De récentes analyses de l’encre utilisée pour tracer la célèbre carte, longtemps considérée comme l’une des premières représentations de l’Amérique du Nord, ont confirmé que celle-ci ne datait pas du XVe siècle, comme cela avait été à l’origine prétendu, mais plutôt des années 1920.
« Il n’y a pas de doute raisonnable ici »
Considéré comme le plus poussé jamais réalisé pour ce document, l’examen a impliqué des techniques de spectroscopie par fluorescence X et de microscopie électronique à balayage à émission de champ afin de déterminer les produits chimiques contenus dans l’encre du parchemin, dont l’authenticité était de plus en plus contestée.
« La carte du Vinland est un faux », affirme Raymond Clemens, conservateur des livres anciens et des manuscrits à la Beinecke Rare Book & Manuscript Library de l’université de Yale, où la carte est conservée. « Il n’y a pas de doute raisonnable ici. Cette nouvelle analyse devrait mettre un terme à cette affaire. »
Alors que la datation au carbone avait fixé l’âge du support à environ 600 ans, il s’est avéré que l’encre contenait des niveaux élevés de titane et de plus petites quantités de baryum, éléments que l’on s’attendrait à trouver dans les premiers pigments blancs de titane produits commercialement dans les années 1920. L’anatase, forme de dioxyde de titane utilisée à la même époque, se retrouvait partout sur la carte, et il n’y avait aucune trace d’encre ferro-gallique (composée de sulfate de fer, de noix de galle en poudre et d’une substance liante) à laquelle les scribes médiévaux avaient régulièrement recours.
Les chercheurs ont également pu comparer la carte du Vinland avec des manuscrits datant réellement du XVe siècle, dont l’encre contenait des niveaux de titane beaucoup plus faibles et des niveaux de fer beaucoup plus élevés.
Une preuve supposée de la colonisation de l’Amérique du Nord par les Vikings
Au dos de la carte figure une inscription la reliant au Speculum historiale, une partie d’une encyclopédie écrite au Moyen Âge dont proviendrait le parchemin utilisé pour la contrefaçon. La nouvelle analyse a montré que l’inscription latine originale avait été recouverte d’encre de titane, signe d’une falsification délibérée.
« L’inscription altérée semble certainement être une tentative de faire croire que la carte a été créée en même temps que le Speculum historiale », explique Clemens. « C’est une preuve claire qu’il s’agit d’un faux, et non d’une création innocente par un tiers qui a été cooptée par quelqu’un d’autre, bien que cela ne nous dise pas qui en était à l’origine. »
Proposée pour la première fois aux musées en 1957, accompagnée d’un court texte médiéval, la carte du Vinland montre la soi-disant « Vinlanda Insula », une partie du littoral de l’Amérique du Nord au sud-ouest du Groenland. Ce qui semblait conforter l’idée que les Vikings avaient atteint (et cartographié) le continent bien avant Christophe Colomb. Si la colonisation de l’Amérique du Nord par les Vikings est aujourd’hui largement acceptée, cette carte n’en est définitivement pas une preuve.
Des analyses essentielles
Selon les chercheurs, cette nouvelle analyse montre comment les équipements et les techniques de numérisation les plus récents peuvent aider à distinguer de façon définitive les documents historiques authentiques de ceux qui ne le sont pas, nous permettant ainsi de concentrer nos efforts sur les premiers.
« Des objets comme la carte du Vinland occupent une grande partie de l’espace intellectuel », explique Clemens. « Nous souhaitions mettre définitivement un terme à la controverse. Il y a tellement de choses amusantes et fascinantes que nous devrions examiner et qui peuvent réellement nous renseigner sur l’exploration et les voyages à l’époque médiévale. »
Par Yann Contegat, le
Source: Science Alert
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