Parmi les scientifiques étudiant le domaine de l’électricité, deux noms aux techniques et concepts diamétralement opposés se démarquent du lot : Thomas Edison et Nikola Tesla. Si le premier était un fervent adepte du courant continu (DC : direct continu), le second prônait l’utilisation du courant alternatif (AC : alternating current). Tous les deux ont marqué de leurs empreintes l’histoire de l’électricité à partir de la fin du XIXe siècle.
Thomas Edison : Un autodidacte et un homme d’affaires
Historiquement connu pour avoir posé les soubassements des systèmes des émetteurs téléphoniques et des imageries animées, Edison reste célèbre pour sa lampe à incandescence. Ce dernier voyait dans l’éclairage électrique un marché lucratif face aux lampes à gaz largement dominantes à ses débuts. En 1978, l’ingénieur américain se lançait corps et âme dans ses recherches pour aboutir à un résultat probant.
A cause de son manque de connaissances, malgré toute une équipe dernière lui, Edison se heurtait à de nombreuses difficultés. Néanmoins, il croyait dur comme fer à sa future invention et au final, il s’était aperçu que l’élément crucial qu’il lui fallait se trouvait là, sous ses yeux. Le noir de carbone qu’il utilisait sur ses émetteurs téléphoniques était la pièce maîtresse de son dispositif. Grâce à cet élément, il pouvait intégrer un filament très résistant dans son ampoule à vide.
Suite à la phase d’expérimentation en octobre 1979, Edison avait présenté, la veille du Nouvel An, sa lampe à incandescence dans son laboratoire de Menlo Park. Autant dire que le public était plus que conquis par son invention. Il en avait donc profité pour mettre en place son système électrique en DC basé sur le modèle du système d’éclairage au gaz. Etant un vrai businessman, l’ingénieur avait placé sa station centrale dans le Lower Manhattan en 1882. Il faisait donc d’une pierre deux coups car Wall Street lui ouvrait les portes aux financiers et le New York Times lui donnait accès aux médias.
Nikola Tesla : Un ingénieur marginal hors pair
Contrairement à Thomas Edison, Nikola Tesla (d’origine serbe) accordait plus d’importance à la compréhension de l’électricité qu’à la manière d’en faire du profit. De surcroît, il était plus un mathématicien doublé d’un physicien que d’un expérimentateur autodidacte comme l’ingénieur américain. Ses études à l’école polytechnique de Graz lui avaient permis de devenir un brillant ingénieur. C’est notamment en ces lieux qu’il a développé son premier moteur électrique. Nikola Tesla se démarquait par son charisme mais surtout par sa mémoire eidétique. Il avait plus de facilités que les autres à visualiser les objets complexes en 3D. Sans besoin de maquettes, l’ingénieur pouvait réaliser des inventions opérationnelles.
Ses aptitudes intellectuelles lui avaient permis de gravir les échelons sans trop de difficultés. De 1881 à 1884, Tesla était passé du poste d’ingénieur en chef de la compagnie téléphonique de Budapest à chargé de projet d’installation électrique au Continental Edison à Paris. En cours de route, précisément en 1882, il avait réalisé un moteur à induction utilisant le courant alternatif. Il commençait alors à prôner la performance du AC par rapport au DC.
Son dur labeur lui avait permis d’attirer l’attention de Charles Batchelor, le directeur du Continental Edison. Ce dernier, pourtant un fervent défenseur du DC, avait recommandé le jeune ingénieur à Thomas Edison vu que personne n’était emballé par son invention en Europe. Dans la foulée, il avait intégré l’Edison Machine Works à New York en juin 1884 où il avait essuyé son premier revers de la médaille.
Le début de la guerre des courants
Selon National Geographic, initialement, l’ingénieur américain avait été embauché par Tesla pour l’aider à améliorer son système électrique défectueux à New York. Ce dernier lui avait alors suggéré d’utiliser l’AC pour plus d’efficacité et à moindre coût. L’adoption d’un système basé sur le courant alternatif remettait cependant en cause tout ce qu’il avait entrepris. De plus, la mise en place d’une telle infrastructure électrique nécessitait une connaissance approfondie dont Edison ne disposait pas contrairement à Tesla. Ce dernier étant reconnu pour être un bourreau du travail, l’ingénieur américain avait utilisé cela à son avantage.
