
Né en 1900, Henry, un crocodile du Nil, vient de fêter ses 124 ans en Afrique du Sud. Il aurait engendré près de 10 000 descendants, un record biologique et symbolique qui fascine autant qu’il interroge.
Un crocodile centenaire au parcours unique entre Botswana et Crocworld
C’est au Crocworld Conservation Centre, à Scottburgh, en Afrique du Sud, qu’Henry vit désormais ses vieux jours. Né en décembre 1900 dans le delta du fleuve Okavango, au Botswana, ce crocodile du Nil a passé 80 ans dans la nature avant d’être transféré au centre. Aujourd’hui, il mesure 5 mètres et pèse 710 kg, ce qui en fait le plus gros animal du parc.
Selon les spécialistes, un âge pareil est difficile à concevoir pour un reptile. « Un âge de 124 ans est inconcevable pour un crocodile », commente le biologiste Steven Austad, spécialiste du vieillissement animal à l’université d’Alabama. Cependant, les données convergent vers cette estimation, même si la date exacte reste incertaine.
Depuis son arrivée à Crocworld, Henry se serait accouplé avec six femelles différentes.
Résultat : environ 10 000 descendants en moins de 40 ans. Par conséquent, il serait non seulement le doyen des crocodiles captifs, mais aussi l’un des plus prolifiques.
La captivité : un facteur clé dans la longévité animale ?
Bien que très âgé, Henry n’est pas seul. Il partage son enclos avec Colgate, un crocodile de 90 ans, deuxième plus gros spécimen du centre. Ensemble, ils incarnent une hypothèse biologique appuyée par plusieurs études : la captivité augmente la longévité chez de nombreuses espèces.
En effet, comme l’indique le CNRS, la vie en captivité protège les animaux des principaux dangers naturels : famine, prédateurs, conditions climatiques extrêmes, mais aussi compétition entre individus. Ainsi, les animaux peuvent vivre plus longtemps, surtout les petits mammifères soumis à de fortes pressions dans la nature.
Cependant, cette longévité accrue n’est pas une règle universelle. Chez certains grands mammifères comme les éléphants ou les primates, la durée de vie peut rester équivalente ou même inférieure à celle en milieu sauvage.
Par ailleurs, une étude de la National Library of Medicine suggère que les crocodiles possèdent un microbiome intestinal particulier. Leurs métabolites joueraient un rôle important dans leur résistance biologique et leur longévité.
Un symbole vivant, rare et fascinant
Henry, à la fois mythe vivant et curiosité scientifique, soulève des questions sur notre compréhension du vieillissement animal. De plus, il devient un ambassadeur malgré lui de la cohabitation entre l’Homme et les espèces sauvages en milieu contrôlé.
Sa longévité exceptionnelle, alliée à sa fécondité hors normes, illustre ce que la captivité peut offrir de mieux — mais aussi ses limites. Car si la sécurité favorise l’espérance de vie, elle ne garantit pas forcément le bien-être ou l’épanouissement biologique.