Amateur de jeux vidéo, vous avez certainement testé des jeux de guerre. Soldats, terroristes, opposants ou dirigeants, ils vous plongent dans différents rôles pour prendre part au conflit. Et si, pour une fois, vous n’incarniez pas un soldat mais un survivant ? Dans This War of Mine, c’est dans la peau d’un civil que vous tenterez dans subsister et de sauver un groupe d’hommes et de femmes qui ne demandent rien de plus que de vivre. SooGeek vous éclaire sur ce jeu d’un nouveau genre.
Loin des habituels Medal of Honor, Total War ou Modern Combat, This War of Mine apporte un aspect réaliste au jeu vidéo : éloignant le cliché du héros hollywoodien, cette création du développeur polonais 11 bit studios part du simple postulat que « à la guerre, tout le monde n’est pas un soldat ». Simple et efficace, ce jeu sorti à la fin de l’année 2014, nous plonge au cœur de la guerre, loin du front et des soldats, là où l’héroïsme est une affaire de tous les jours. Dans une ville détruite par le conflit, dévastée par les bombardements et attaques incessantes, le joueur prend la tête d’un groupe de civils qui attendent la fin des combats en faisant au mieux pour survivre et s’entraider.
Ne pouvant sortir que la nuit, les personnages attendent toute la journée la dispersion des snipers nichés au quatre coins de la ville. C’est donc au coucher du soleil que nos héros reprennent possession des rues, cherchant de la nourriture, des outils en tout genre, en bref, de quoi survivre. La journée, ils s’occupent tant bien que mal, se reposant, préparant à manger ou guettant le moindre signe de maladie chez leurs congénères. Constamment affligés par la peur, ils doivent se méfier de chaque rencontre ou bruit suspect, un rien pouvant leur coûter la vie.
Acclamé par la critique et les joueurs dès sa sortie, le jeu fut, après avoir été proposé sur PC, décliné sur PS4 Xbox, Android et iPhone pour le plus grand plaisir des joueurs de consoles et de smartphones. Ajoutant à la première version une extension nommée « The little one », proposant plus de personnages enfants, le jeu apporte beaucoup plus de réalisme au gamer qui se voit sans arrêt confronté à des choix moraux, de plus en plus difficiles. Lors de la présentation du jeu, son concepteur Pawel Szyszka avait, à ce propos, déclaré « La guerre traite tout le monde de la même manière, que vous soyez un enfant ou un adulte ».
Une vérité, certes, mais qui mettra vos émotions à rude épreuve lorsque le jeu vous demandera tout simplement de choisir à qui donner de la nourriture entre un enfant fatigué et un congénère blessé. Le média vidéoludique permet, bien évidemment, de garder une certaine distance avec les personnages mais ces derniers ayant été créés sur la base des familles des développeurs, il vous faudra faire preuve d’une certaine réflexion pour ne pas être touché par la mort d’un de vos héros. Les testeurs du jeu ont vu leurs collègues mourir à de nombreuses reprises en finalisant leur création et c’est donc avec une certaine émotion qu’ils l’ont présenté aux joueurs lors de sa sortie.
L’émotion, c’est ce qui ressort le plus de This War of Mine : sans cela, le jeu resterait un simple jeu de gestion au défilement horizontal mais ses influences et inspirations historiques (le siège de Sarajevo ou encore le soulèvement du ghetto de Varsovie) en font une expérience incontournable.
Comme pourrait l’être une situation réelle, il n’y a pas réellement d’histoire dans This War of Mine : ce sont vos actions qui décideront des évènements futurs et tout comme dans la vie, des situations gênantes vous sauteront au visage et il vous faudra y faire face sans quoi vos personnages en pâtiront. Le gameplay précis ne permet aucune erreur et se divise en deux phases : la première, comme expliqué précédemment, se passe de jour et c’est à vous d’organiser au mieux la survie des personnages. Si le minimum de survie est toujours à faire, il est aussi possible d’apporter un peu de confort aux héros : une petite distillerie leur apportera un peu de réconfort, au même titre qu’une serre pour profiter d’aliments frais et enfin, il est possible de fabriquer des armes. Attention toutefois, chacune de ces actions constitue un luxe et les décisions ont toujours des conséquences. Ainsi, en choisissant de sacrifier votre journée à l’amélioration d’armes, vous perdrez du temps à la production de nourriture.
Les petits plaisirs sont aussi à prendre en compte : le rôle du joueur étant de surveiller le mental de ses personnages, il doit prendre en compte qu’un héros fumeur aura plus de chances de garder son calme en situation stressante s’il arrive à se procurer, de temps en temps, une cigarette. Une attention particulière doit être portée aux différentes caractéristiques des personnages : là où une institutrice sera plus apte à réconforter les civils attristés, une journaliste pourra plus facilement négocier le prix des munitions, échangées contre vos réserves de nourriture.
La seconde phase a lieu la nuit, lors de vos expéditions périlleuses dans les rues de la ville. Avant de quitter l’immeuble, il vous faudra décider qui doit absolument se reposer, lequel de vos personnages sera de garde pour surveiller le bâtiment et enfin, lequel partira en quête de nourriture, armes et médicaments à l’extérieur. Ce dernier point peut se révéler périlleux : partir armé pour se protéger d’éventuels assaillants peut vous alourdir et prendre de la place dans le sac à dos de votre personnage qui, logiquement, ne pourra pas rapporter autant de biens qu’il l’espérait.
Enfin, l’un des points les plus intéressants de ce jeu est son utilisation de l’éthique. De fait, il ne vous est pas possible d’agir comme bon vous semble : tous les moyens ne sont pas bons pour arriver à vos fins. Vous en prendre à un innocent impactera obligatoirement sur le moral du groupe rendant leurs actions collectives plus difficiles à accomplir. Rester droit face à l’adversité rajoutera une difficulté supplémentaire mais vous donnera un coup de pouce pour tenter de sauver vos personnages.
Très loin de l’aspect héroïque et romantique des jeux de guerre habituels, This War of Mine vous pousse à la réflexion en vous plongeant dans l’horreur du conflit, son quotidien et le ressenti de ses victimes. Impossible de ne pas être touché par cette création polonaise qui ne laisse personne indemne, rendant impossible la survie de tous ses personnages. Une œuvre politique et sociale qui nous rappelle que partout dans le monde, des centaines de personnes meurent chaque jour de guerres qu’ils ne font que subir.