Edison avait promis à Tesla 50 000 dollars s’il parvenait à améliorer ses dynamos. Sans surprise, le brillant ingénieur s’était mis à peaufiner le mécanisme durant des mois pour arriver au résultat escompté. Malheureusement, l’ingénieur américain n’avait pour but que de le faire tourner en rond en arguant à la fin qu’il ne faisait que plaisanter. En colère et revanchard, Tesla avait créé sa propre entreprise, Tesla Electric Light Company, afin de promouvoir son moteur à courant alternatif.
Face à des expérimentations infructueuses, Tesla était obligé de démissionner de sa propre société à cause de la pression de ses bailleurs de fonds. Le brillant ingénieur s’était ainsi retrouvé à la rue sans un sou en poche vu qu’il avait investi toutes ses économies dans son ancienne entreprise. Fort heureusement, Charles F. Peck et Alfred S. Brown, qui s’étaient enrichis à la bourse de Wall Street, étaient venus à sa rescousse. Ils voyaient en Tesla un investissement prolifique pour l’avenir. En 1886, ce dernier pouvait librement s’adonner à ses expérimentations dans un laboratoire au New Jersey.
George Westinghouse : Un allié de taille pour Tesla
Toujours obsédé par son désir de vengeance, Tesla avait dépeint un piètre tableau de son ennemi juré. En parallèle, il travaillait jour et nuit pour mettre au point son moteur à courant électrique. Tandis qu’il arrivait à ses fins, ses investisseurs cherchaient un moyen judicieux pour promouvoir son invention. La solution idéale était de s’appuyer sur ses brevets des moteurs à AC et du courant alternatif mutliphasé qui pouvait transmettre de l’énergie longue distance. En 1888, ses recherches étaient enfin couronnées de succès et c’est ainsi qu’entra en jeu George Westinghouse.
George Westinghouse, un ingénieur et entrepreneur américain, avait enfin son fer de lance pour concurrencer efficacement Edison Electric Light Company. Le moteur à courant alternatif intégrait parfaitement son système de climatisation nécessaire au transport et à la distribution de l’électricité. Contrairement à l’infrastructure coûteuse d’Edison qui devait se cantonner aux grandes villes, Westinghouse pouvait s’attaquer à un marché encore inexploité. Avec son système de climatisation révolutionnaire, qui pouvait transmettre de l’énergie longue distance, il pouvait desservir de l’électricité dans les endroits reculés.
Acculé, au pied du mur, face au succès grandissant de ses rivaux, Edison avait adopté des stratégies peu recommandables. Les coups bas commençaient alors à pleuvoir à l’instar des rumeurs de décès des monteurs de lignes causé par l’installation des systèmes de climatisation. L’AC génère en effet une tension plus élevée que le DC, ce qui présente un risque mortel. Edison enchaînait par la suite en embauchant Harold P. Brown. Ce dernier était un ingénieur chargé de dévoiler au grand jour les risques encourus en utilisant le courant alternatif. Sous l’investissement d’Edison, Brown avait inventé la chaise électrique alimentée en AC. Il procédait ainsi en 1890, dans l’Etat de New York, à la mort par électrocution du meurtrier William Kemmler.
Le coup de massue de Tesla
Edison s’était tiré une balle dans le pied en finançant la chaise électrique de Brown. Kemmler n’était pas en effet mort à la première électrocution. Un journaliste, qui avait assisté à l’exécution, rapportait que c’était un vrai massacre pire que la pendaison. Tesla voulait ainsi enfoncer le clou. Grâce à son ingéniosité et à son éloquence, il avait convaincu les financiers de Wall Street d’investir dans une gigantesque centrale hydroélectrique aux chutes du Niagara. En 1896, l’énergie produite en courant alternatif permettait ainsi de desservir en électricité une grande partie de l’Etat de New York.
La mauvaise plaisanterie d’Edison à Tesla sur le sujet d’une récompense de 50 000 dollars avait eu des conséquences désastreuses sur son entreprise. N’empêche que le courant continu demeure toujours très exploité de nos jours. De son côté, Tesla s’était perdu de vue dans les limbes de l’histoire, à cause d’une fin peu glorieuse. Sa technologie du courant alternatif multiphasé reste néanmoins en vogue. De plus, 60 ans après sa mort, tel un phœnix, il renait de ses cendres en tant que célèbre marque de voiture.
Je pense qu’il y a erreur sur le siècle… Edison a commencé en 1878 (et non 1978) 🙂