Les croisières sont de plus en plus populaires et à mesure que ce secteur devient le plus dynamique de l’industrie du tourisme, les paquebots, quant à eux, deviennent de plus en plus grands. Mais à quel prix ? Ces véritables villes flottantes sont de véritables dangers pour l’environnement et pour la santé de milliers d’individus. Rendez-vous compte : la pollution provoquée par le transport maritime, dans son ensemble, entraîne la mort de 50 000 morts prématurées chaque année en Europe. SooCurious vous en dit plus.
Alors que les 6780 passagers et 2100 membres d’équipage présents à bord du gargantuesque paquebot « Harmony of the Seas » disaient au revoir aux côtes de Southampton en Angleterre ce dimanche 22 mai 2016, de nombreux habitants de la ville ont été heureux de voir le navire quitter le port. Et pour cause : ces derniers se plaignaient de la pollution atmosphérique provoquée par ce véritable mastodonte marin.
L’Harmony of the Seas
Il faut dire que l’Harmony of the Seas, qui appartient à la compagnie Royal Caribbean, possède six moteurs diesel Wärtsilä qui brûleraient plus de 5212 litres de carburant par heure, soit environ 250 000 litres de carburant par jour. Et pas n’importe quel carburant, puisqu’il s’agit de l’un des plus polluants au monde. Lorsqu’il est à quai ou près des côtes, l’Harmony est censé brûler moins de carburant et utiliser des technologies de remplacement, mais ces mesures ne sont pas suffisantes, comme le rapporte Colic MacQueen, un homme vivant à 350 mètres des quais du port de Southampton :
« On peut sentir, voir et même « goûter » la pollution créée par les paquebots. Ces navires sont de véritables villes flottantes. Parfois, il peut y en avoir 5 accostés sur les quais au même moment. Le vent souffle sur la pollution qu’ils génèrent, et l’amène directement dans la ville. Si les paquebots en eux-mêmes polluent déjà énormément, la pollution due au trafic routier que génèrent ces derniers est également monstrueuse. »
Le port de Southampton
La compagnie Royal Caribbean, qui est la propriétaire de l’Harmony of the Seas, a néanmoins déclaré que les systèmes de contrôle de pollution les plus récents et les plus efficaces étaient utilisés sur le navire, avant d’ajouter que ce dernier correspondait à toutes les exigences légales. Aussi, la Cruise Lines International Association (CLIA) a déclaré que les compagnies avaient « largement investi dans le développement de nouvelles technologies permettant de réduire les émissions atmosphériques de leurs navires au cours de la dernière décennie ».
Des déclarations qui se veulent rassurantes mais qui ne sont néanmoins pas suffisantes lorsque l’on observe les rapports des analyses de population maritime qui ont été effectués en Allemagne et à Bruxelles. D’après ces dernières, un paquebot tel que l’Harmony of the Seas brûlerait au minimum 150 tonnes de carburant par jour et émettrait ainsi plus de soufre que plusieurs millions de voitures, plus de dioxyde d’azote que le trafic routier d’une ville de taille moyenne, et plus d’émissions de particules que des milliers de bus londoniens. De plus, Axel Friedrich, un analyste allemand spécialisé dans la pollution, a rapporté qu’un bateau de croisière émettrait à lui seul environ 5 tonnes d’oxyde d’azote et 450 kilos de particules fines par jour.
Bill Hemmins, un expert maritime vivant à Bruxelles a quant à lui déclaré : « Ces navires brûlent autant de carburant que des villes entières. Ils utilisent beaucoup plus d’énergie que les porte-conteneurs et même lorsqu’ils utilisent un carburant à faible teneur en soufre, celui-ci demeure 100 fois pire que le diesel routier. »
Daniel Rieger, un officier de l’ONG allemande NABU ajoute : « Les compagnies de croisière donnent une image propre et soucieuse de l’environnement. Mais c’est faux. Un seul paquebot émet autant de polluants que 5 millions de voitures parcourant la même distance. En outre, le fioul lourd que ces navires utilisent peut contenir jusqu’à 3500 fois plus de soufre que le diesel utilisé par les véhicules terrestres. De plus, ils ne disposent pas de technologies de réduction d’échappement, comme des filtres à particules qui sont désormais des standards sur les voitures et les camions. »
Daniel Rieger
Southampton, qui accueille le deuxième plus grand port de porte-conteneurs de Grande-Bretagne et le terminal le plus fréquenté d’Europe, est l’une des neuf villes britanniques citées par l’Organisation mondiale de la santé comme violant les directives de qualité de l’air.
Chris Hinds, le vice-président du groupe de surveillance des quais de Southampton, déclare ainsi : « La pollution émanant du port provoque de l’asthme et est responsable de nombreuses autres maladies respiratoires. » D’ailleurs, la pollution provoquée par l’ensemble des navires serait responsable de plus de 50 000 morts prématurées chaque année en Europe. Pourtant, et malgré tous ces témoignages et rapports alarmants, l’industrie des croisières ne cesse de se développer : en 2016, on attend 24 millions de passagers, contre 15 millions en 2006 et seulement 1,4 million en 1980.
La pollution provoquée par les paquebots et l’industrie des croisières est tout simplement alarmante, tant pour l’environnement que pour la santé de nombreuses personnes. A la rédaction, nous sommes choqués par ces chiffres et nous espérons que des mesures seront prises très prochainement pour contrôler davantage cette monstrueuse pollution, surtout lorsque l’on sait que plus de 3 millions de personnes meurent chaque année à cause de la pollution.
Par Joana Pimenta, le
Source: The Guardian
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Catégories: Actualités, Écologie