Apparition de la majorité des organismes multicellulaires, diversification génétique très rapide… Pour les scientifiques, l’explosion cambrienne est une période aussi complexe que fascinante. Un groupe de chercheurs s’est notamment interrogé sur les origines de la pieuvre, une espèce mystérieuse et fabuleuse.
Une origine cosmique de la vie
L’ère cambrienne est une période à la fois complexe et cruciale dans l’Histoire de notre planète. Il s’agit de la première période du Paléozoïque, survenue il y a 541 millions d’années. On parle alors d’explosion cambrienne : soudainement la vie unicellulaire simple passe à la vie multicellulaire complexe, accompagnée d’une diversification génétique rapide (pour les espèces animales, végétales et bactériennes). Jusqu’à présent, les différentes explications faisaient état de changements environnementaux importants (mouvement des continents, augmentation des niveaux d’oxygène…), de changements écologiques (évolution de l’œil, course aux armements) ou génétiques. Donc des explications d’origine terrestre. Récemment, un groupe de scientifiques a émis plusieurs hypothèses sur une origine cosmique de l’explosion cambrienne.
Selon ces chercheurs (généticiens, paléobiologistes, astrobiologistes…), une origine purement terrestre ne peut pas expliquer l’arrivée des métazoaires, ces organismes multicellulaires ainsi qu’une complexité génétique concomitante. D’où le développement de la théorie de la panspermie : cette hypothèse avance l’idée qu’une partie au moins de la vie sur la Terre possède une origine extraterrestre. Les scientifiques ont montré d’ailleurs que des molécules complexes comme l’ARN, l’ADN, des virus ou des bactéries, peuvent survivre à des voyages dans l’espace en étant contenus dans des corps comme les astéroïdes ou les comètes. En bombardant des planètes, ces vecteurs peuvent propager les bases de la vie, voire la vie elle-même dans l’univers, si les conditions sont réunies. Leurs résultats ont été publiés dans la revue Science Direct.
L’étude des stromatolithes canadiennes
C’est en 1974 que les astrophysiciens et astrobiologistes britanniques Chandra Wickramasinghe et Fred Hoyle ont approfondi le modèle de la panspermie pour expliquer certains développements et événements soudains concernant la diversification du vivant. Depuis, leurs recherches ont été reprises afin d’expliquer l’explosion cambrienne. La récente découverte de micro-organismes datés d’environ 4,2 milliards d’années (la Terre a environ 4,6 milliards d’années) dans des stromatolithes canadiennes remet tout en question. Ces structures biogéniques et sédimentaires sont des structures agencées sous forme de couches de sédiments, produites par des archéobactéries.
Si on peut expliquer le développement de tels micro-organismes grâce à la proximité de sources chaudes hydrothermales, cela n’explique pas leur apparition sur la Terre, alors qu’à cette période (l’Hadéen), notre planète était bombardée de météorites et d’astéroïdes. Pas exactement un environnement propice au développement. En Australie, la découverte de zircons datant de la même époque et contenant aussi des micro-organismes, tend à confirmer l’hypothèse de la panspermie. De fait, si les conditions à la surface de la Terre sont trop hostiles pour que la vie ait pu apparaître d’elle-même, alors son origine n’est pas terrestre mais se trouve dans les comètes et les astéroïdes…
Rétrovirus et pieuvres extraterrestres ?
Ces astéroïdes et comètes de l’Hadéen auraient pu apporter avec eux un type particulier de virus, le rétrovirus. Ils sont constitués d’ARN et sont capables de le transcrire en ADN (rétrotranscription) afin de s’intégrer au génome des cellules infectées. Les rétrovirus sont connus pour posséder un important potentiel de modification génétique en s’intercalant dans le génome de la cellule hôte. Transportés au sein de comètes grâce à leur taille nanométrique, ils auraient été à l’abri des rayonnements ionisants et pourraient traverser l’espace. Ainsi, ces virus auraient joué un rôle majeur dans la diversification génétique des espèces lors de l’explosion cambrienne. Cette mutation génétique est notamment observable chez la pieuvre, une espèce de céphalopode étonnante.
Le génome de la pieuvre montre en effet une complexité hors-norme : par comparaison avec le génome de l’Homo sapiens, il contient 33 000 gènes codants supplémentaires. L’histoire des céphalopodes remonte à 500 millions d’années mais possède quelques zones d’ombre. Le cas de la pieuvre interpelle particulièrement du fait de sa sophistication organique : gros cerveau, système nerveux complexe, dispositif oculaire optique dynamique, souplesse des tissus, camouflage instantané… La transformation génétique de la pieuvre est unique et ne se retrouve chez aucun organisme vivant pré-existant : ces gènes pourraient donc être d’origine extraterrestre. Toutes ces évolutions et ces caractéristiques ne peuvent être expliquées par la simple théorie darwiniste, étant donné la soudaineté de leur apparition. D’après les scientifiques, ces gènes particuliers auraient pu être apportés par des comètes ou astéroïdes, via l’ARN des rétrovirus ou directement par des œufs de pieuvres cryopréservés.
Il est important de prendre toutes ces hypothèses scientifiques avec du recul : il faudrait encore beaucoup de recherches pour tenter de prouver cela. Néanmoins, il semble plausible de penser que certains gènes spéciaux puissent avoir une origine extraterrestre. L’origine cosmique de certains gènes offrirait ainsi une explication à certaines caractéristiques génétiques aujourd’hui encore inexpliquées. Cette étude révèle à quel point, nous sommes loin d’avoir percé tous les mystères entourant la création de la vie.
Par Thomas Le Moing, le
Source: Trust my science
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