Et si la véritable bête du fond des mers était plus stratège que sanguinaire ? Depuis Les Dents de la mer, le Grand requin blanc cristallise nos peurs. Pourtant, dans les profondeurs, il joue souvent le rôle de proie. Et pas face à un monstre hollywoodien, mais à un animal que l’on trouve attendrissant… et qui mérite pleinement son surnom de baleine tueuse.
L’orque, seul prédateur capable de faire fuir le Grand requin blanc
Le Grand requin blanc fuit dès qu’une orque approche. Les scientifiques l’ont prouvé : après une attaque d’orques, les requins désertent totalement la zone. Pourquoi ? Parce que Orcinus orca, mammifère marin ultra-social, organise ses chasses en groupe avec une efficacité redoutable.
Contrairement à ce que l’on croit souvent, l’orque ne se contente pas de bonds spectaculaires en bassin. En mer, c’est un prédateur stratégique, au sommet de la chaîne. Ainsi, lorsqu’une bande cible un jeune Grand requin blanc, celui-ci n’a quasiment aucune chance. En Afrique du Sud, par exemple, des orques ont déjà forcé toute une population de requins blancs à disparaître d’un territoire entier.
Une intelligence de chasse digne des meilleurs stratèges
Leur méthode est diaboliquement efficace : les orques renversent leur proie sur le dos, provoquant une paralysie totale. Même un requin de plusieurs mètres devient inoffensif.
Ce comportement n’est pas instinctif. Bien au contraire, les orques l’apprennent les unes des autres, le perfectionnent, puis le transmettent aux jeunes. C’est une véritable culture de chasse. Certaines se spécialisent même selon les proies disponibles, comme des chasseurs professionnels avec leurs techniques bien rodées.
De plus, au Mexique, des orques sans lien avec les groupes sud-africains utilisent pourtant la même stratégie. Ce phénomène prouve que l’intelligence sociale de ces cétacés pousse à l’émergence de tactiques similaires à des milliers de kilomètres de distance. Bluffant, non ?
Elles ciblent un organe précis : le foie ultra-énergétique
Les orques n’attaquent pas par instinct sanguinaire. Leur objectif est clair : le foie du requin. Gorgé de graisse, cet organe représente jusqu’à 25 % de la masse corporelle du squale. Il constitue une réserve énergétique parfaite.
Autrement dit, les orques ne chassent pas au hasard. Elles retournent leur victime, ouvrent l’abdomen, prélèvent le foie, puis repartent sans toucher au reste. Ce niveau de précision révèle une optimisation extrême de leur effort de chasse.
En novembre 2025, des chercheurs ont documenté ce comportement au large du Mexique, dans la revue Frontiers in Marine Science. Ce groupe, pourtant distinct des orques sud-africaines, applique la même méthode. Ainsi, ce comportement n’est pas isolé, mais bien répandu et transmis.
Depuis 1975, on craint le mauvais prédateur
Finalement, cette histoire nous rappelle une chose essentielle : aucune espèce n’est intouchable. Le mythe du requin blanc tueur d’hommes repose sur une peur mal fondée. Dans l’océan, ceux qui survivent sont les plus malins, pas les plus gros.
Le Grand requin blanc reste un prédateur redoutable. Pourtant, il devient une proie face à la coordination et l’intelligence sociale de l’orque. Un bel exemple d’adaptation et de transmission, où la force brute s’incline devant la ruse collective.
Alors, peut-être faut-il revoir notre façon de raconter les monstres marins. Car celui qui a terrorisé des générations de nageurs s’avère moins dangereux que prévu, tandis qu’un autre, bien plus discret, règne sans partage grâce à la puissance du collectif.
Par Eric Rafidiarimanana, le
Catégories: Sciences, Animaux & Végétaux