S’étant étalée sur quatorze ans, une analyse high-tech du plus célèbre tableau de Léonard de Vinci suggère que le maître italien a créé le tableau à partir d’une esquisse préparatoire dont les chercheurs ignoraient jusqu’alors l’existence.
1 650 images analysées
Grâce à l’analyse multispectrale, l’ingénieur français Pascal Cotte a pu mettre en évidence les faibles traces d’un sous-dessin au fusain, renvoyant à la technique du spolvero, dans laquelle l’artiste pratique de minuscules incisions le long des contours du dessin préparatoire et utilise ensuite de la poussière de fusain pour transférer ce dernier sur la toile. Présentée dans le Journal of Cultural Heritage, cette découverte a impliqué l’analyse de quelque 1 650 images issues de scans photographiques de la Joconde réalisés en 2004.
Grâce à son dispositif Lumiere Technology, caméra multispectrale à très haute résolution s’appuyant sur la « méthode d’amplification des couches » pionnière de Cotte, l’ingénieur a été en mesure de détecter la lumière réfléchie sur 13 longueurs d’onde. Ce qui lui a permis de mettre en évidence les lignes de fusain sous-jacentes dans les zones plus claires du tableau via la combinaison de photographie proche infrarouge et de la réflectographie infrarouge, qui avaient précédemment permis de rendre visibles à l’œil nu les détails cachés sous la surface d’un tableau.
« Le système optique nous permet de visualiser des détails très fins et la haute sensibilité permet une très forte amplification du signal faible », explique le scientifique. « Le spolvero sur le front et sur la main trahit un sous-dessin complet. »
Une œuvre possiblement allégorique
C’est la première fois qu’un spolvero est repéré dans le célèbre tableau, ce qui soulève la possibilité fascinante qu’un dessin sur papier de la Joconde réalisé par Léonard de Vinci existe encore, et que la pose adoptée soit légèrement différente. Le sous-dessin mis en évidence par Cotte montrant que l’artiste avait apporté des ajustements à la composition finale.
Le papier suggère par ailleurs que l’esquisse préparatoire a peut-être été utilisée afin de créer d’autres copies du tableau, notamment la version visible au musée du Prado, à Madrid.
Les travaux de Cotte ont également révélé d’autres détails jusqu’alors inédits, comme ce qui semble être une épingle à cheveux juste au-dessus de la tête de la Joconde – quelque chose qui n’aurait pas été à la mode à Florence au moment de la création du tableau. Selon Cotte, cet objet suggère que le tableau n’était pas un portrait, mais une œuvre allégorique, ou la représentation d’une « femme irréelle, comme une déesse ».
Par Yann Contegat, le
Source: Artnet
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