Le 27 février, l’ONG Sea Sheperd publiait sur les réseaux sociaux une vidéo choc : « Comment la France extermine ses dauphins. » Les massacres de cétacés ne sont donc pas l’apanage des îles Feroé et du Japon, la France est directement concernée.
Un nombre record
L’ONG Sea Sheperd travaille sur la protection des mers et des océans depuis 1977 ; quatre décennies passées à lutter contre la pollution maritime, la surpêche, et la chasse à la baleine. Son dernier combat en date : le lancement de l’opération « Dolphin ByCatch », destinée à alerter internautes et pouvoirs publics sur l’odieux massacre de cétacés qui se déroule chaque année au large des côtes françaises.
Les estimations de l’ONG écologiste sont effarantes : près de 6 000 à 10 000 dauphins périraient dans les eaux de Charente-Maritime et de Vendée dans la plus grande indifférence. Un carnage méconnu mais bien plus dévastateur que les traditionnelles « pêches » des Îles Féroé ou l’innommable massacre de la baie de Taiji – dénoncé avec brio dans le documentaire The Cove.
La pêche, encore et toujours…
Le massacre des cétacés made in France n’a rien à voir avec les atrocités japonaises ou féroïennes : il est tout bonnement « accidentel ». Les milliers de disparitions de dauphins relevées par Sea Sheperd découlent directement de la pêche au bar. Prévue pour les mois de janvier, février, et mars, elle vient perturber la période de reproduction des cétacés en les délogeant de leur zone de frayère. S’il n’y avait que ça…
« La mortalité infligée aux dauphins par les bateaux de pêche met en péril la survie de la population à moyen terme. »
Sea Sheperd
Le véritable problème de la pêche au bar, outre son mauvais timing, c’est sa méthode de pêche. Les chalutiers pélagiques et industriels recourent à la technique « en bœuf », qui consiste à tendre d’immenses filets traînés par deux bateaux. Le taux de ramassage est garanti : les filets remontent à la surface remplis de bars mais aussi de dauphins, « accidentellement » pris au piège.
De vaines revendications ?
Ces décimations « involontaires » inquiètent l’ONG qui rappelle que les dauphins, particulièrement vulnérables à la pollution plastique et chimique, souffrent d’une faible fécondité et d’une difficulté croissante à se nourrir – là encore à cause de la surpêche… En conséquence, Sea Sheperd appelle l’État français à prohiber la pêche « en bœuf » sur les zones de frayère, instaurer une meilleure surveillance des butins de pêche, et désigner un organisme chargé de recenser les données relatives aux captures « accidentelles » de dauphins. L’ONG n’épargne pas non plus les consommateurs qui les conjurent à « boycotter systématiquement les poissons issus de la pêche au chalut » tout en réduisant leur consommation de poissons.
Le 28 février, les ministres de l’agriculture et de la transition écologique et solidaire rappelaient conjointement dans un communiqué que l’État français veillait déjà à « limiter les captures accidentelles de petits cétacés en Atlantique ». La situation est telle qu’un groupe de travail a été spécifiquement attaché à cette question depuis l’hiver 2016-2017, après que 800 dauphins s’étaient échoués sur des plages de l’Atlantique. L’une des pistes avancées par le groupe consisterait à éloigner les cétacés des zones de pêche au moyen « d’un dispositif de dissuasion acoustique […] émet[tant] des impulsions sonores ». Encore à l’étude, ce mécanisme a bénéficié d’un appel à projet lancé au mois de janvier : un début de réponse à l’une des nombreuses problématiques de la surpêche ?
Par Matthieu Garcia, le
Source: Le Monde
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