L’engouement pour l’intelligence artificielle ne s’arrête pas aux voitures autonomes, aux maisons connectées ou aux drones livreurs de médicaments : il touche aussi l’industrie du sexe. L’incontournable magnat des poupées sexuelles Matt McMullen, à la tête d’Abyss Creations, compte bien détourner ces formidables avancées technologiques pour littéralement « donner vie » à ses mannequins en silicone…
Harmony, le sexe 3.0
Présentée à l’orée de l’année 2017 par son concepteur Matt McMullen, Harmony n’est pas une vulgaire poupée sexuelle : c’est LA poupée sexuelle. Équipée d’un vagin auto-lubrifiant détachable que l’on peut nettoyer au lave-vaisselle, quelque part entre 2 tasses de thé, et d’une intelligence artificielle (IA) parfaitement rodée, elle a l’ambition de devenir « la fille dont vous avez toujours rêvé ». Ses capteurs sensitifs reliés à son IA lui permettent de réagir aux mouvements impulsés par son partenaire – enfin… propriétaire – en gesticulant, et en émettant divers sons… Et s’il s’y prend suffisamment bien, elle peut même avoir un orgasme !
Mais Harmony, pour aussi réaliste et plaisante à regarder qu’elle soit, demeure un robot à l’utilisation extrêmement basique : elle ne peut ni marcher, ni disserter sur le sens de la vie – bien qu’elle puisse parler cinéma et littérature – ni faire semblant de s’intéresser à vos problèmes… Malgré ses nombreuses expressions faciales, ses petits clins d’oeil coquins et ses délicieux mouvements de tête, elle n’en demeure pas moins un objet sexuel, destiné à assouvir toute une panoplie de besoins physiques primaires. Une partenaire de choix ultra-personnalisable dont le prix peut varier de 10,000 à 15,000 euros.
La parité selon Realbotix
En début d’année 2018, Matt McMullen, le pape de la poupée sexuelle via RealDoll a révélé au Daily Star Online que son équipe et lui travaillaient actuellement à la fabrication d’un robot sexuel homme, le pendant masculin d’Harmony en quelque sorte. Ce futur Ken, dont le nom officiel reste encore à déterminer, suscite déjà beaucoup d’interrogations à commencer par la plus évidente : à quoi ressemblera son « bazar » comme dirait Zézette ?
Le PDG de Realbotix a précisé qu’il s’agirait d’un pénis bionique « plus efficace qu’un vibromasseur » et capable de durer « aussi longtemps que vous voudrez ». Pour ce qui est de la forme et de la taille de ce mystérieux organe, qui demeure la clé de voûte du projet, Matt McMullen rappelle que cette poupée masculine sera tout aussi personnalisable que sa grande soeur Harmony : il y en aura donc pour tous les goûts. Reste à savoir si l’IA du mannequin pourra contrôler elle-même le pénis bionique afin de satisfaire au mieux les exigences de ses utilisatrices.
Éthique en danger
Le 5 juillet 2017, la Foundation for Responsible Robitics publiait son rapport intitulé : « Our Sexual Future with Robots »; comprenez « Notre avenir sexuel avec les robots ». Au travers de sept questions thématiques, les spécialistes de la Fondation explorent les changements bénéfiques et désastreux que pourraient avoir la démocratisation des robots sexuels dans nos sociétés modernes. Ils pourraient effectivement constituer une solution au problème de la prostitution : plusieurs lupanars d’Asie équipés de poupées sexuelles rencontrent un franc succès auprès de leurs clients, à tel point qu’une maison close européenne a voulu les imiter. Non content de se substituer à ces millions de femmes exploitées sans vergogne, les robots sexuels peuvent aussi venir en aide aux personnes isolées, aux personnes âgées, et aux personnes handicapées qui jusque-là faisaient appel aux services d’assistantes sexuelles.
Si ces robots peuvent potentiellement éradiquer le fléau de la prostitution, ils peuvent aussi s’utiliser à des fins beaucoup moins louables… Par exemple pour assouvir des comportements déviants interdits par la loi. Laura Bates s’était déjà émue, dans les colonnes du New York Times, de l’utilisation détournée de Frigid Farrah, une personnalité interactive disponible pour le robot Roxxxy de la marque TrueCompanion : certains propriétaires s’en étaient servis pour littéralement « violer » leur robot… Le recours aux robots sexuels pour empêcher le passage à l’acte et la récidive des violeurs et des pédophiles est une option qui divise la communauté scientifique : si une partie des spécialistes pensent que les robots peuvent canaliser les pulsions de ces criminels en puissance, l’autre partie reste persuadée qu’autoriser ces pratiques illicites et hors-la-loi reviendrait à les encourager publiquement, les rendant de facto plus acceptables aux yeux de nombreux citoyens…
Le marché des robots sexuels en est encore à ses prémices que déjà Realbotix, True Companion et Doll Sweet comptent bien s’imposer comme les leaders du secteur. La démocratisation de ces sex-toys futuristes risque de complètement bouleverser notre rapport à la sexualité, déjà très tourmenté par l’industrie pornographique, et notre conception des relations amoureuses, certains de ces objets sexuels étant apparemment déjà doués de sentiments…
Par Matthieu Garcia, le
Source: IFL Science
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