On pense que les trous noirs supermassifs se développent lentement, en aspirant la matière environnante pendant des milliards d’années. Mais si tel est le cas, comment expliquer leur présence précoce au sein de l’Univers ? Des chercheurs américains ont une nouvelle théorie.
Un scénario alternatif
Possédant des masses des millions, voire des milliards, de fois supérieures à celle du Soleil, les trous noirs supermassifs se cachent au cœur de la plupart des galaxies. Actuellement, la théorie la plus largement acceptée concernant leur formation implique l’effondrement de poches de gaz primordial, donnant naissance à des « graines » de trous noirs plus petits, se développant durant des milliards d’années en fusionnant avec d’autres trous noirs, en avalant les astres proches ou en absorbant la matière environnante (poussière, gaz…).
Toutefois, de récentes découvertes ont remis en question cette hypothèse. Un nombre croissant de trous noirs supermassifs ont en effet été observés dans l’Univers lointain, ce qui indique qu’ils étaient déjà bien établis au cours des premières centaines de millions d’années ayant suivi le Big Bang. Soit un laps de temps insuffisant pour leur permettre d’atteindre une telle taille, selon le modèle dominant.
Les astronomes ont donc envisagé d’autres scénarios. En mars dernier, il avait ainsi été suggéré que les premiers trous noirs supermassifs auraient pu être créés après que des étoiles primordiales colossales, de plusieurs dizaines de milliers de masses solaires, soient devenues des supernovas.
Dans le cadre de travaux publiés dans la revue Astrophysical Journal Letters, des chercheurs de l’université de Californie à Riverside (UCR) ont proposé une nouvelle théorie impliquant la matière noire, substance mystérieuse qui constituerait la majeure partie de la matière de l’Univers et qui maintiendrait les galaxies ensemble grâce à sa force gravitationnelle.
Des halos particulièrement denses de matière noire
Selon la pensée classique, la matière noire se regrouperait naturellement en halos au sein de l’Univers. La nouvelle théorie des chercheurs de l’UCR suggère que dans certaines circonstances, ces halos de matière noire pourraient devenir suffisamment denses pour s’effondrer sous l’effet de leur propre gravité et former un trou noir.
Pour qu’un tel phénomène se produise, la matière noire devrait interagir avec elle-même. Si tel était le cas, les chercheurs affirment que le halo rétrécirait en s’effondrant et créerait une viscosité ralentissant sa rotation. Ce qui finirait par engendrer une graine de trou noir, qui pourrait à son tour se développer assez rapidement en se nourrissant de la matière ordinaire environnante, comme la poussière et le gaz.
« L’avantage de notre scénario est que la masse de la graine de trou noir peut être élevée puisqu’elle est produite par l’effondrement d’un halo de matière noire », explique Hai-Bo Yu, chercheur principal de l’étude. « Ainsi, il peut se transformer en un trou noir supermassif sur une échelle de temps relativement réduite. »
Davantage d’observations nécessaires
Si la matière noire en auto-interaction représente une explication assez commode pour les trous noirs supermassifs à croissance rapide, elle comporte quelques limites. La plus importante étant que le modèle le plus largement accepté affirme que la matière noire n’interagit pas avec elle-même.
Toutefois, il s’avère que plusieurs autres modèles autorisent ce type d’interaction. Par conséquent, de futures observations pourraient venir étayer ou, au contraire, fragiliser cette nouvelle théorie intrigante.
Par Yann Contegat, le
Source: New Atlas
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