Trouvant ses racines dans le bouddhisme et le shintoïsme, la cérémonie funéraire japonaise comporte plusieurs étapes cruciales au repos du défunt. Ces rites sont profondément ancrés dans la culture et le quotidien des habitants de l’archipel. Le pays est en effet celui qui dépense le plus au monde en ce qui concerne les dépenses liées aux obsèques. Lumière sur une cérémonie codifiée et strictement appliquée depuis des siècles.
Si les Japonais ont un rapport complexe avec la mort, c’est avant tout parce que leur mythologie gravite autour de ce thème dès la création et la descente d’Izanagi dans le royaume des morts pour récupérer Izanami. Dans son voyage, il fait face à des âmes errantes qui guettent la moindre occasion de revenir dans notre monde pour voler la place des vivants. Izanami étant morte, son corps commence à se putréfier et Izanagi se doit de la récupérer avant que le processus soit achevé. La putréfaction est le visage de la mort au Japon et c’est de là que vient la tradition de la crémation. Si l’on respecte le mort, il faudra le brûler, car rares sont ceux qui méritent la putréfaction dans le sol.
De même, on veut à tout prix éviter que son proche devienne l’une de ses âmes désireuses de revenir sur Terre pour perturber la vie des vivants. Le coût et l’attention donnée à la cérémonie est donc avant tout pour que le défunt se sente honoré et ravi d’avoir été pris en charge de manière respectueuse par sa famille. Il faut respecter le mort si on veut qu’il nous respecte depuis l’au-delà. Dans le shintoïsme, on garde un mitamaya chez soi, un autel honorant les ancêtres. Venue de Chine et de la pensée de Confucius, la coutume d’honorer ses ancêtres s’est rapidement installée au Japon et symbolise la continuité d’une cérémonie funéraire précise.
Car comment honorer ses ancêtres si on ne leur offre déjà pas une cérémonie digne de ce nom qui empêcherait leur âme d’errer éternellement sans trouver le repos ? Selon les régions et les traditions passées, la cérémonie peut différer. Mais depuis déjà longtemps, elle a eu tendance à s’uniformiser pour se diviser en plusieurs étapes. Au plus tôt après la mort, les proches appliquent l’eau du dernier moment, ou matsugo no mizu, où les lèvres du défunt sont humidifiées afin que sa réincarnation puisse s’opérer. Une fois cela fait, c’est la première grande étape de la décoration de l’oreiller, makura-kazari, où sont placés autour du mort des fleurs et de l’encens.
On place ensuite un nenju, c’est-à-dire un chapelet de 108 perles symbolisant chacune des façons dont le karma peut s’attacher à l’âme de l’être vivant. Le mort abandonne ainsi sa vie humaine et tout ce qu’elle comporte pour transcender l’existence. Pour que le chemin se fasse sans problème, on placera même parfois un couteau sur le torse du défunt pour chasser les autres âmes errantes. Enfin, comme dans de nombreuses autres mythologies antiques, il est nécessaire de payer le passage du monde des vivants à celui des morts et les proches placent donc six pièces d’argent près du défunt afin que ce dernier puisse traverser le Sanzu-no-kawa, le fleuve des trois chemins de la mort.
Le cadavre doit ensuite être transporté dans un temple bouddhiste, où ces derniers vivent d’ailleurs principalement des obsèques. Une fois là-bas, le corps sera purifié avec un lavement et vêtu d’un habit qu’il portera pour l’éternité. C’est également à ce moment-là que sera appliqué le maquillage si cela est nécessaire pour l’apparence du mort, comme cela se fait dans les pompes funèbres occidentales. Une fois le corps exposé, on dresse également à ses côtés un bol de riz avec deux baguettes plantées verticalement, symbolisant son dernier repas avant de partir de ce monde. C’est pour cela qu’il est très mal vu au Japon de planter ses baguettes dans son riz !
Le corps est ensuite transporté vers le lieu de crémation. L’incinération est obligatoire au Japon. Avec le manque de place évident par rapport à la population (le Japon est deux fois plus petit que la France avec deux fois plus d’habitants), les cimetières étendus sont proscrits. La crémation faite, il faudra trier les cendres pour sortir les derniers ossements qui seront ensuite broyés et rajouter à l’urne. Cette dernière est ensuite emportée par les proches et ce qui démarre une période de deuil de 49 jours, le shiju-kunichi. Après cela, l’urne sera mise en place dans le tombeau familial et le défunt sera baptisé d’un nouveau nom, son kaimyo.
Si les traditions japonaises ne se résument pas à une religion ou une mythologie unique, les rites funéraires sont, à l’instar de nombreux arts de l’archipel, étroitement liés au bouddhisme. Malgré cela, certaines étapes de la cérémonie originelle ont tendance à se perdre avec le temps suite à un désintéressement de la population par rapport à la religion et aux traditions en général. Selon vous, quel est l’élément le plus surprenant de la cérémonie funéraire japonaise ?
Par Florent, le
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