Bracelets, peignes, sculptures… Face au commerce toujours en oeuvre d’objets en ivoire, l’ONG Avaaz a décidé d’agir en procédant à l’analyse de 109 objets en ivoire vendus dans toute l’Union Européenne. Le résultat est édifiant : 75 % de ces objets sont illégaux.
Une majorité de produits en ivoire illégaux en Europe
Ce n’est pas un secret, l’éléphant fait partie des espèces animales protégées du fait de leur nombre de plus en plus faible. La raison principale : le braconnage des pachydermes pour récupérer leurs défenses en ivoire. Au nom d’un commerce lucratif mais pas très légal, on tue des centaines d’éléphants en Afrique et en Asie. Sans surprise, l’Europe est l’un des marchés les plus actifs concernant le commerce de l’ivoire. Face à ce constat, l’Organisation Non Gouvernementale (ONG) Avaaz a décidé d’agir. Quatre mois après avoir présenté une pétition (signée par 32 dirigeants africains) pour l’interdiction totale d’ivoire sur le vieux continent, l’ONG met un peu plus la pression sur Bruxelles et l’Union Européenne.
Leur dernier coup de force : la publication d’une étude affirmant que la grande majorité de l’or blanc vendu au sein de l’UE est illégale. Pour cela, Avaaz s’est procuré 109 objets sculptés en ivoire et vendus dans 10 pays différents de l’Union. Ils ont transmis les objets à l’Université d’Oxford pour obtenir une datation au carbone 14. Le résultat est sans appel : 75 % d’entre eux sont hors la loi. Pour mieux comprendre, rappelons que la législation européenne autorise la vente sans restriction des objets travaillés dans de l’ivoire acquis avant 1947 et impose un certificat gouvernemental pour de l’ivoire acquis entre 1947 et 1990. En revanche, il est interdit de proposer des produits taillés dans un matériau prélevé après cette date. Pour Avaaz, l’autorisation partielle de la vente en Europe « offre une faille au commerce illégal que les défenseurs des éléphants ont longtemps dénoncé« .
Une étude qui fait l’effet d’un choc
Sur les 109 produits testés, seuls 28 respectent les règles. Parmi les 81 restants, 60 sont vendus sans les certificats qui devraient leur être associés et 21 autres ont été fabriqués dans de l’ivoire acquis après 1990. Dans le détail des pays vendeurs d’ivoire dans l’UE, tous ne sont pas au même niveau. Le Royaume-Uni fait figure de bon élève avec des ventes d’objets en ivoire légales à 80 %. En revanche, les autres pays sont bien plus concernés par le commerce illégal. Le taux de légalité tombe à 43 et 44 % en Belgique et en Allemagne et s’effondre à 17 et 15 % au Portugal et en France. En Espagne, en Italie et en Bulgarie, la totalité des articles ne respecte pas les lois européennes… L’ONG ironise sur le sujet dans un communiqué : « La Commission européenne avait déclaré qu’aucune preuve ne permettait d’affirmer que de l’ivoire illégal était vendu en Europe« .
De façon claire et précise, Avaaz appelle l’UE à « mettre un terme à la faille permettant un commerce dérégulé de l’ivoire pré-1947, à arrêter ses exportations d’ivoire et son commerce d’ivoire brut« . Cette étude a fait l’effet d’une bombe en Europe et pourrait avoir des retombées positives. D’après Bert Wander, le directeur de campagne d’Avaaz, « cette étude choc apporte la preuve imparable que de l’ivoire illégal est vendu dans toute l’Europe. Elle doit conduire à l’arrêt définitif de ce commerce sanglant. Chaque jour où ces babioles continuent d’être vendues nous rapproche de la disparition définitive des majestueux éléphants« . Sur Twitter, les réactions ne se sont pas faites attendre, comme celle de Karmenu Vella, commissaire européen à l’environnement, aux affaires maritimes et à la pêche. « Cette étude montre à quel point des acteurs négligents et sans scrupule font passer de l’ivoire prélevé après 1990 pour des antiquités« . Il annonce d’ailleurs une rencontre avec Avaaz pour évoquer ce sujet.
Selon le « Great Elephant Census », 30 % de la population d’éléphants d’Afrique a disparu entre 2007 et 2014 (environ 144 000 individus). Néanmoins, l’interdiction du commerce de l’ivoire se diffuse. La Chine et Hong-Kong (premier marché mondial) ont annoncé des mesures dans ce sens en 2017 et les Etats-Unis avaient annoncé une interdiction quasi-totale en 2016 (depuis Trump a autorisé l’importation de trophées d’éléphants en provenance de Zambie et du Zimbabwe).
Par Thomas Le Moing, le
Source: Les Echos
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