Aujourd’hui en France, les migrants sont souvent associés à l’injustice et à la misère. Pourtant, une récente étude montre qu’il ne faut pas faire de généralités. Bien que trop souvent assignés à des métiers durs ou même parfois ingrats, ils sont pour la plupart titulaires d’un diplôme, à tel point que certains migrants sont plus diplômés que la population française en général.
Cette étude est le fruit du travail de Mathieu Ichou, chercheur à l’Institut national d’études démographiques. Intitulée « Le niveau d’instruction des immigrés : varié et souvent plus élevé que dans les pays d’origine », l’analyse révèle que 37 % des immigrés nés en Roumanie et vivant en France possèdent un diplôme de l’enseignement supérieur, comme 43 % des Chinois, 35 % des Vietnamiens ou 32 % des Polonais, tandis que 27 % de la population générale adulte de France dispose d’un grade universitaire, tout comme les diplômés de l’université de la population sénégalaise. Toutefois certaines diasporas comme les Tunisiens (21 %), Marocains (19 %) et Algériens (18 %) affichent un léger retard.
Cette étude est épaulée par les analyses de la démographe Anne Goujou, de l’Institut de démographie de Vienne, qui s’est penchée sur les arrivées plus récentes de réfugiés sur le territoire autrichien en 2015. Selon elle, 27 % des Syriens arrivés dans ce pays sont diplômés du supérieur, contre 10 % de ceux qui sont restés en Syrie. De même, 11 % des Afghans ayant rejoint l’Autriche sont titulaires d’un diplôme, alors que seulement 3 % d’entre eux sont restés dans leur pays d’origine. Ainsi, « la plupart des discours sur les migrations ne sont pas de l’ordre du rationnel mais de l’idéologique », souligne Mathieu Ichou.
Ces résultats prouvent que l’immigration a bien changé ces dernières années, et que ces flux migratoires dépendent d’un triple capital : économique, social et intellectuel. « Contrairement à ce que l’on croit a priori, les migrants maliens qui arrivent [en Europe] sont souvent issus des classes moyennes ou supérieures de leur pays » précise Mathieu Ichou, avant de poursuivre « pour quitter l’Afrique, il faut désormais bénéficier d’un certain niveau de capital économique, social et intellectuel […] le taux de diplômés du supérieur est bien moindre sur le continent africain qu’en France ».
Le chercheur s’est également intéressé à une autre catégorie de migrants, celle des « très peu diplômés », dont les flux s’estompent peu à peu sous le feu des difficultés croissantes de la migration. Si ces groupes sont quasi inexistants sur l’ensemble de la population française (de l’ordre de 1 %), il s’élève tout de même à 19 % chez les immigrés Marocains, 17 % chez les Sénégalais et 15 % chez les Turcs. Rappelons qu’une grande partie des immigrés, que leur pays soit guerre ou non, sont en situation de détresse, et que l’aide des plus favorisés est nécessaire, voire primordiale.
Par Tom Savigny, le
Source: Le Monde
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