Et si les océans cachaient encore des comportements que l’on pensait impossibles ? Une récente observation remet tout en question : orques et dauphins unissant leurs forces pour chasser. Un phénomène rare, coordonné, qui dévoile une intelligence collective inattendue chez ces super-prédateurs marins.

Une chasse commune entre orques et dauphins observée pour la première fois au large du Canada
En août 2020, des chercheurs observent un phénomène inédit au large de l’île de Vancouver : des orques et des dauphins qui plongent ensemble pour chasser le saumon Chinook. Cette synchronisation, jamais documentée auparavant, intrigue par son niveau de précision et de coordination.
Les orques, réputées pour leur spécialisation sur ce saumon imposant, suivent de près les dauphins, plus généralistes. Malgré leurs différences de régime alimentaire, les deux espèces semblent ici converger vers une stratégie commune de chasse, unies dans un ballet sous-marin parfaitement réglé.
À chaque descente, les cétacés adaptent leurs mouvements, ajustent leurs trajectoires et plongent côte à côte sans conflit visible. Cette tolérance inhabituelle entre deux super-prédateurs marins rompt avec les schémas classiques de compétition observés jusque-là dans le monde des cétacés.
Les dauphins guident les orques grâce à leur écholocalisation, dans une tactique de chasse partagée
Ce qui rend cette alliance d’autant plus fascinante, c’est l’usage croisé de l’écholocalisation. Les dauphins, maîtres dans l’art de repérer les poissons grâce à leurs clics ultrasoniques, semblaient agir comme de véritables « éclaireurs » acoustiques pour les orques. Ces dernières, capables d’entendre ces signaux, réduisaient alors leurs propres émissions sonores, comme si elles écoutaient discrètement leurs partenaires improvisés.
En présence des dauphins, les orques plongeaient plus profondément et couvraient de plus grandes distances, comme si la collaboration leur permettait de mieux cibler les zones riches en saumons. Cette utilisation conjointe de leurs capacités suggère une véritable complémentarité tactique.

Une coopération sans agressivité ni rivalité entre deux super-prédateurs marins
Certains sceptiques ont d’abord avancé l’idée d’un kleptoparasitisme : les dauphins profiteraient simplement des efforts de chasse des orques. Mais les vidéos aériennes et sous-marines racontent une autre histoire. On y voit des dauphins actifs, en recherche de proies, plongeant avec une précision qui semble guidée, voire guidante. Les orques, elles, tolèrent leur présence, même au moment crucial du partage des morceaux de saumon.
Dans un environnement aussi compétitif que l’océan, cette absence d’hostilité est remarquable. C’est comme si une forme de pacte non verbal s’était instaurée entre les deux espèces, reposant sur un avantage mutuel immédiat : efficacité accrue pour les orques, accès à une nourriture de qualité pour les dauphins.
Une adaptation remarquable face à la raréfaction du saumon Chinook dans le Pacifique Nord
Au-delà de la surprise, cette découverte pourrait bien traduire une adaptation comportementale face à la crise écologique. Le saumon Chinook se raréfie, victime de la surpêche et du réchauffement des eaux. Les orques résidentes, qui en dépendent presque exclusivement, doivent trouver des solutions.
S’associer à des dauphins plus mobiles, capables de localiser rapidement les proies, pourrait être une stratégie d’avenir. Quant aux dauphins, nager avec un prédateur redouté comme l’orque leur offre une protection indirecte contre d’autres menaces, notamment les orques transientes, friandes de petits cétacés.
Ce type de coopération reste rare dans le règne animal, mais il illustre à quel point les comportements peuvent évoluer sous pression. Les cétacés, loin d’être de simples prédateurs instinctifs, démontrent ici une intelligence sociale et adaptative qui mérite d’être observée de plus près.
Par Eric Rafidiarimanana, le
Source: science-et-vie.com
Étiquettes: orques, Dauphins, intelligence animale, chasse coopérative
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