De récentes recherches ont montré qu’environ 10 000 ans avant que les humains modernes ne s’établissent massivement en Europe, un petit groupe avait occupé une grotte du sud de la France, fraîchement abandonnée par des Néandertaliens, pendant une quarantaine d’années.
Des datations révélatrices
Située sur le flanc d’une colline drômoise surplombant la vallée du Rhône, la grotte Mandrin est étudiée par les chercheurs depuis plusieurs décennies. Les fouilles y ayant été réalisées ont jusqu’à présent permis la mise au jour de près de 60 000 artefacts en pierre, 70 000 restes d’animaux ainsi que neuf dents d’hominines, provenant d’au moins sept individus différents. Dans le cadre de travaux publiés dans la revue Science Advances, une équipe de chercheurs français a utilisé différentes techniques de datation afin d’en apprendre davantage sur les anciens occupants du site.
Si les premiers habitants connus étaient les Néandertaliens, ayant vécu à Mandrin il y a 80 000 à 54 000 ans environ, il s’est avéré que l’une des dents (en l’occurrence une dent de lait) découverte dans la grotte appartenait à un humain moderne. Cette dernière se trouvait dans une couche de sédiments vieille de 56 800 à 51 700 ans, renfermant également des objets en pierre très différents de ceux associés aux Néandertaliens.
Dans les couches plus récentes, l’équipe a de nouveau trouvé des restes de Néandertaliens. Les signes indiquant que la grotte était utilisée par des humains modernes sont réapparus après 44 100 ans, correspondant globalement à la période où ces derniers ont commencé à s’établir massivement en Europe.
L’examen de fragments de suie, sur lesquels s’étaient formées des couches de calcite pouvant être datées avec précision, a révélé qu’il ne s’était pas écoulé plus d’un an entre le dernier feu allumé par les Néandertaliens et le premier attribué à Homo sapiens, et que les humains modernes n’avaient occupé la grotte Mandrin que durant une quarantaine d’années.
Une colonisation progressive de l’Europe par Homo sapiens
De tels résultats mettent en évidence le caractère très progressif de la colonisation de l’Europe par les humains modernes, ayant impliqué plusieurs tentatives à l’échelle de milliers, voire de de dizaines de milliers d’années ainsi que la complexité du processus de dispersion et de contact.
S’il est possible qu’ils se soient simplement établis ailleurs, l’absence d’échanges génétiques pourrait également expliquer la disparition du petit groupe d’Homo sapiens de la grotte Mandrin au bout de quelques décennies.
« Plutôt qu’une seule vague d’humains modernes arrivant en Europe et remplaçant les Néandertaliens [s’étant éteints il y a environ 40 000 ans], il y a eu des occupations alternées de régions géographiques ainsi que des contacts occasionnels », commente Katerina Harvati, de l’université de Tübingen. « La coexistence des deux groupes aurait pu prendre de nombreuses formes et ne se serait pas nécessairement traduite par un métissage ou un échange culturel. »
Par Yann Contegat, le
Source: New Scientist
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