L’Amazonie brûle, et le point de non-retour est plus proche qu’on ne le pensait : un rapport du Peterson Institute, un groupe indépendant étudiant les problématiques économiques mondiales, basé à Washington D.C., indique qu’à ce rythme de déforestation, la forêt amazonienne sera condamnée en 2021.
L’Amazonie, fondamentale à notre planète, est gravement menacée
L’Amazonie couvre 60 % de la superficie du Brésil, accueille 18 millions d’habitants, dont de nombreuses populations autochtones, et constitue la plus grande forêt tropicale du monde : elle abrite 20 % des espèces, faune et flore, de la planète. Mais depuis les années 70, 800 000 km2 sont partis en fumée pour les besoins du développement économique : bois, agriculture, mine, routes, barrages et spéculation foncière.
Les conséquences sont diverses : la déforestation menace les écosystèmes et les populations locales, enraye les processus de production d’oxygène, de séquestration du carbone et de régulation de la température. Cette étude indique que les arbres de la forêt amazonienne capturent de 60 à 80 milliards de tonnes de carbone. La destruction de la forêt pourrait induire le rejet de 200 millions de tonnes de carbone dans l’atmosphère, ce qui précipite le changement climatique, fatal à la forêt.
Des nouvelles politiques qui annulent les efforts en faveur de l’environnement
Cette étude fait le point sur les faits, ainsi que ce qui doit être entrepris au-delà des logiques politiques, car l’urgence est réelle. Monica De Bolle explique que si le réchauffement climatique est considéré comme responsable, à raison, des feux de forêts, les feux en Amazonie sont dus à des « échecs de politiques gouvernementales à travers les années ». Ceux-ci sont provoqués par des « fermiers, propriétaires de bétail et autres tous les ans pour libérer du terrain, mais leur nombre et leur gravité ont augmenté en 2019 ». Jair Bolsonaro, le nouveau président brésilien depuis janvier 2019, est naturellement impliqué, en tenant à respecter ses promesses de campagne sur l’allègement des normes environnementales, sanitaires, et celles sur l’exploitation des terres.
En 2004, le président Lula avait permis le lancement d’un plan d’action dans le contrôle de la déforestation : celle-ci avait été fortement réduite entre 2004 et 2014, notamment par une surveillance accrue de son avancée par satellite, menant à des pénalités pour les responsables. Celle-ci avait repris dès 2015-2016, ce que De Bolle attribue à la période de récession du pays, menant à des coupes de budget, donc une gestion des terres forestières plus difficile. Ce qui alarme particulièrement aujourd’hui est le fait que Bolsonaro tienne à défaire les politiques environnementales montées par les gouvernements précédents, pour le seul intérêt économique que peuvent engendrer l’élevage, la culture de soja et d’huile végétale, etc. Ainsi, en août 2019, la déforestation suivant la saison des pluies était 222 % supérieure à celle de 2018. Bolsonaro, sous le feu des critiques venant du monde entier, accusait d’ailleurs les ONG pour les milliers de départs de feu.
Ces prédictions ne sont pas admises par tous : si la communauté s’accorde à définir un vrai moment de bascule à 20 % de déforestation de la superficie totale (la forêt amazonienne en est aujourd’hui à 17 %), d’autres spécialistes du climat, comme Carlos Nobre, ne voient pas le point de bascule si tôt, mais plutôt dans 15-20 ans. Si De Bolle avait appelé ses prédictions une « provocation » visant à une prise de décision immédiate, Nobre commentait : « J’espère qu’elle a tort. Si elle a raison, c’est la fin du monde. » Les prévisions peuvent varier, notamment dans la prise en compte du réchauffement climatique qui s’accélère.
Quelles solutions ?
De Bolle préconise une coopération internationale dans la protection de ces ressources : elle suggère que l’Amérique rejoigne les accords de Paris, et immédiatement établisse un plan d’action commun avec le Brésil, afin de préserver et restaurer la forêt tropicale. De même, que le Brésil agisse rapidement sur le plan politique, stoppe l’exploitation illégale des ressources forestières et protège les populations indigènes : des alternatives économiques pourraient être envisagées, comme l’exploitation d’hévéa, ou la culture des noix, afin que la forêt et son action soient conservées. De plus, la protection des forêts engendrerait des millions d’emplois — selon De Bolle, 200 emplois pour 1000 hectares de forêt, ce qui mène à des chiffres très conséquents au vu de l’engagement du Brésil, lors des accords de Paris, d’en restaurer 12 millions d’hectares.
Le rapport conseille également de rétablir l’Amazon Fund, un dispositif REDD+ de donations internationales afin de préserver les forêts. Jusqu’ici, ce dispositif REDD+ est surtout resté une coquille vide. Quoi qu’il en soit, il est impératif pour les dirigeants du monde entier de passer au-delà des dissensions politiques afin de suivre une action concrète, car l’urgence est réelle :
« Si les feux en Amazonie doivent être condamnés, il est temps pour la communauté internationale de laisser de côté ses griefs justifiés contre l’administration Bolsonaro, et de coopérer sur une stratégie pour fournir les ressources nécessaires à la conservation et au développement de la plus grande forêt tropicale unie de la planète. »
Par Victor Chevet, le
Source: The Guardian
Étiquettes: foret-amazonienne, Bolsonaro, déforestation
Catégories: Actualités, Écologie
La plupart des pays ont détruits en majorité leurs forêts.
Et l’Amazonie ne pourrait pas le faire pour les siennes ?
Quels sont les connards qui ont décidés ça ?