D’abord à Saint-Pétersbourg puis à Moscou, on trouve un musée bien particulier : celui des bornes d’arcade datant de l’époque soviétique. À l’intérieur, on trouve une myriade de bornes datant de la Guerre Froide et on vous distribuera même un vieux kopeck pour pouvoir essayer les machines et jouer aux vieux jeux ! Lumière sur cet endroit pas comme les autres.
En entrant, on découvre d’abord une série de bornes à l’allure plutôt déprimante : des angles droits de partout, des couleurs délavées lorsque l’on ne trouve pas du gris et de la rouille un peu partout autour. En revanche, vous entendez déjà les bips et les tirs de lasers venant des vieilles machines qui nous viennent de la grande époque de l’arcade. Sauf qu’ici, rien n’est japonais ou américain. Tout est russe, on paye en kopecks et l’ensemble du musée est construit pour ressembler aux bâtiments soviétiques des années 80. L’endroit est populaire, les gens venant se faire une piqûre de nostalgie ou les plus jeunes découvrir une autre facette du passé de leur pays.
Cette nostalgie du passé soviétique ne concerne pas que les bornes d’arcade, mais tout le marché de consommation socialiste des années 70, et au-delà, s’étend à toute cette époque où le pays était vu comme quelque chose de plus grand, de plus fort et d’unique. C’est suite à l’exposition de Sokolniki en 1959 que la production de bornes soviétiques commence. Juste après la présentation, Nikita Khrouchtchev fait un voyage aux États-Unis et revient dans l’Union avec le désire de développer le marché de consommation et du divertissement, y compris les jeux d’arcade.
L’anecdote est que pour construire les machines, les Soviétiques envoyaient les plans et les idées à des usines militaires. Plein d’ingénieurs compétents et de matière première, c’était en effet l’endroit idéal pour construire des systèmes de circuits électroniques complexes. Tous les documents et plans étaient considérés comme des propriétés du gouvernement et furent donc classifiés ou détruits. Si vous voulez construire une borne d’arcade soviétique aujourd’hui, ne vous attendez pas à avoir de l’aide. Il vous faudra en acheter une, la démonter, étudier son fonctionnement et peut-être espérer pouvoir le reproduire.
Mais en obtenir un exemplaire n’est pas une mince affaire étant donné leur rareté. Malgré l’engouement général, les bornes restent très chères à fabriquer et à distribuer, étant donné leur poids de 150 à 200 kg. Eh oui, si elles sont cinq fois plus lourdes que leurs équivalents japonais et qu’elles ressemblent à des tanks, c’est parce qu’elles sont faites avec des matériaux lourds. Après tout, elles sortent d’usines militaires ! Si vous passez par le musée et jouez aux bornes, vous vous rendrez rapidement compte que chaque jeu rentre dans la même catégorie de pensée et s’inscrit dans la continuité de la philosophie marxiste.
Les jeux mettent avant tout en avant le travail de l’ouvrier et le patriotisme communiste, écartant tout ce qui touche au fantastique et aux jeux de rôle. Ici, les jeux avaient un but précis, contribuer au développement cérébral des plus jeunes en proposant des jeux améliorant la coordination oeil-main, le temps de réaction et la logique. Et n’espérez pas pouvoir vous vanter de vos mérites si vous êtes meilleur que vos copains, car ici, il n’y a pas de top 3 des joueurs, pas de scores répertoriés. Rien qui puisse créer une compétition et vous donner la fausse impression que vous valez mieux que les autres.
Les jeunes sont très attachés à ces bornes qui les lient de façon directe avec leur histoire, et même s’ils ne veulent pas d’un retour de l’Union soviétique, beaucoup ne peuvent s’empêcher de ressentir cette nostalgie de la puissance, et de vouloir en conserver ses reliques. Ce qui est vraiment génial avec ce musée, c’est la possibilité de jouer aux jeux. Oksana Kapulenko, le directeur du musée, explique que les jeux sont faits pour être joués, pas observés comme des spécimens. Et dans le fond, c’est tout ce qui compte. Si vous avez la chance de passer par Moscou ou Saint-Pétersbourg un jour, n’hésitez pas à faire un tour au musée des bornes d’arcade soviétiques !
Il y a quelque chose de fascinant à pouvoir admirer des reliques d’un passé proche. Et là-bas, non seulement on peut voir ce passé, mais on peut interagir avec pour quelques kopecks ! Des jeux ancrés dans leur contexte historique et qui, même s’ils ne valent pas les merveilles japonaises de la même époque au niveau du plaisir de jeu, offrent une autre perspective sur une époque disparue et vous feront voyager dans le temps. Auriez-vous envie de jouer à une borne d’arcade soviétique ?
Par Florent, le