Si l’Antarctique est connu pour ses paysages glacés et sa faune, il est également le théâtre d’un phénomène étrange : des « cascades de sang » semblant jaillir du glacier Taylor, dont les scientifiques pensent avoir percé le secret.
Spectacle macabre
Ce « spectacle » a été décrit pour la première fois en 1911 par le géologue Thomas Griffith Taylor, qui l’avait alors attribué à des algues rouges. Ce n’est qu’un demi-siècle plus tard que la teinte cramoisie des coulées a été liée à des sels de fer. Le plus intrigant restant que l’eau, d’abord limpide, vire au rouge peu après avoir émergé de la glace, le fer s’oxydant au contact de l’air pour la première fois depuis des millénaires.
Dans le cadre de travaux publiés dans la revue Frontiers in Astronomy and Space Sciences, des chercheurs ont examiné de nouveaux échantillons d’eau et découvert que le fer se présentait sous une forme inattendue : des nanosphères environ 100 fois plus petites que les globules rouges humains.
« Dès que j’ai regardé les images au microscope, j’ai remarqué que ces petites nanosphères étaient riches en fer, mais qu’elles contenaient également de nombreux autres éléments – silicium, calcium, aluminium, sodium – dans des proportions diverses », explique Ken Livi, co-auteur de la nouvelle étude.
Solved: Using the powerful transmission electron microscopes of our Materials Characterization and Processing facility, Hopkins Engineer Ken Livi found the iron-rich nanospheres responsible for Antarctica’s « Blood Falls. » https://t.co/pDmJeZb76w
— Johns Hopkins Engineering (@HopkinsEngineer) June 26, 2023
« Dans sa forme minérale classique, les atomes du fer sont disposés selon une structure cristalline très spécifique. Ces nanosphères ne sont pas cristallines, et les méthodes précédemment utilisées pour examiner les solides ne les ont donc pas détectées », ajoute-t-il.
De vastes implications
Les implications de cette découverte vont bien au-delà de l’Antarctique et de notre planète. Il y a quelques années, des scientifiques avaient réussi à remonter jusqu’à la source de l’eau : un lac sous-glaciaire extrêmement salé, sous haute pression, sans lumière ni oxygène, hébergeant un écosystème microbien isolé depuis des millions d’années.
Selon l’équipe, la vie pourrait prospérer dans des environnements aussi inhospitaliers ailleurs dans le cosmos, mais nous n’envoyons peut-être pas le bon type d’équipement pour déceler des preuves de sa présence.
« C’est particulièrement vrai pour les planètes plus froides comme Mars, où les matériaux formés peuvent être non cristallins », souligne Livi. « Pour vraiment comprendre la nature des surfaces des planètes rocheuses, un microscope électronique à transmission serait nécessaire. »