l’attention des médias, des célébrités et d’entreprises majeures du pays.
Selon les estimations, pas moins de 160 millions d’individus ont été sensibilisés aux défis cruciaux auxquels fait actuellement face l’Inde, et le nettoyage de ses principaux fleuves a d’ores et déjà commencé.
Ce mouvement, qualifié de modèle pour l’écologie mondiale, a reçu un large soutien international et a même été présenté aux Nations unies le 22 mars dernier par l’intermédiaire de son porte-parole.
Rally for Rivers propose notamment de planter des arbres le long des berges des cours d’eau du pays afin de les stabiliser et d’empêcher l’érosion des sols. Selon Sadhguru, cela aurait aussi un effet positif sur les niveaux de précipitations et permettrait également d’alimenter les nappes phréatiques.
Toutefois, malgré l’engouement populaire qu’il suscite à travers le pays, ce projet fait l’objet de nombreuses critiques : il ne lutte pas contre les barrages, l’extraction de sable ou la déforestation et n’a de plus aucun impact sur la pollution dont souffrent les cours d’eau.
Le Global Water Policy Project préconise notamment la dilution des eaux afin de faire diminuer la concentration en pollution des cours d’eau, tandis que d’autres organismes évoquent l’inter-connexion des fleuves et de leurs affluents par l’intermédiaire de canaux et de réservoirs afin de permettre une meilleure gestion des réserves d’eau.
LA DILUTION DES EAUX ET L’INTER-CONNEXION DES FLEUVES INDIENS SEMBLENT POUR L’HEURE REPRÉSENTER LA SOLUTION LA PLUS EFFICACE
Si la solution miracle n’a pas encore été trouvée, l’initiative Rally for Rivers a au moins le mérite de sensibiliser les Indiens à cette cause majeure et d’attirer l’attention des pouvoirs publics. Il est d’ailleurs intéressant de rappeler qu’il y a un peu plus d’un an, il avait été proposé d’accorder au Gange et à la Yamuna le statut de personne afin de les préserver en considérant les actes de pollution et de dégradations comme des agressions ou des meurtres, mais cette motion avait été déclarée inapplicable par la Cour suprême de l’Inde.