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Ce que les archéologues découvrent sur Néandertal change radicalement notre propre histoire

— © Neto de Carvalho et al. / Scientific Reports 2025

Pendant des décennies, on a accusé le climat, les épidémies, voire Homo sapiens d’avoir éteint Néandertal. Mais une autre lecture émerge aujourd’hui : et si cet humain à part entière s’était tout simplement effacé, sans violence ni fracas, dans une lente transition anthropologique ?

Et si Néandertal n’avait pas été victime… mais acteur de sa propre disparition ?

Néandertal, un chasseur-cueilleur redoutable mais isolé

Il peuplait l’Europe et l’Asie bien avant nous, entre 400 000 et 40 000 ans avant aujourd’hui. Pourtant, dès l’arrivée de Sapiens, Néandertal disparaît. Pourquoi ? Longtemps, on a pensé à une extinction brutale : guerre, maladie, explosion volcanique… Mais selon Ludovic Slimak, archéologue français et auteur de Néandertal nu, ces hypothèses catastrophistes ne tiennent plus la route.

Néandertal s’adaptait parfaitement aux climats extrêmes, et les restes archéologiques ne montrent aucun signe de violence massive. Selon Slimak, l’Homme de Néandertal n’a pas été anéanti. Il s’est peut-être effacé lui-même, face à un modèle d’humanité plus mobile, plus interconnecté : nous.

Homo sapiens : un envahisseur social, pas un bourreau

Nos ancêtres Sapiens occupaient des territoires dix fois plus vastes que ceux des Néandertaliens. Leurs outils étaient standardisés, leurs groupes structurés, leurs réseaux sociaux denses. Cette efficacité collective a lentement déstabilisé Néandertal, sans affrontement direct.

Slimak avance que les Néandertaliens se seraient repliés, volontairement, pour fuir le comportement envahissant de Sapiens. La disparition n’aurait donc pas été une chute brutale, mais une transition progressive, une recomposition silencieuse de la carte humaine.

Une découverte exceptionnelle dans la Drôme éclaire l’énigme

En 2015, dans la grotte Mandrin, l’équipe de Slimak découvre des dents et des fragments de mâchoire vieux de 42 000 ans. Baptisé Thorin, ce Néandertalien vivait isolé, sans échange génétique pendant 50 000 ans. C’est beaucoup. L’analyse de son ADN révèle un taux élevé de consanguinité. L’isolement génétique pourrait-il expliquer sa disparition ? Peut-être.

Mais Évelyne Heyer, anthropologue génétique, appelle à la prudence : trop peu de génomes sont disponibles à cette période. Elle rappelle que Néandertal était déjà en déclin démographique, avant l’arrivée de Sapiens. Et que son ADN portait de nombreuses mutations délétères.

La fin de Néandertal, un miroir pour notre propre humanité

Antoine Balzeau, paléoanthropologue, conclut : « Le mystère persiste, mais nous avons cessé de croire à une disparition simple. » Il n’y a pas eu de remplacement violent, mais chevauchement lent, entre deux formes d’humanité. Même les premiers Sapiens arrivés en Europe ont disparu, remplacés plus tard par les Aurignaciens, artistes des grottes comme celle de Chauvet.

Aujourd’hui, les humains d’Europe et d’Asie portent encore environ 2 % de gènes néandertaliens. C’est peu. Assez pour rappeler qu’ils ont existé, trop peu pour dire qu’ils vivent en nous.

Toutes les espèces ont une durée de vie limitée. La nôtre aussi.

Par Eric Rafidiarimanana, le

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