Depuis la fin du 18e siècle, des centaines de marins ont affirmé avoir aperçu le Hollandais Volant, le plus célèbre des vaisseaux fantômes dont l’apparition était signe de mauvais augure. Mais derrière sa légende se cache en réalité un phénomène physique qui n’a rien de surnaturel.
UN MYTHE TENACE
Pendant près de 250 ans, les témoignages au sujet de l’apparition du mystérieux navire fantôme se sont multipliés. Il faut remonter à la fin des années 1700 pour découvrir les origines de ce mythe né à la suite d’un terrible naufrage s’étant produit au large du cap de Bonne-Espérance.
À l’époque, la plupart des navires européens utilisent cette route commerciale incontournable pour rallier l’Asie, et l’un d’entre eux va connaître un sort particulièrement funeste.
Le navire du capitaine Hendrick van der Decken, surnommé le Hollandais, revient des Indes orientales les cales chargées d’épices, de soie et de teintures qui se vendront à prix d’or à Amsterdam.
Lorsque son navire franchit le cap de Bonne-Espérance, une tempête s’abat soudainement. Son équipage le supplie de faire demi-tour, mais van der Decken, probablement ivre, ne veut rien entendre et leur ordonne de continuer malgré les risques évidents de naufrage.
Sans surprise, le navire finit par sombrer au fond des eaux sud-africaines, et c’est ainsi que nait la malédiction du Hollandais Volant.
En 1798, le poème de Samuel Taylor Coleridge intitulé Rime of the Ancient Mariner s’inspire de l’histoire du capitaine Bernard Fokke qui a navigué pour le compte de la Compagnie des Indes orientales.
Capable de rallier l’Indonésie depuis Amsterdam en seulement trois mois, ce dernier fait l’objet de nombreuses spéculations, et de nombreux marins prétendent qu’il aurait échangé son âme contre cette vitesse surnaturelle à l’occasion d’une partie de dés avec le diable.
LE CAPITAINE FOKKE AURAIT VENDU SON ÂME AU DIABLE POUR RALLIER L’INDONÉSIE EN UN TEMPS RECORD
Mais c’est en 1843 que le Hollandais Volant va définitivement entrer dans la légende, grâce à l’opéra du même nom composé par Richard Wagner. Celui-ci nous conte les aventures d’un vaisseau maudit pour avoir osé braver la tempête et dont l’équipage est condamné à parcourir éternellement les mers de la planète.
https://www.youtube.com/watch?v=GpaFP7CEe3M
Le 11 juillet 1881, le Prince George (qui deviendra plus tard le roi George V) et son frère ainé affirment avoir assisté à l’apparition du mystérieux Hollandais Volant alors qu’ils naviguaient au large des côtes australiennes à bord du HMS Bacchante.
Lorsque le Bacchante s’approche de la zone où le navire fantôme a été aperçu, il n y a aucune trace du Hollandais Volant, alors que le temps est clair et la visibilité excellente. Quelques instants plus tard, l’homme d’équipage qui avait repéré le navire maudit tombe mystérieusement du haut du mât, ce qui ne fait que renforcer les convictions de l’équipage.
En 1939, des habitants de Cape Town en Afrique du Sud prétendent avoir observé un imposant navire fendant les flots avant qu’il ne se volatilise soudainement, et l’équipage d’un sous-marin allemand affirme quelques années plus tard avoir croisé sa route près du canal de Suez.
Toutes ces observations ont en réalité une explication parfaitement rationnelle. Connu sous le nom de Fata Morgana, ce phénomène optique se produit lorsqu’une couche d’air chaud recouvre une couche d’air froid. Les rayons de soleil passant au travers sont déviés, et les objets reflétés paraissent alors beaucoup plus imposants.
Dans le cas des apparitions du Hollandais Volant, les marins observaient en réalité la représentation déformée de navires se trouvant au-delà de la ligne d’horizon, et ces visions fantomatiques étaient produites par la déviation des rayons du soleil qui suivaient la courbure de la Terre. Un phénomène qui explique pourquoi les bateaux aperçus se volatilisaient mystérieusement lorsque l’équipage arrivait sur les lieux.
LES MARINS OBSERVAIENT LA REPRÉSENTATION DÉFORMÉE DE NAVIRES SE TROUVANT AU-DELÀ DE LA LIGNE D’HORIZON
À une époque où il était impossible d’expliquer la manifestation de certains phénomènes physiques de manière rationnelle, les légendes et les mythes constituaient souvent le meilleur recours pour les justifier, et on comprend aisément qu’au cours des siècles passés ce type de mirages ait pu jouer des tours à de nombreux marins superstitieux, probablement éreintés et diminués par de longues semaines passées en mer.