Le Found Footage est un sous-genre cinématographique dans lequel une partie ou la totalité d’une fiction est présentée comme un enregistrement retrouvé. Ces scènes sont généralement tournées par des protagonistes de l’histoire, accompagnant l’image d’un commentaire instantané, ce qui apporte un côté plus authentique à l’action et touche ainsi plus simplement le spectateur. Ce cinéma est caractérisé par un effet tremblant de l’image, un jeu d’acteur sobre et naturel et des scènes crues et directes.
Le principe n’est pas nouveau et prend d’ailleurs racine dans la littérature et plus précisément le roman épistolaire. Cette technique narrative employée depuis l’Antiquité, sous forme de correspondance fictive ou non entre plusieurs personnages, s’apparente bien au Found Footage puisqu’il offre une part plus intime dans ces histoires qui ne nous étaient pas adressées. Les Liaisons dangereuses, Frankenstein, Dracula ou encore L’Appel de Cthulhu sont des exemples célèbres de ce genre littéraire.
Si les origines cinématographiques du Found Footage prennent racine dans des travaux expérimentaux des années 60, c’est bien Cannibal Holocaust en 1980 qui restera dans les mémoires comme l’un des premiers Found Footage Movies. Il faudra néanmoins attendre Le Projet Blair Witch, en 1999, pour populariser le genre et ouvrir la voie à une déferlante de productions.
En effet, le contexte social s’ouvrant à internet et sa multitude de vidéos maison va soutenir la tendance des productions amateurs à laquelle se prête parfaitement le Found Footage. Ainsi, de parfaits inconnus vont épauler leur caméra DV pour réaliser leur petit film d’horreur, à l’image d’Oren Peli qui réalisera Paranormal Activity en 2009 avec un budget de 13 500 $ et cumulant 193 millions de dollars de recettes.
Il n’en fallait pas plus pour convaincre les grands studios de s’intéresser à la production de Found Footage Movies. En plus de pouvoir facilement surfer sur cette vague grâce à leur réseau et leur visibilité, ces films moins dispendieux, comparés aux standards de l’époque, présentent un faible risque commercial et un retour sur investissement potentiel énorme.
Plus que le côté pratique et économique, ce qui nous intéresse est la portée cinématographique. En effet, puisque la caméra fait partie de la diégèse, la réalité du film, le 4e mur, censé séparer la scène de son public, se retrouve brisé. Les personnages se savent donc regardés, a posteriori et à travers la caméra, ce qui donne à l’objectif un rôle au cœur même du récit et modifie en profondeur sa structure.
Le personnage de la caméra ainsi mis en avant va être protégé physiquement par les protagonistes qui doivent trouver, pour les besoins du film, une raison de continuer à tourner, peu importe les conditions. Le côté amateur et parfois désinvolte offre à l’objectif des scènes présentant peu d’intérêt, où il ne se passe pas grand-chose, puisque le principe même est de produire un contenu qui n’est, dans la diégèse du film, pas censé être spectaculaire.
Voilà une des contraintes proposées par le Found Footage Movie. Produire un récit complet, logique, à travers des images dont l’existence est justifiée par l’histoire, qui sont suffisamment intéressantes pour constituer un film, et suffisamment peu spectaculaires pour rester crédibles. Le risque du réalisateur est de tomber dans la surenchère en proposant des scènes peu plausibles qui n’auraient aucune chance de se dérouler dans les conditions initiées par l’histoire. Un peu comme si vous filmiez l’herbe de votre jardin en train de pousser et que, soudainement, un vaisseau extraterrestre venait s’y poser.
Dans Paranormal Activity, la caméra est laissée allumée sur un trépied pendant la nuit afin de filmer le sommeil des protagonistes. La mécanique est intéressante puisque ce parti pris oblige le réalisateur à produire une image rendant compte sans artifice de la réalité de l’œuvre. Plan fixe, image nette, pas de tremblement, pas de mouvement. La conséquence sera de longues minutes où il ne se passe absolument rien. Entre crédibilité et ennui, il faut savoir doser, et c’est ce qu’a réussi Oren Peli.
Autre conséquence de l’intégration de la caméra à la diégèse de l’œuvre, les paramètres de la scène ne peuvent pas tous être contrôlés par celui qui filme. Les conditions météorologiques, la qualité du matériel ou le manque de contrôle sur les événements enregistrés justifient ainsi l’absence de plans nets, détaillés, explicites et offrent la possibilité d’y camoufler les éléments moteurs de l’histoire, un monstre par exemple.
C’est donc un contenu plus suggéré où le surnaturel peut être seulement entendu, ou pris dans un flou de mouvement, au lieu d’avoir un gros plan travaillé. On va donc retrouver la plupart du temps un effet de caméra tremblant, un cadrage plus qu’approximatif et des artefacts dans l’image comme une perte de signal, un mauvais focus, une surexposition ou une altération de la bande VHS magnétique. Une façon de personnifier l’objet caméra qui réagit en fonction des événements.
Tous ces outils favorisent alors le cinéma d’horreur qui s’en est donné à cœur joie. Cependant, d’autres genres sont également concernés par le Found Footage comme la comédie avec par exemple Babysitting et Project X, la science-fiction avec Chronicle, Projet Almanac et Europa Report, ou encore le drame avec Exhibit A et Zero Day.
Vif, nerveux, brutal et réaliste, le dispositif ingénieux mais rigide du Found Footage ampute au réalisateur la technique pour mieux lui permettre de la dépasser et transcender son style. Ne nous leurrons pas, ce genre reste très risqué, en témoigne la quantité astronomique de productions oubliables et oubliées parmi les centaines de productions recensées.
Peu chers et offrant un intérêt technique certain, les Found Footage Movies pullulent depuis le début des années 2000. Une vague de films façon maison qui ne méritent pas tous notre attention mais ont le mérite de prendre le contrepied du cinéma classique. Ce sous-genre cinématographique ne nous a pas encore tout dévoilé et promet encore de belles surprises pour l’avenir.