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Pourquoi utiliser l’IA pour organiser ses vacances est un désastre assuré

Les itinéraires générés par IA fonctionnent mieux comme sources d’inspiration que comme plans d’action

Une femme utilise son smartphone sur la plage
— Kite_rin / Shutterstock.com

Avec la montée en puissance des outils d’intelligence artificielle, planifier ses voyages n’a jamais semblé aussi simple. En quelques clics, des applications proposent des itinéraires sur mesure, des activités « incontournables » et même des conseils pratiques pour ne rien manquer. Pourtant, derrière cette apparente efficacité se cache un risque grandissant : celui de voir ses vacances tourner au désastre. Entre lieux inventés, horaires inexacts et recommandations absurdes, de plus en plus de voyageurs témoignent d’expériences déconcertantes.

Quand l’IA invente des destinations imaginaires

Lorsque deux touristes au Pérou ont présenté leur programme de randonnée à Miguel Angel Gongora Meza, un guide expérimenté, celui-ci n’en croyait pas ses yeux. Ils étaient excités à l’idée de découvrir le « canyon sacré de Humantay ». Seulement, ce lieu n’existe tout simplement pas.

« Ils m’ont montré une capture d’écran remplie de descriptions évocatrices et convaincantes, mais tout était faux », raconte Gongora Meza à la BBC. « Il n’y a pas de canyon sacré de Humantay. Le nom mélange deux endroits réels, mais qui n’ont aucun lien avec la description. » Le couple avait déjà dépensé près de 160 dollars pour se retrouver sur une route isolée, sans guide, et sans véritable destination.

Une telle erreur aurait pu avoir des conséquences graves. Dans les Andes péruviennes, où les conditions peuvent être extrêmes, se perdre peut être fatal. « Ce genre de désinformation est risqué ici, au Pérou. À 4 000 mètres d’altitude, sans réseau téléphonique et avec un oxygène limité, une destination imaginaire peut littéralement être fatale », prévient le guide.

Des « hallucinations » aux conséquences très concrètes

Les outils d’intelligence artificielle générative, comme ChatGPT, Microsoft Copilot ou Google Gemini, séduisent de plus en plus de voyageurs. Une enquête récente révèle qu’un tiers des touristes internationaux les utilisent déjà. Des applications dédiées, telles que Wonderplan ou Layla, promettent des itinéraires optimisés, conçus comme des équations mathématiques. Mais ces systèmes ne comprennent pas réellement la géographie ou les subtilités logistiques. Dana Yao en a fait l’expérience au Japon. ChatGPT lui avait assuré que le dernier téléphérique du mont Misen descendait à 17h30. En réalité, il était fermé bien avant. « Nous avons fini coincés au sommet de la montagne », raconte-t-elle à la BBC.

Certaines erreurs prêtent à sourire, comme lorsque Layla a affirmé qu’il existait une tour Eiffel à Pékin. Mais d’autres ont des conséquences plus fâcheuses : des attractions suggérées juste avant leur fermeture, des randonnées dites « courtes » qui s’étendent sur des kilomètres, ou des itinéraires irréalistes, comme celui mentionné par le Huffington Post, où l’IA avait omis un trajet en hélicoptère indispensable en Alaska, tout en ignorant les contraintes physiques des voyageurs fatigués par 24 heures sans sommeil.

Parfois, l’IA échoue sur des détails essentiels. Judy Gauthier, de Go City, raconte que l’IA avait recommandé une visite à Laurel Falls, dans les Smoky Mountains, avant qu’elle ne découvre, via Facebook, que le sentier était fermé depuis 18 mois. Une autre fois, en demandant s’il était possible de se baigner à Saint-Sébastien, en Espagne, l’IA l’a mise en garde contre des attaques de requins… confondant la plage avec l’aquarium de la ville.

Pourquoi l’IA échoue à planifier des voyages

Ces erreurs s’expliquent par le fonctionnement des modèles linguistiques. « L’IA ne fait pas la différence entre des conseils de voyage, des itinéraires ou des recettes », explique Rayid Ghani, professeur d’apprentissage automatique à Carnegie Mellon. « Elle manipule des mots sans véritable compréhension. Elle génère un texte qui semble crédible, mais qui peut être complètement faux. »

Planifier un voyage est particulièrement complexe. Horaires de transport, conditions météo, événements locaux : tout évolue constamment. Le Dr Niusha Shafiabady, spécialiste en intelligence computationnelle, souligne que « la disponibilité des vols, les prix, la météo et le trafic changent en temps réel, ce qui rend difficile pour l’IA de rester à jour ». Même avec des données précises, l’IA a du mal. Des recherches montrent que le modèle le plus avancé d’OpenAI échoue dans 90 % des cas lorsqu’il s’agit de planifier des voyages complexes.

Jay Stevens, PDG de Wayfairer Travel, a testé ChatGPT pour organiser un séjour au ski au Japon. Bien que l’IA lui ait recommandé des onsens (sources chaudes) magnifiques, elle n’a pas pris en compte les horaires des bus, qui ne correspondaient pas à la réalité. Il raconte : « À 11 h 11, il neigeait, j’étais trempé et je commençais à avoir froid. » Il a finalement dû prendre un taxi, réalisant les limites de l’IA dans des contextes logistiques complexes.

L’importance du facteur humain

Les agents de voyage humains tiennent compte de nombreux détails, comme les horaires de sécurité dans les aéroports, les jours fériés locaux, ou encore les préférences familiales pour éviter les trajets inutiles. Le consultant en voyages Nolan Burris résume bien la situation : « L’IA est excellente pour trouver des idées, mais lui confier à 100 % la planification d’un voyage est un pari risqué. »

Les itinéraires générés par l’IA sont plus utiles comme sources d’inspiration que comme plans définitifs. Les experts conseillent de vérifier chaque recommandation : consultez les horaires sur les sites officiels, confirmez les informations sur des groupes locaux ou utilisez Google Maps pour les distances. Prévoir un peu de marge est également essentiel.

En fin de compte, l’IA ne peut pas défier les lois de la physique. Elle pourra vous proposer de finir la visite d’un musée juste avant l’heure de départ de votre avion, mais elle ne pourra pas vous téléporter à temps à la porte d’embarquement. Ces outils numériques ressemblent davantage à des stagiaires enthousiastes qu’à des experts en voyages. Ils peuvent fournir des idées intéressantes, mais c’est à vous de distinguer ce qui est réalisable de ce qui relève du pur fantasme. Par ailleurs, voici comment se terminera une guerre entre l’intelligence artificielle et l’humanité.

Par Eric Rafidiarimanana, le

Source: ZME Science

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